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Edda Bel Abysse et Fanny Marcon au Chaland qui Passe, Binic, le 21 juin 2024

Publié le 23 juin 2024 par Concerts-Review
Edda Abysse Fanny Marcon Chaland Passe, Binic, juin 2024

Edda Bel Abysse et Fanny Marcon au Chaland qui Passe, Binic, le 21 juin 2024

michel

Pas de Fête de la Musique à Binic, c'était compté sans Arnaud du Chaland qui Passe qui invite Edda Bel Abysse et Fanny Marcon et propose une jam en after, dans le café-concert le plus rock et le plus lilliputien des Côtes-d'Armor.

Tu dis.... non personne n'a embrassé Fanny, il ne s'agit pas d'un jeu de boules, ma poule!

Fanny M. est auteure-compositrice autodidacte qui sévit dans l'univers musical depuis l'âge de 15 ans, la fille est du genre itinérant, on l'a vue ( non pas dans le Vercors, Alain) en Savoie, dans le Lot et ailleurs, elle semble avoir désormais déposé ses bagages en région toulousaine.

Elle a fait partie du duo Mee and Mee, catalogué comme folk , ce qui est légèrement réducteur, sauf si tu ajoutes quelques qualificatifs, tels que hanté, gothique, noisy, ou si tu considères que David Eugene Edwards fait du folk pour boy scouts boutonneux.

Depuis un petit temps, Fanny joue à la louve solitaire et se produit en s'accompagnant à la guitare électrique , en maniant un set de pédales à effets, archaïque , en tabassant des boîtes de thé Lipton ou d'Arabica, dénichées dans une brocante à Saint-Girons, avec des baguettes piquées chez un Chinois, servant du riz cantonnais made in Bangladesh, de temps en temps, elle se transforme en Hamelin et joue d'une flûte, piquée à un Schtroumpf, pour chasser toute la vermine tapie dans les coins inaccessibles à l'aspirateur. C'est déjà un sacré boulot et de plus, elle psalmodie des litanies de sibylle hallucinée dans un ou deux micros, eux aussi logés sur le sol .

Détail pas anodin, avant son entrée en piste le public avait remarqué que plusieurs nattes/ coussins étaient jonchés sur le plancher, why?

C'est simple, elle donne son concert à genoux, c'est plus pratique pour manipuler l'overdrive, la distorsion, la reverb , la machinerie à loops et tout ce qui traîne un peu partout.

Il est 20 25, there she is, elle sourit, met en boucles ses percussions artisanales, plaque quelques accords de guitare, eux aussi mis dans la machine. Le fond sonore répétitif et lancinant, déjà, t'emmène dans des contrées fort éloignées du rationnel, et, quand elle s'avise d'entamer un psaume sibyllin, t'es comme envoûté , tu ne parviens même plus à retrouver le verre de bière que t'avais déposé derrière toi.

Des effets de voix tantôt dramatiques, tantôt liturgiques, commuent le lament en partition pour messe noire, ton esprit vogue et se laisse porter par un chant auquel tu ne comprends rien mais qui parle à ton inconscient.

Pas de titres, elle improvise et envoûte.

Impossible de faire plus DIY que les délires produits par cette pythie.

Donc, pendant une dizaine de minutes elle a communiqué avec notre psychisme secret avant d'entamer un second exercice tout aussi spirituel, un sentiment de douleur profonde se dégage de son chant qu'elle accompagne d'une gestuelle dramatique.

Ton cerveau tient à citer des noms, aucun n'est assez proche de l'univers dans lequel évolue Fanny, mais on avance Patti Smith dans ses moments les plus expérimentaux, le minimalisme de Scout Niblett, la creaky music, que certains nomment Southern gothic de 16 Horsepower ou Wovenhand, ou le folk doom de Chelsea Wolfe.

Dix minutes plus tard, une troisième mélopée allumée est ébauchée par une amorce nerveuse, les riffs répétitifs et le chant frénétique, où on perçoit les lyrics.. rock'n'roll fever... nous renvoient des images d'Alan Vega, un autre artiste inclassable, adepte de l'auto-flagellation.

Ici encore, à la manière d'un medium, elle communique pendant douze minutes avec des esprits dont ta conception cartésienne de l'univers t'empêche de reconnaître l'existence.

Ah, bon, je peux encore vous en ficeler une, elle sort sa petite flûte destinée à charmer les crotales bretons , pousse quelques borborygmes inquiétants, se mue en femme reptile avant de mettre un terme à sa performance déconcertante et intense.

Avec Edda Bel Abysse on revient à une idée plus conventionnelle du concert.

Tu fais la connaissance de Lila Gion en 2015, elle se produisait avec le groupe Blemzia à Louvain-La - Neuve, Colline Hill complétait l'affiche.

Henrik Ibsen et est devenue Edda Bel Abysse, on lui connait quelques singles et deux EP's , un album est en gestation.

Sur scène: un piano électrique, un synthé, des bandes.

Beaucoup de delay sur la voix lorsqu'elle entame ' La vie sans voix' ( cf setlist) , une plage synth pop qui dépeint les désarrois que peuvent connaître la femme, celle qui parfois, dans sa cuisine, pleure.

Un déballage, oui, mais chargé de pudeur.

'Pardon' présente les mêmes caractéristiques: beats réguliers et voix en méandres, texte féministe. Elle se balade nonchalamment sur le peu d'espace réservé à l'artiste, se dandine, se tortille, adopte une gestuelle séductrice pour emballer un voisin intimidé.

'Les trains', un extrait de l'EP 'Mâlesainte', chemine dans nos cerveaux à la manière d'un tortillard de banlieue, une fois arrêté en gare, on plonge, après un faux départ, dans l'oeil du 'Cyclope' , heureusement Ulysse était dans le coin pour venir à notre secours.

Elle finit en halètements, le titre se fond dans la suivante ' Garder l'enfant' aux sonorités élastiques.

Imposante gymnastique vocale sur le morceau qui succède, il est empreint de sensualité. Comme la setlist plaquée sur le synthé n'est pas respectée, on n'ose avancer un intitulé, mais il est question d'une odeur de peau laissée sur un oreiller encore chaud.

Un brin de voyeurisme avec 'Les couples' , où la voix se fait broderie fine sur fond dream pop vaporeux et le bruit des vagues en arrière-plan.

Effectivement, on peut se sentir seul(e) face à la mer.

'Le saut dans le grand bain' traite avec sensibilité de l'après -deuil, le mix électro et tonalités orientales frise le génie, un des grands moments du set.

Elle te fixe droit dans les yeux et entame ' Nostalgie avant la fin'.

Notre histoire n'avait pas vraiment commencé, déjà elle se détourne .

My God, , que les femmes sont imprévisibles et frivoles.

Elle termine le set, après un message électoral peu favorable à ceux qui ont ramassé le plus de suffrages lors des élections européennes, par une dernière tirade pleine de sous-entendus coquins.

Les clients réclament leur bis.

Ce sera le langoureux 'Tout est bien' avec un clin d'oeil au tramway d' Elia Kazan .

Edda sera le 27 juin à Laval ( Guinguette de La Halte)

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