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Critique Ciné : Les Chambres Rouges (2024)

Publié le 30 juillet 2024 par Delromainzika @cabreakingnews
Critique Ciné Chambres Rouges (2024)

Les Chambres Rouges // De Pascal Plante. Avec Juliette Gariepy, Laurie Fortin-Babin et Elisabeth Locas.

Les Chambres Rouges est un film qui se hisse sans difficulté au rang des œuvres cultes du cinéma contemporain. Cette réalisation captivante et troublante offre une exploration profonde de la noirceur humaine, se concentrant moins sur le procès en lui-même que sur les thèmes universels du voyeurisme et de l'obsession. Au cœur de l'intrigue, nous retrouvons Ludovic Chevalier, accusé d'avoir brutalement assassiné trois jeunes filles et d'avoir diffusé ses crimes sur le Dark Web. Cependant, le film ne se contente pas de raconter les faits macabres ; il nous plonge dans une réflexion sur le voyeurisme. À travers le personnage de Kelly-Anne, une jeune mannequin obsédée par Chevalier, le film nous entraîne dans une descente aux enfers où les frontières entre spectateur et complice se brouillent.

Deux jeunes femmes se réveillent chaque matin aux portes du palais de justice de Montréal pour pouvoir assister au procès hypermédiatisé d'un tueur en série qui les obsède, et qui a filmé la mise à mort de ses victimes. Cette obsession maladive les conduira à tenter par tous les moyens de mettre la main sur l'ultime pièce du puzzle, qui pourrait permettre de définitivement confondre celui que l'on surnomme le Démon de Rosemont : la vidéo manquante de l'un de ses meurtres.

Kelly-Anne représente l'obsession malsaine que certains peuvent développer pour les figures monstrueuses. Sa fascination pour Chevalier nous pousse, nous spectateurs, à examiner notre propre curiosité morbide. Ce miroir tendu vers nous-mêmes est l'une des forces majeures du film, nous incitant à nous interroger sur notre propre voyeurisme. La mise en scène de Les Chambres Rouges est tout simplement impeccable. Le réalisateur réussit à créer une atmosphère oppressante et glaçante sans avoir recours à des scènes de violence graphique. Tout est suggéré avec une maîtrise rare, ce qui rend l'expérience encore plus perturbante. Le malaise s'installe dès les premières minutes et ne fait que croître à mesure que le film progresse. L'utilisation du son dans le film est également remarquable. La bande originale composée par Dominique Plante accompagne parfaitement les scènes, accentuant le sentiment de malaise.

Les sons angoissants et les compositions musicales intenses nous immergent dans l'horreur vécue par les personnages, nous rappelant que le mal est omniprésent. Les performances des actrices principales, Juliette Gariépy et Laurie Babin, sont d'une intensité rare. Juliette Gariépy incarne Kelly-Anne avec une dualité fascinante, passant de l'angélisme à une froideur dérangeante. Sa performance est si convaincante qu'elle en devient presque hypnotique. Laurie Babin, dans le rôle de Clémentine, une jeune groupie de l'accusé, apporte une touche d'innocence et d'espoir dans cet univers sombre. Son jeu naturel et authentique contraste avec la noirceur du film, créant un équilibre délicat mais essentiel. Ce qui distingue vraiment Les Chambres Rouges des autres thrillers, c'est la profondeur de sa réflexion sur notre société contemporaine. Le film explore pourquoi tant de gens sont fascinés par les tueurs en série et par tout ce qui est sombre et morbide dans l'âme humaine.

Cette fascination, qui peut sembler inavouable, est néanmoins omniprésente dans notre culture, comme en témoignent les nombreux documentaires et séries sur le sujet. Le réalisateur évite les explications psychologiques simplistes et laisse au spectateur la liberté de se faire sa propre opinion. Cette approche subtile et nuancée rend le film d'autant plus puissant et perturbant. Le réalisateur de Les Chambres Rouges démontre une maîtrise impressionnante de la narration et de la mise en scène. Sa capacité à filmer des scènes abstraites et à les rendre cinématique est digne des plus grands formalistes contemporains. Que ce soit dans les rues froides de Montréal ou dans l'appartement de Kelly-Anne, chaque plan est soigneusement pensé pour capturer l'essence de la désespérance urbaine. L'usage habile de la technologie, notamment les séquences montrant le flux de données sur Internet, renforce l'actualité du film et le place en tête des thrillers modernes.

La comparaison avec les œuvres de Michael Mann, notamment Hacker, est pertinente tant le réalisateur parvient à donner une dimension visuelle et émotionnelle à des sujets complexes et souvent abstraits. Les Chambres Rouges est bien plus qu'un simple thriller. C'est une exploration profonde et dérangeante de la nature humaine, un film qui nous confronte à nos propres démons et nous laisse ébranlés bien après le générique de fin. Avec une mise en scène magistrale, des performances d'acteurs exceptionnelles et une réflexion pertinente sur notre société, ce film s'impose comme un chef-d'œuvre incontournable du cinéma contemporain. Si vous n'avez pas encore vu Les Chambres Rouges, préparez-vous à une expérience intense et inoubliable. Ce film ne se contente pas de raconter une histoire ; il vous invite à plonger dans les recoins les plus sombres de l'âme humaine et à affronter vos propres peurs et obsessions.

Note : 10/10. En bref, un grand moment de cinéma à ne pas manquer.

Sorti le 17 janvier 2024 au cinéma - Disponible en VOD


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