Magazine Régions du monde

Dans le journal extime de Josué Azor

Publié le 17 juillet 2024 par Aicasc @aica_sc


L’œuvre de Josué Azor est une longue exploration de ses zones d’interdits et de fragilité en tant qu’individu. Il donne à voir ses points de fuite. Intimement lié à sa vie personnelle, son travail fait entrecroiser divers lieux, à l’image des lianes. Azor nous familiarise avec l’univers sacré du vaudou, loin des clichés stéréotypés issus de l’imaginaire religieux catholique, protestant et autres. Il explore l’érotisme des corps nus masculins et la fluidité des expressions de genre, déconstruisant ainsi les seules grilles du regard hétérocentré de la masculinité pour en proposer une vision plus intimiste et plus ouverte à d’autres possibilités d’aimer. Il donne à voir des minorités encore trop sous-représentées et invisibilisées dans notre société et dans les débats publics.
Les photographies de Josué Azor sont exposées en Haïti, en Italie, au Canada et aux États-Unis. Il est membre du Kolektif 2 Dimansyon (K2D), un collectif de photographes haïtiens engagés dans la photographie documentaire et le photojournalisme.
Le travail de Azor investit les ressentis et les corps de ses sujets. Ayant débuté dans la photographie touristique dans les années 2008, il participera à une série d’ateliers de formation en photographie organisés par la FOKAL et l’Institut Français en Haïti. Ces ateliers lui permettront de découvrir d’autres dimensions dans la photographie telle que la photographie documentaire et artistique. Ces ateliers étaient dirigés par des photographes internationalement reconnus tels que Nicolas Lo Calzo, Paolo Woods, Gael Turine et David Damoison. C’est à la suite d’un atelier avec ce dernier que Josué Azor a lancé son premier projet photographique intitulé « RACINES », qui constitue une véritable plongée au cœur d’un célèbre lieu de pèlerinage sacré et mystique en Haïti, le Lakou Soukri, situé à Gonaïves, la ville où l’indépendance d’Haïti a été proclamée le 1er janvier 1804 par l’empereur Jean Jacques Dessalines.

Dans journal extime Josué Azor

Josué-Azor Racines XXXX Courtesy Josué-Azor

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Dans journal extime Josué Azor

Josué-Azor Racines XXXX. Cortesy Josué-Azor

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Racines, une plongée dans l’univers sacré du vaudou
Cette série de photographies explore les rituels sacrés et les traditions cultuelles encore vivantes à Lakou Soukri. Les lakous sacrés en Haïti, sont des espaces communautaires qui jouent un rôle central dans la vie religieuse et sociale des adeptes du vaudou. Les trois principaux sont : Lakou Soukri, Badjo et Souvnans. Le projet « RACINES » de Josué Azor a abouti à sa première exposition photographique à la FOKAL.
La majorité des clichés de Racines sont en noir et blanc. Les adeptes, en transe, dansent dans une gravité muette. Ce parti pris pour donner à voir certaines photographies en noir et blanc, intensifie le sentiment de l’expérience mystique indicible que vit les adeptes. Le regardeur qui contemple les clichés, pénètre sur la pointe des pieds et observe pudiquement ce que Azor révèle. Les corps se mélangent, entrent en transe et s’unissent pour communier avec les éléments terre, eau et arbre.

Dans journal extime Josué Azor

Josué AZOR Racines 2011 Courtesy Josué-Azor-

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Dans ce projet, on retrouve les premiers éléments constitutifs du style de Azor qui s’affirmera sur ces autres projets photographiques qui paraîtront des années plus tard. Gros plan sur le visage. Les corps qui se meuvent dans un espace, (presque effacé du champ visuel), photographiés comme au ralenti. Une attention particulière portée sur le corps du sujet.
Il décrit cette série comme une conversation avec lui-même, m’a-t-il confié lors d’un entretien. Ce projet fait ressortir la dimension activiste du travail de Azor, qui se poursuivra notamment avec ses autres projets, Noctambules et Gason Solid.

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Noctambules Courtesy Josué-Azor

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« Mon travail photographique possède une forte dimension activiste. Dès mes débuts avec la série Racines , cet aspect était présent. C’est en quelque sorte une conversation avec moi-même. Ayant grandi dans une famille chrétienne et anti-vaudou, j’ai fait l’expérience d’aller dans un lakou et j’ai découvert un aspect magnifique du vaudou que j’ai jugé nécessaire de valoriser. J’ai mis de côté mes préjugés et les peurs inculquées par ma famille pour montrer cette beauté. Mon travail propose un regard différent sur le vaudou, ce qui représente une forme d’activisme pour moi. »
Ce premier projet a reçu un bel accueil du public haïtien, et qui confortera Azor dans son choix de devenir photographe. Cette première série sera exposée par la suite en Italie, au Bénin et au Burkina Faso dans le cadre du FESPACO.


Visibiliser l’espace queer en Haïti
En 2013, la série Noctambules est exposée pour la première fois à la Maison Dufort. Pour certains spectateurs, c’est une petite onde de choc de découvrir pour la première fois les milieux festifs gays, lesbiens, bisexuels, transgenres et autres. Les sujets de Noctambules se révèlent dans une profusion de couleurs et de rires, abandonnant les masques du jour pour se livrer à la nuit. Azor explore ces nuits port-au-princiennes combien particulières, capturant ces corps qui se dessinent, se déconstruisent, affirment leurs sexualités et leurs identités dans une multitude de possibilités.

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Noctambules Courtesy Josué Azor

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On remarque que le corps masculin est quasiment au centre de cette série. Photographié de manière lascive et sensuelle, avec des maquillages éclatants et des masques de fête au milieu des néons lumineux. Ce choix de donner à voir les corps masculins est la manière de Azor d’illustrer encore la difficulté pour un homme de se démarquer des normes de genre rigides dans les sociétés patriarcales, où les valeurs de la masculinité sont souvent incompatibles avec la féminité. Les pressions sociales, l’homophobie, et les idéaux de virilité conditionnent le corps masculin à un carcan qui limite ses possibilités d’épanouissement. En montrant ces corps masculins, ce projet déconstruit les représentations stéréotypées de ces sujets de sexe d’assignation masculin affirmant leurs féminités et donne à voir un milieu méconnu du public haïtien.
La communauté queer est fréquemment marginalisée en raison de l’intolérance systémique persistante dans les espaces publics. En 2017, une loi adoptée par le Sénat haïtien a non seulement interdit les mariages homosexuels mais également toute expression publique de soutien à l’homosexualité. Cette loi reflète une forme d’homophobie institutionnalisée en Haïti. Elle a été promulguée en réponse directe à la première édition du festival LGBT MassiMadi à Port-au-Prince en 2016, qui avait été annulée en raison de réactions hostiles et violentes à son encontre.

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Noctambules XXXX.Courtesy Josué-Azor

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Dans ce projet, la touche de Azor est subtile. Son jeu avec les lumières et les ombres rend les corps dans toute leur sensualité, soulignant l’intimité de chaque scène photographiée. Une photographie en particulier est saisissante : un homme se tient debout, portant un masque doré, les rayons lumineux des néons derrière lui évoquent les couleurs des drapeaux LGBTQI+. Le reste de son corps est plongé dans un noir d’encre, et une autre tête se dessine de profil au-dessus de la sienne. Son regard se fixe sur quelque chose que le regardeur ne peut voir. Azor joue habilement et intentionnellement avec le regard du spectateur. Il le laisse ébloui et contemplatif au milieu d’une atmosphère remplie des fumigènes et de fluos comme s’il prenait part aussi à la fête.
J’ai demandé à Azor s’il avait travaillé sur Noctambules avec l’idée de départ que cette série serait une forme d’activisme pour visibiliser l’espace queer en Haïti. Il m’a répondu que le militantisme a fini par rattraper la série. Cette série découle davantage d’une quête personnelle d’ Azor et de ses propres questionnements intérieurs. Cela montre que c’est la réception de l’œuvre par le public qui a conditionné et intégré cet aspect militant dans ce travail, ce qui a d’autant plus contribué à renforcer l’impact de cette série.

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Noctambules Courtesy Josué-Azor-

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« Le militantisme a fini par rattraper la série. À l’origine, l’idée n’était pas nécessairement de visibiliser le monde queer. Je suis sorti la nuit pour observer le monde queer, qui reflétait mon propre parcours d’acceptation de ma sexualité. La publication de ces images dans l’espace public a attiré l’attention et suscité des débats, donnant à mon travail une dimension d’activisme et de militantisme. En ce sens, le militantisme a fini par imprégner ce travail »
Noctambules met en lumière cette communauté invisibilisée dans les espaces publics, vivant en marge d’une société qui peine encore à l’accepter. Cette série a été exposée aux États-Unis à Duke University en 2015.
Azor poursuit cette exploration de la sexualité et de l’érotisme à travers Gason Solid et Érotes , qui a été réalisé en collaboration avec Maksaens Denis. Chacun d’eux a travaillé sur la représentation du nu masculin dans leurs langages esthétiques propres, qui a donné naissance à deux œuvres différentes dont l’exposition a eu lieu à la Villa Kalewès à Pétion-Ville en 2016.
L’utilisation du collage dans cette série permet de superposer plusieurs scènes et plusieurs plans évoquant l’érotisme et la sexualité. Collage qui ne disloque pas mais renforce le récit que l’image veut raconter et dont le tout forme un ensemble visuel cohérent au regard du contemplateur.
Le choix astucieux du nom Gason Solid , qui se traduit littéralement par Garçon Solide, Homme fort , joue sur les notions de virilité, de masculinité et de féminité. Les sujets masculins sont représentés nus, adoptant des postures lascives qui sont habituellement associées aux modèles féminins. Un sujet masculin dans un rôle associé au sexe féminin apparaît comme faible dans nos perceptions sociales phallocentrées. Azor joue sur ce contraste entre le nom de la série et les images pour jeter un coup de pied dans cette fourmilière phallocentrique, et nous pousse à réfléchir sur notre propre perception de la virilité et les grilles de l’hétéronormativité.

Une lecture extimiste de l’œuvre photographique de Josué Azor
En analysant l’ensemble des séries de Josué Azor, il est tentant d’associer ces productions à sa vie personnelle, et peut être de les interpréter comme une exploration des interdits liés à son enfance.
Ayant grandi dans une famille très stricte, chrétienne et anti-vaudou, il a été immergé dans une culture remplie de préjugés contre le vaudou. Il avait très peu de liberté pour sortir, une peur de la rue et de la nuit transmise par sa famille. En tant que jeune homosexuel se questionnant sur sa sexualité, la photographie est devenue pour lui un exutoire, un moyen de se chercher et de trouver des réponses. Il explore ses territoires interdits pour mieux se révéler à lui-même et s’accepter.
Sa photographie va à l’encontre des interdictions imposées par sa famille durant sa jeunesse. Sa première série Racines marque son premier pas de côté, une tentative de contrer ses préjugés et ses peurs du vaudou inculquées par sa famille. Plus tard, avec ses séries homoérotiques Noctambules, Gason Solid et Érotes , il explore le nu, la nuit, le milieu queer et tente d’apprivoiser Port-au-Prince, cherchant à retrouver cette liberté dans la nuit qui lui avait été refusée durant ses jeunes années.

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Gason Solid_XXXX. CourtesyJosué-Azor

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Les séries résonnent avec les épisodes clés de la vie personnelle d’Azor. Il sublime, affronte et surmonte ses interdits, compense ces expériences de jeunesse manquées à travers l’obturateur. C’est un récit de soi en filigrane que nous donne à voir Azor à travers les autres. Comme le dit si bien Carlo A. Célius…
« Récit de soi, compris comme le fait de se raconter à travers l’appropriation de récits collectifs en circulation, en y injectant ses désirs, ses aspirations, ses peurs, ses angoisses… C’est un espace d’élaboration d’une image de soi, le lieu d’une quête de compréhension de soi et du collectif, de soi dans et par rapport au collectif » .
Ses photographies deviennent extimes, cette dimension « par laquelle des fragments du soi intime sont proposés au regard d’autrui afin d’être validés » . Non comme une forme d’exhibitionnisme comme le signale Serge Tisseron, mais comme un « désir de se rencontrer soi-même à travers l’autre et d’une prise de risque » . Ce récit de soi extimiste s’enchevêtre aussi car Azor le raconte à travers les autres et le donne à voir aux autres. On peut se demander où finit son « je » et où commence le « nous ». Cette lecture de Patricia Donatien sur les romans féminins caribéens peut également s’appliquer à l’œuvre de Josué Azor :
« À l’inverse de la fiction masculine, les romans féminins caribéens se construisent non pas autour d’une narration allant du collectif vers le privé, mais plutôt dans une dynamique de récit orientée de la sphère privée et familiale vers le domaine public » (Donatien, 2018)

Dans journal extime Josué Azor

Josué Azor Gason-Solid Courtesy Josué-Azor1

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Le travail de Azor s’inscrit dans cette dynamique de récit , qui s’oriente tantôt du privé au public et vice versa. Un récit en miroir où le personnel et le collectif s’entrelacent et s’imbriquent. C’est un jeu subtil qui se déroule en filigrane dans son œuvre entre son « je » et le « nous », au point que parfois cette extimité se noie dans la réception de son travail et confère à son œuvre d’autres dimensions sociales tout aussi pertinentes pour appréhender son récit. Dans notre entretien, il affirme :
« Mon travail explore les interdits de ma vie, passant progressivement de la religion à l’underground queer. Ensuite, avec la série « Erotes », j’examine quelque chose de plus intime : la sexualité des hommes et le nu masculin. Ma photographie est un moyen d’explorer les interdits de mon enfance. »
L’œuvre de Azor offre de multiples grilles d’appréhension. Il fait partie d’une génération de photographes talentueux qui occupe le devant de la scène artistique dont le travail est reconnu et commenté en Haïti et à l’international. La photographie de Azor questionne les normes traditionnelles de genre et de sexualité dans notre société. Elle visibilise la communauté queer marginalisée en Haïti. En interrogeant les stéréotypes de genre, Azor nous ouvre à la diversité des expressions d’identités de genre et sexuelles, et nous pousse à questionner les intolérances de notre société, trop prégnantes dans les discours et les actions issus de l’espace public. Son œuvre est non seulement une fenêtre ouverte pour mieux comprendre l’espace social dans lequel nous évoluons et ses préjugés, mais c’est aussi un moyen pour lui de se révéler à travers sa photographie. Azor tisse ce lien entre les sujets qu’il photographie, leurs histoires et son récit personnel et intime. Ce lien nourrit son travail et lui donne en retour une dimension profondément humaine et sensible.

Ervenshy Hugo JEAN-LOUIS


NB : Toutes les photographies utilisées sont de Josué Azor. Je le remercie de sa courtoisie pour m’avoir autorisé à les utiliser dans le cadre de la rédaction de cet article.
Ervenshy Hugo JEAN-LOUIS
Facebook et Instagram : JOSUÉ AZOR

Textes cités

1 CÉLIUS Carlo Avierl, « Célestin Faustin, un peintre haïtien face au sacré », Histoire et missions chrétiennes, 2009/4 (n°12), p. 93-110. DOI : 10.3917/hmc.012.0093. URL : https://www.cairn.info/revue-histoire-monde-et-cultures-religieuses1-2009-4-page-93.htm

2 TISSERON Serge, « Intimité et extimité », Communications, 2011/1 (n° 88), p. 83-91. DOI : 10.3917/commu.088.0083. URL : https://www.cairn.info/revue-communications-2011-1-page-83.htm

3 Je reprends l’idée d’ “extimiste” telle exprimée par Patricia Donatien dans son livre « L’art caribéen, le penser pour le dire : Réflexions autour de la littérature, des arts visuels, de la musique et de la danse » : « J’entends par « extimiste » un mode d’écriture qui privilégie le public, l’extérieur, le social, l’historique mais qui projette dans cet espace des tranches intimes de la vie de certains personnages… » . Paris : L’Harmattan, 2018, page 156.

4 Donatien, P. (2018). L’art caribéen, le penser pour le dire : Réflexions autour de la littérature, des arts visuels, de la musique et de la danse. Paris: L’Harmattan.


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