Fredo et Luigi ont grandi dans la Valsesia, une vallée montagneuse du nord de l'Italie. Luigi est marié à Betta et le couple attend un enfant, quand Fredo, après un séjour de sept ans au Canada, réapparait dans leurs vies. Il vient réclamer sa part d'héritage après la mort du père. Les retrouvailles s'annoncent tendues, d'autant plus que les deux frères, très différents, ont néanmoins en commun une forte addiction à l'alcool... Sur ces terres rudes et oubliées de tous, un verre ou un mot de trop suffisent parfois à libérer les ténèbres de la vallée, et à transformer les chiens en loups.
L'art des contradictions est filé tout au long du récit : contradiction entre la vallée accueillante mais moins lumineuse que la montagne plus âpre à vivre, entre ces deux frères aux destins dissemblables et pourtant plus proches qu'il n'y paraît, entre modernité incarnée par les pistes de ski, et respect des traditions, et finalement entre l'homme et l'animal qui se rejoignent quelquefois dans la violence de leurs actes. Rien n'est tranché, le monde forme un tout qui doit s'accommoder de ces dissemblances pour s'extraire du chaos.
J'ai regretté un manque de cohésion des points de vue narratifs : le premier chapitre est du point de vue des animaux (et je n'ai pas réussi à me mettre dans la peau du loup...) ensuite le narrateur parle à la troisième personne pour proposer le destin de Luigi (le chapitre que j'ai préféré), puis la première personne est utilisée pour son frère avant de revenir à la troisième personne pour Elisabetta. Pour finir, un long poème narratif sur les arbres de Taliesin, barbe gaulois du 6ème siècle, dont on ne comprend le sens qu'en lisant la postface.
Cet ensemble discordant casse le rythme du récit et entraine un manque de cohérence et de profondeur dans la psychologie des personnages.
L'auteur parle en fin de roman de sa passion pour l'album Nebraska de Bruce Springsteen ou encore de Raymond Carver et son art de la nouvelle, ici il ne manquait pas grand chose pour retrouver ces atmosphères suspendues qui condensent en peu de pages l'essentiel, mais, à mon sens, il fallait encore couper, travailler le texte, polir, pour saisir l'insaisissable.