La Fête nationale est passée, les vacanciers sont sur les routes, et comme chaque année nous arrivent des nouvelles particulièrement glauques des prisons.
Nous prenons notre parti du temps incertain, à la moindre éclaircie nous sortons les tables, pendant que d’autres croupissent dans les maisons d’arrêt ou les centres de détention de la République. Et si nous devons subir de nouveaux caprices caniculaires, il est assez facile d’imaginer ce que devient la vie derrière les murs dans de telles conditions.
Loin de moi l’idée de vouloir faire des détenus de malheureuses victimes. La loi est faite pour être respectée, et tout contrevenant doit être puni à la hauteur du méfait qu’il a commis.
Mais il se trouve que notre beau pays vient de battre un record peu enviable : le nombre de détenus dans les prisons a atteint, ce mois-ci, 64 250 personnes pour 50 806 places, ce qui constitue une hausse de 0,6 % par rapport au mois précédent. En France, le taux de surpopulation atteint 126 %. Six prisons sur dix sont surpeuplées. Au cours des sept dernières années, le nombre de détenus a augmenté de 42 %, une “hyper-inflation” qu’il ne faut pas s’attendre à voir ralentir. Les établissements les plus touchés par ce surpeuplement sont les maisons d’arrêt où sont incarcérées les personnes en attente de jugement et les “courtes peines”.
Dans notre région, 10 384 personnes sont actuellement détenues pour une capacité théorique de 7 856 places, soit une surpopulation de 136%. « À Amiens, il y a 651 détenus pour 314 places, soit 207 % de taux d’occupation. À Béthune, il y a 256 détenus pour 158 places ; à Douai, 698 détenus pour 389 places ; à Dunkerque, 161 détenus pour 109 places ; à Sequedin, 654 détenus pour 596 places ; à Loos, 781 détenus pour 438 places… », explique l’UFAP, le syndicat majoritaire chez les surveillants de prison.
Pour être complet, précisons que ce chiffre des détenus régionaux prend en compte « 854 personnes en aménagement de peine », c’est-à-dire qui bénéficient d’une semi-liberté, d’une liberté conditionnelle ou sont sous bracelet électronique. Par ailleurs, à Béthune, entre 200 et 250 places seront disponibles « à partir de septembre », pour des mesures alternatives à l’enfermement.
Pour Laurent Scasselati, le secrétaire régional de l’UFAP, « plus il y a de monde dans les prisons, plus les conditions de vie des détenus sont difficiles, et plus le travail des surveillants est difficile ». Outre l’augmentation mécanique de la charge de travail, le syndicaliste évoque « la promiscuité » et les « tensions » qui naissent dans les prisons, aussi bien entre détenus qu’à l’égard des surveillants. Quant à l’encellulement individuel, prévu par un décret du 10 juin dernier mettant la France en conformité avec les règlements européens, « il existe sur le papier mais pas dans les faits », estime-t-il.
J’ai déjà eu l’occasion de visiter le centre de détention de Loos, qui abrite majoritairement des détenus en fin de peine. La maison d’arrêt m’avait-on dit à l’époque, il vaut mieux éviter. On a depuis construit un nouvel établissement pour la désengorger à Sequedin. Mais ces deux structures ne suffisent pas.
Parmi les pouvoirs que j’ai endossés en devenant maire, il y a de redoutables pouvoirs de police. Je suis prêt à les assumer fermement, sévèrement si le besoin s’en fait sentir. Et depuis quatre mois, j’ai déjà dû montrer que j’étais susceptible d’exercer ce pouvoir de coercition, qui peut conduire à la mise sous écrou.
Mais il me semble que la détention n’est plus considérée comme l’éventualité ultime, une fois que toutes les alternatives ont été épuisées. J’ai pu constater que le retour de détention est en très grande majorité catastrophique, pour l’ex-détenu et pour son entourage.
Pour ce qui concerne notre commune, l’équipe qui m’entoure et moi-même nous sommes persuadés que notre rôle est avant tout préventif. Il réclame parfois infiniment de patience et de dialectique, il n’est pas toujours la solution la plus facile. Il n’est jamais simple de faire preuve de pédagogie, notamment avec des citoyens particulièrement rétifs.
Mais c’est là qu’est notre place.