Ce Que sais-je ?, paru1 bien avant le 7 octobre 2023, est précieux. C'est une excellente piqûre de rappel pour ceux qui ont lu La longue marche d'Israël de Jacques Soustelle, dont la première édition, celle que j'ai, remonte à 1968...
Les origines de ce conflit, qui est loin d'être terminé, sont complexes. Et le mérite de l'auteur, Georges Bensoussan, est de ne pas occulter les torts et les raisons de toutes les parties à ce conflit, faisant là véritable oeuvre d'historien.
Le livre couvre la période 1870-1950. Jusqu'en 1914 la Palestine, i.e. la Syrie du Sud, est pauvre et ne compte qu'une forte minorité de Juifs, qui sont majoritairement citadins. Ils représentent 80'000 habitants sur un total de 720'000:
Près de 70 000 immigrants juifs arrivent en Palestine entre 1881 et 1914 et y créent 53 implantations agricoles.
Venus surtout de l'empire russe, ils les acquièrent auprès d'hommes d'affaires, puis de paysans et de grands propriétaires résidents. Les derniers arrivants, au contraire des pionniers, vite repartis, les mettent en valeur eux-mêmes.
Pendant la Grande Guerre, l'Empire ottoman, du côté des puissances centrales, craint une sécession de la Palestine: Répression, épidémies, famine la dépeuplent si bien que la population n'est plus que de 600'000 habitants en 1918.
Dans l'après-Grande Guerre l'immigration juive en Palestine va s'intensifier, après la fameuse Déclaration Balfour, rendue publique en 1920, qui est une lettre de ce lord à lord Lionel Walter Rotschild, où il est dit notamment:
Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un foyer national pour le peuple juif...
Sont criantes les divisions au sein même des parties, dont les différences ne favorisent guère une entente entre elles, à tous les points de vue, que ce soit en matière de démographie, de niveau d'instruction, de culture ou de religion.
Les Juifs reviennent sur les terres de leurs ancêtres, ce que les Arabes ne leur contestent pas, mais ils ont peur les uns comme les autres de se retrouver assujettis à ceux qui leur sont dissemblables et se comportent différemment.
Il y a des extrémistes partout, mais il faut remarquer qu'il y a des degrés dans le rejet de l'autre. Ainsi, plus tard, des Arabes, sous influence nazie, seront-ils enclins à exterminer, tandis que des Juifs ne s'attristeront pas des exodes arabes.
À plusieurs reprises une solution à deux États sera proposée mais il se trouvera toujours des opposants dans l'un ou l'autre camp pour l'empêcher d'aboutir, des Arabes refusant, par exemple, l'existence d'un État israélien, quel qu'il soit.
Les armes parleront surtout à la fin de la période étudiée, mais elles ne se tairont jamais. Ce livre, qui introduit de la nuance alors que les positions sont tranchées, explique très bien pourquoi la guerre de 1948 n'est de loin pas terminée:
Si ce conflit met en scène deux nationalismes qui se disputent une même terre, il oppose deux sociétés séparées par des blocages d'ordre culturel, essentiels mais le plus souvent sous-estimés. De là deux discours qui cheminent parallèlement, animés par des logiques également légitimes, mais qui demeurent encore généralement ignorants l'un de l'autre.
Francis Richard
1 - Le 18 janvier 2023.
Les origines du conflit israélo-arabe, Georges Bensoussan (1870-1950) 128 pages, Georges Bensoussan, Que sais-je ? (réédition en 2024)