En s'accusant de tous les maux, l'Occident peut ainsi rester au centre du jeu. Lorsqu'il était le plus fort, il se glorifiait de tout; maintenant qu'il se rétracte, il s'accuse de tout; dans les deux cas, il se pense comme l'unique acteur responsable et dénie aux autres civilisations toute action autonome.
Si Jean-Loup Bonnamy parle dans ce livre de L'Occident déboussolé en général, il se penche en particulier sur le cas de la France et fait le tour des causes et formes de ce déboussolement.
L'IMMIGRATION, STADE ULTIME DU COLONIALISME
Les Français, en majorité, ne veulent pas que l'immigration se poursuive. Mais le patronat et la gauche s'allient pour la soutenir et la favorisent.
Le patronat veut bénéficier d'une main d'oeuvre bon marché - et de nouveaux consommateurs - dans le bâtiment, le nettoyage, le gardiennage ou l'aide à la personne:
Ce n'est pas parce que les Français refusent de faire ces métiers qu'on fait appel à l'immigration. C'est parce qu'on fait appel à l'immigration qu'ils ne veulent plus exercer ces métiers.
La gauche fait montre d'un esprit missionnaire et emploie un discours moralisateur:
- L'esprit missionnaire se manifeste sous la forme du discours antiraciste et du discours immigrationniste.
- Le discours moralisateur et les sentiments généreux empêchent toute critique de cette nouvelle colonisation.
LES IMMIGRÉS VICTIMES DE L'IMMIGRATION
Un grand nombre d'immigrés sont les victimes de l'immigration telle qu'elle est pratiquée:
- Ils sont déracinés et le sont d'autant plus que le pays qui les accueille rejette ses propres racines et sa culture.
- Ils ne sont pas assimilés parce que le pays qui les accueille ne fait rien pour qu'ils le soient et les incite plutôt à faire valoir leur droit à la différence:
La vision française, assimilationniste et anti-communautariste, est le contraire du racisme: elle considère que tous les Français sont égaux, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, sans distinction d'origine, de couleur de peau ou de religion.
LE NÉO-ANTIRACISME ET LE NÉO-LIBÉRALISME
L'auteur écrit, sans rire, que la gauche est devenue capitaliste et libérale sous la présidence de François Mitterrand, après l'échec de sa relance keynésienne et a adopté ce qu'il est improprement convenu d'appeler le néo-libéralisme, qui n'a rien de libéral:
La question identitaire efface désormais la question sociale, tandis que la gauche abandonne la lutte des classes pour l'antiracisme, le social pour le sociétal, la défense des ouvriers pour celle des minorités.
La gauche, pour continuer d'exister, a effectivement changé de clientèle électorale.
En développant l'État-providence1, qui est intrinsèque au socialisme - l'égalisation des conditions par la redistribution - elle est, entre autres, responsable des délocalisations et de la désindustrialisation et, par voie de conséquence, de l'affaiblissement du monde ouvrier par l'augmentation des coûts salariaux.
L'auteur parle de dégâts de la mondialisation, mais il conviendrait de parler plutôt de dégâts du mondialisme, dont l'Union européenne, telle qu'elle s'est construite, est l'expression, puisque les entreprises des pays membres y ont été affaiblies face à la concurrence internationale par taxes et réglementations...
L'ISLAMO-GAUCHISME
L'acte fondateur de l'islamo-gauchisme - Bonnamy a raison - remonte à plus d'un siècle, quand les Bolcheviks, en 1920, à Bakou, ont envisagé de s'allier avec l'Orient - essentiellement le monde musulman - pour abattre l'Occident capitaliste et colonialiste.
Cette alliance a été réactivée à la fin des années 1980. Mais elle se heurte au conservatisme sociétal des populations issues de l'immigration extra-européenne et braque les classes populaires autochtones qui se tournent vers le populisme...
Bonnamy a raison de dire que, pour combattre l'islamo-gauchisme, il faut éviter deux écueils:
- affirmer que l'islamisme n'a rien à voir avec l'islam,
- penser que l'islam se résume à l'islamisme.
et qu'il faut profiter des divisions internes profondes du monde musulman.
LE WOKISME
"Woke" est le mot sur toutes les lèvres. Signifiant "éveillé" en anglais, il désigne un courant politique qui entend déconstruire les fondements de la société occidentale, perçue comme oppressive. Les militants wokes promeuvent la théorie du genre ainsi qu'un féminisme radical, dénonçant le "racisme systémique" et le "privilège blanc".
Ce courant, né dans les universités américaines, est contraire aux Lumières en ce sens qu'il considère la rationalité comme une construction sociale destinée à imposer et promouvoir la "suprématie blanche" et dans leur lignée en ce sens qu'il reprend la promesse d'émancipation et l'utopie de l'égalité parfaite, propres à l'Occident.
Les wokes parlent de deux sujets en permanence: le sexe et la race, sujets qui obsèdent de manière névrotique le puritanisme américain.
Bonnamy remarque: alors qu'il fustige la domination blanche, le wokisme est un mouvement exclusivement occidental, auquel le reste du monde demeure rétif:
Le plus surprenant est que la gauche radicale française, courant radicalement anti-américain il y a encore dix ans, a non seulement mis cette thématique en sourdine, mais s'est totalement convertie à cette réthorique woke.
CONCLUSION
Il faut:
- réduire drastiquement l'immigration: pour leur bien et celui de tous, les immigrés doivent s'assimiler ou partir,
- opérer un redressement intellectuel et moral,
- faire preuve d'autorité pour être respecté,
- ne pas s'auto-flageller, ni se repentir,
- respecter toutes les cultures, y compris la sienne,
- accepter d'être une civilisation ni pire ni meilleure que les autres,
- ne plus s'ingérer dans les autres peuples: respecter les autres chez eux, et se faire respecter chez nous.
Francis Richard
1 - Selon Bonnamy, il existe une incompatibilité profonde entre le modèle communautariste et l'idée d'un État-providence aussi généreux que celui de la France parce que l'excès de diversité culturelle sape la confiance et la solidarité au sein de la nation, comme s'il était justifié de parler de solidarité quand les solidaires de la nation française n'ont de toute façon pas le choix de ne pas l'être...
L'Occident déboussolé, Jean-Loup Bonnamy, 238 pages, Éditions de L'Observatoire
Publication commune avec LesObservateurs.ch.