La certitude poétique

Il y a 3 moments dans une journée que j’apprécie véritablement, et ce d’autant plus en été, lorsqu’en principe, culturellement, on a un peu plus de temps pour profiter du temps… justement.

Le matin tôt, très tôt. A l’heure où les rues silencieuses laissent assez de place aux ombres pour qu’elles disparaissent furtivement derrière un rayon de soleil, lorsque tout semble endormi encore et où l’on est surpris de croiser quelques regards, tout de même… Hors des villes, la nature encore fraîche appelle à la contemplation… Rosée et attendrie, on n’ose la déranger. Je l’appelerai l’heure juste, celle où les idées se mettent en place, où la douceur du réveil est si savoureuse que partir en profiter pour observer le monde encore absent et tranquille est tel que l’instantané en devient presque excitant… Vers la fin, on se presse pour en profiter encore… On sait qu’après, rien de ne sera pareil…

Vient ensuite la sixième heure. Celle du repos, la mi-temps pendant laquelle on s’absente quelques instants… 5, 10… 20 minutes… Parfois 2 heures, l’hiver, souvent. Passionnante, elle laisse toujours en suspend un certain goût d’indécent… Braver la journée pour quelques minutes de bonheur abandonné, sinon…

Enfin, l’heure du sombre enthousiasme, vers 19/20 heures l’été… La lumière y est différente du matin… mais tout aussi belle, moirée, orangée, moins franche, presque plus trompeuse… Je pense aux arabesques, à un patio en Andalousie, je vois des terrasses, des femmes poudrées et des hommes musqués… La nuit arrive, on s’attarde pour l’accompagner, pour entrer ensemble dans une pénombre folle et mystique…

Rentrée donc… Ravigorée, de quoi réfléchir et repartir de plus belle, en ayant fait le plein de temps, de mots, d’instants, la tête remplie d’envies pour repartir de plus belle…

Sur le chemin ces mots de Richard Bohringer m’ont accompagnée avec cette agréable émission de Laurent Segui…

“Je voulais les débuts de la vie avec les mots le début des mots dans ma vie j’avais vingt ans je voulais écrire le plus beau des poèmes. Rimbaud avait déjà fait le boulot. Alors j’ai fracassé la vie. Je voulais le jus. Le jus divin. Celui qui donne des ailes aux mots. Jamais découragé. C’est trop beau les mots. C’est trop fou. Les années ont passé. J’ai vécu l’attente du génie. Jamais venu. Juste une fleur a poussé en moi. J’ai pris la fleur et voilà tout. Il y avait tellement de monde en moi, d’humain croisé, raté parce que c’était pas le jour et tu te rajoutes une gamelle en te disant que tu t’étais levé con et qu’il y avait de fortes chances que tu te recouches aussi con” - RB

Cela me rappelle ces armes bleues comme la Terre… qui mettent de la poésie dans les discours… brillant comme une larme… qu’on garde au fond de soi comme on garde un mystère…