Critique de Ma famille en or, de Joseph Gallet et Elodie Wallace, vue le 3 juillet 2024 au Théâtre du Roi René
Avec Jean Fornerod, Joseph Gallet, Marie-Hélène Lentini, Elodie Wallace, mis en scène par Anne Bouvier
Vous savez moi je suis faible et j’aime bien ce genre d’affiche. Je sais pas, j’ai tout de suite envie de monter dans cette voiture, moi aussi. En plus, je n’avais rien de programmé au Roi René cette année, et c’est quand même la tradition.
Avec un titre pareil, on se doute bien que la famille qui va nous être proposée sera plus ou moins dysfonctionnelle. Celle-là a tiré le gros lot. Entre l’aînée rebelle en quête de liberté qui s’est simplement barrée pour un tour du monde sans donner de nouvelles, le père hypocondriaque et légèrement parano (oui, c’est vrai, ça va souvent ensemble), la mère acheteuse compulsive (de biens évidemment complètement inutiles) et le cadet un peu trop sûr de lui (et avec un cordon ombilical qui semble encore bien accroché), on est bien. On est bien bien bien bien bien.
Le problème, quand on fait ce choix sur un coup de tête, juste avec l’affiche (et un théâtre qu’on fréquente de temps en temps, hein, quand même), c’est qu’une fois qu’on est assis dans la salle, on se demande un peu ce qu’on fait là. Et quand le spectacle commence sur des vannes un peu lourdes et un rythme un peu bancal, on se demande encore plus ce qu’on fait là. Et quand tout d’un coup, alors que vous pensiez que c’était mort pour vous, que vous étiez prêt à lâcher l’affaire et à bouder tranquillement en attendant la fin, ils vous décrochent un rire, que vos yeux s’agrandissent, et que vous vous mettez à écouter de plus en plus attentivement ce qui se passe sur scène, là, vous savez vraiment pourquoi vous êtes là. Exactement pour cette sensation-là. La surprise, au théâtre, je ne sais pas s’il y a quelque chose de mieux.
Vraiment, ils avaient mal commencé. A leur décharge, c’était la première, et le rythme se cherchait encore un peu au début. Et puis ne me demandez pas exactement ce qu’il s’est passé. C’est la magie du théâtre. Marie-Hélène Lentini qui semblait jusqu’ici porter le spectacle à elle toute seule – on salue d’ailleurs cette énergie folle et ce quasi stand up qu’elle a mené au début du spectacle – retrouve des partenaires. Le rythme bancal se trouve soudainement et permet au texte de monter en puissance, de donner ce qu’il a dans le ventre, jusqu’à éclater vraiment. Et de s’éclater, aussi, sur scène. Les comédiens trouvent leurs marques et se mettent à jouer complètement ensemble. Et nous embarquent avec eux. Et tout s’emballe. Et ça part même un peu en vrille parfois. Et même si les fils sont un peu gros, on se surprend à juste avoir envie de partager ce voyage, juste avoir envie de la prochaine vanne, juste avoir envie de la prochaine destination, juste être avec eux sans se poser d’autre question. Mince, c’est bon !
Une surprise en or.