Scène 8
Les mêmes, la servante
LA SERVANTE (hors d’haleine)
Majesté, majesté ! Arrêtez, Majesté !
LA GRANDE OURSE
Qu’y a-t-il ? Que veut-on ? Pourquoi m’importuner ?
LA SERVANTE
Cunégonde arrive.
LE CONSEILLER
Dieu soit remercié.
LA SERVANTE
Elle a franchi la porte et vient de ce côté.
( La Grande Ourse rebouche le flacon et le range dans le coffret.)
LA GRANDE OURSE (avec un étrange sourire)
Ce n’est pas aujourd’hui que tu me sauveras.
Rejoins donc ton coffret, ton heure reviendra.
(Elle tend le coffret au conseiller qui le range prestement dans un coin.)
LA SERVANTE
Elle est accompagnée d’un tas de gens bizarres
Qui sans doute se croient dans un grand hall de gare.
Ils gesticulent, crient.
LA GRANDE OURSE
C’est tout à fait normal.
Le contraire eût été affreusement banal.
LA SERVANTE
J’ai saisi quelques mots : ils parlaient de madone.
LA GRANDE OURSE (fronçant les sourcils)
La vieille au tailleur blanc ? Alors là, tu m’étonnes.
Elle est le cauchemar de notre Cunégonde
Qui devient à sa vue chaque fois furibonde.
LA SERVANTE
Elle semblait vraiment avoir de gros ennuis.
LA GRANDE OURSE
La Madone , dis-tu ? Ce n’est pas étonnant.
Chaque fois qu’elle agit, on lui rentre dedans.
Elle aura, je le crains, encor fait des sottises.
LE CONSEILLER
Attendons de les voir.
(A la servante)
Je crois, tu dramatises.
LA SERVANTE (Allant à la porte)
Ils sont dans le couloir.
(Un affreux mélange de voix graves et aiguës s’élève.)
LA GRANDE OURSE
Oui, j’entends le boucan
Que toujours font ces gens. Ca se croit convaincant.
Ignorants des bienfaits de notre beau silence,
Ils parlent sans arrêt, c’est une pestilence.
(Entrée de ceux qu’on attend.)
Scène 9
Les mêmes, Cunégonde, Daktari, Fifi, Rosie, Lanlan
( La Grande Ourse se lève. Tout le monde se réunit devant le trône. On s’incline, on fait la révérence. Rosie s’étale et Fifi l’aide à se relever.)
LA GRANDE OURSE (tendant les pattes vers Cunégonde)
Soyez la bienvenue, ô Cunégonde aimée.
Vous êtes arrivée, vous allez nous sauver.
Le royaume sans vous partait à la dérive,
Le royaume avec vous du désespoir se prive.
Voyez dans quel état se trouve ce palais,
Aidez-nous, je vous prie, à retrouver la paix.
CUNEGONDE
Cet honneur, Majesté, remplit de confusion
Celle qui vous promet toute son attention.
Mais je crains malgré tout qu’il faille revenir
Sur mes capacités à vos ennuis bannir.
ROSIE (entre ses dents)
Toi, confuse ? Mon œil !
LANLAN (idem)
La fausse modestie !
Sans mentir, un curé lui donnerait l’hostie.
LA GRANDE OURSE
Que murmure le rang ? Veut-il donc s’exprimer ?
LANLAN (au garde à vous)
Nous sommes tous aux ordres de Sa Majesté.
(A suivre)