Magazine Bourse

Libre échange, le meilleur des systèmes

Publié le 25 août 2008 par Careagit
Faisant suite à mon billet de Vendredi dernier, Malakine a souhaité poursuivre le débat, ouvrant la question des mutations économiques abordées la semaine passée sur un plan plus planétaire et donc global et sur le développement croissant de la spécialisation des pays. Ce billet me dépeint comme libéral et proche des théories libres échangistes (1). Ce que je suis. Dans ce costume, je vais donc m'efforcer de répondre aux critiques et interrogations qu'expriment les autres acteurs de ce débat, Malakine et mon compère Kiwisien Edgar.
Comme le cheminement logique le laisse à penser, exprimons d'abord les raisons pour lesquelles le libre échange me semble être le meilleur système. La raison est simple, je ne crois pas en la performance de secteurs peu compétitif et entretenu sous oxygène par un acteur si puissant qu'il soit. A ce titre, l'histoire économique regorge d'exemples de secteurs sinistrés, placés sous assistance par la puissance publique et devenu à terme de véritables gouffres financiers pour être ensuite cédés ou délocalisés dans l'indifférence la plus totale. Si l'on focalise un instant sur le fonctionnement d'un tel système, l'on se rendra d'ailleurs compte qu'il est le résultat logique des raisonnements de l'homo économicus. L'acteur économique, qu'il soit État, Entreprise ou Ménage, rationalise son choix en terme d'avantages/inconvénients. Que ce soit en matière d'investissements, de consommations ou d'orientations stratégiques, il est rare qu'un autre paramètre se substitue à la rationalité comme raison principale du choix. Le meilleur (ou plutôt "son meilleur") dans son domaine gratte la plus grosse part du gâteau. Contrairement à ce qu'en dit Malakine dans sa longue, mais passionnante démonstration, je ne crois guère en l'avènement d'un monde constitué de pays multi-capables et diversifié. En tout cas pas tant que les acteurs économiques seront rationnels.
Comme cela est brillamment décrit dans les oeuvres de Ricardo et Smith, la spécialisation des pays est donc l'unique porte de sortie favorable dans le système économique mondialisé. A bien y regarder, nos vies, professionnelles particulièrement, sont aussi réglementées par les même rouages. Étudiants, vous cherchiez à développer des compétences que les entreprises souhaiteraient trouver en vous au début de votre carrière professionnelle, vous avez choisi un secteur, vous êtes spécialisé, le marché prend les meilleurs aux meilleures places et rejette les moins compétents. C'est le jeu. Le système garde sous oxygène les moins compétents qui s'entetent, au lieu de se spécialiser là où le marché à des besoins. Même constat, même préconisations politiques, même erreurs.
Là et le problème pour certains opposants au système dont Malakine. D'un côté, l'émergence des meilleurs ne pose guère de problèmes. De l'autre, il faut bien gérer "les perdants toujours plus nombreux". Cette remarque me gène, car elle débouche sur un conclusion qui présenterait un monde en perpétuel appauvrissement. Or en réalité c'est bien le contraire qui se déroule. La raison se trouve dans la théorie de Schumpeter de destruction créatrice. Le principe de destruction créatrice décrit un phénomène dans lequel l'arrivée de nouvelles technologies ou l'émergence de nouveaux acteurs au détriment d'autres, débouchent infine sur un avantage pour tous. Les "gagnants" sont plus nombreux que "les perdants". Exemple basique. Les caisses automatiques poussent ici où là dans les supermarchés. Même si ces dernières ne devraient pas supplanter totalement la traditionnelle caissière (marketing, relationnel et service client oblige), elles tendent à se développer et à supprimer des emplois. Cependant, personne ne dit combien d'emplois (et de salaires) sont nécessaires pour imaginer, concevoir et faire fonctionner ses machines. Probablement bien plus qu'un emploi seul. A cet exemple peut être opposé d'autres exemples, certes. Mais la progression discontinue de la croissance mondiale est là pour prouver que la spécialisation croissante des pays dans le grand jeu économique est bénéfique plus que néfaste (2). (Combien de millions de personnes sortis de la misère en Chine, Brésil, Asie du Sud Est ou en Inde ?)
Comme une évidence, le débat se recentre sur notre beau pays. Quelle rôle devons nous tenir dans la mondialisation ? Comme Malakine, je crois que la France est reconnue en matière de textile de haute tenue, de luxe, de nourriture, vins et autres champagnes. En la matière la multiplication de l'offre moyenne issue d'autres pays "concurrents" ne devrait d'ailleurs que renforcer le caractère élitiste dont la profession bénéficie. La qualité de vie oui, incontestablement offre à notre tourisme un moteur inépuisable. Moteur qu'il ne reste qu'à entretenir. Je reste en revanche sceptique sur notre capacité à conserver un leadership en matière industrielle (TGV, aéronautique...) tant nos coûts sont élevés, notre compétitivité hors prix moyenne et notre capacité à innover proche de celle de nos concurrents. En revanche il existe (existait ?) une porte d'entrée phénoménale que la France ne s'est en rien donné les moyens d'ouvrir. La révolution énergétique.
J'ai déjà eu plusieurs fois l'occasion de m'exprimer sur le sujet ici même. Je crois en l'avénement d'une prochaine révolution des modes de consommation et des modes de vie. Ce changement se fera de manière douce mais se fera tout de même, attisé par la fièvre pétrolière et les tensions sur les autres matières premières. L'évolution récente de la planète tend à avaliser la thèse Malthusienne du décalage inévitable entre la progression des ressources et celle des populations. Si, par bonheur, nous n'en sommes pas encore à un tel point, il n'en reste pas moins que la révolution énergétique devrait prendre place dans l'histoire aux côtés de la révolution industrielle ou informatique. De cela je suis persuadé, à tord peut être. Dans cette optique il me semble que la France a raté le coche, déjà. Le marché des énergies renouvelables est tiré par les États Unis, le Brésil et l'Allemagne qui ont su croire au juste moment au potentiel du solaire, de l'éolien, du gaz et aux matières agricoles. La France, poussée par sa puissance nucléaire, a eu tord, selon moi, de se reposer sur l'acquis sans avoir su capitaliser sur nos géants énergétiques (Suez GDF, Véolia, et EDF) pour sauter dans le bon wagon. Mais n'en tenons pas rigueur à un Etat trop lourd et déjà trop occupé à gérer les conséquences des changements économiques du début du siècle. Comme souvent, ces questions se poseront à posteriori, l'Etat n'ayant pour rôle que de suivre le rythme imposé par le système économique (et les entreprises). L'Etat est une composante du système. Si les politiques avaient quelques pouvoirs sur ce dernier cela se saurait...
Le libéralisme et le libre échange ne sont sûrement pas des systèmes parfaits et n'ont pas pour vocation quelconque politique de civilisation. Ce sont des systèmes économiques. Les théories libérales ne restent que des théories parfois en partie confirmées, parfois totalement défaites. Mais il n'en reste pas moins que depuis des siècles ce système tire vers le haut chacun d'entre nous, pays par pays, pour autant que ces derniers se donnent la possibilité de jouer un rôle dans un domaine en particulier. Aujourd'hui, c'est bien le problème de l'Afrique qui, compressée sous un plafond de verre par les États occidentaux (directives OMC) et contenue sous assistance respiratoire demeure hors du champ d'action du marché.
Bizarrement c'est lorsqu'il y a intervention politique qu'il y a dysfonctionnement.
(1) Je précise aux lecteurs de passages et peu enclins aux théories économiques que ce terme n'a rien de sexuel.

(2) J'imagine que cette phrase soulévera la question du "bénéfique pour qui ?"

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Careagit 102 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog