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Le réveil des sorcières

Publié le 05 juillet 2024 par Adtraviata
réveil sorcières

Quatrième de couverture :

Et si, en commençant son nouveau roman sur la magie noire par un accident de voiture fatal, la narratrice avait provoqué la mort de son amie Diane, guérisseuse et médium ? Dans la forêt de Brocéliande, où elles se retrouvaient l’été, le doute grandit autour de cette tragique disparition : la pratique de la sorcellerie y est toujours prégnante, et Soann, qui semble avoir hérité des pouvoirs exceptionnels de sa mère, est hantée par la certitude qu’elle a été assassinée. Habité par les mystères de la terre bretonne, Le Réveil des sorcières est l’un des romans les plus personnels et envoûtants de l’autrice, qui y interroge la frontière entre la vie et la mort, et les liens obscurs de la transmission.

Un avant-goût de vacances en Bretagne avec ce roman qui évoque de nombreux personnages et légendes bretons, notamment de la forêt de Brocéliande toute proche et pas seulement touristique. En fait de vacances, nous sommes plutôt en hiver et cela commence par un brutal accident de voiture, mortel pour Diane Le Goff, réputée pour son don de guérisseuse et de médium. La narratrice est l’amie parisienne de Diane, appelée à l’aide par les deux filles de la morte, Viviane, 19 ans, réaliste, presque fiancée à Sylvain, et Soann, 13 ans, qui semble avoir hérité du don de sa mère. Soann est persuadée que sa mère a été assassinée dans cet accident de voiture. S’ensuit donc une sorte d’enquête, prétexte à évoquer l’histoire de Diane, d’abord fiancée à Pierrick Le Goff et finalement mariée au frère de celui-ci, Yannick. L’histoire familiale est émaillée de drames, de malédictions, diront certains, marquée par les dons surnaturels plus ou moins sains de plusieurs de ses membres.

Que l’on croie ou non aux légendes, à la magie, que l’on se laisse ou non imprégner par l’ambiance de la lande bretonne, cette histoire est surtout celle de femmes fortes, des femmes qui ont su (ou sauront) composer avec leur destin : Diane qui a vécu son don avec naturel et altruisme, Soann qui se cherche et trouvera sa voie, Viviane qui a les pieds bien enracinés dans sa terre, la narratrice elle-même, une femme libre. C’est sans doute le sens moderne du mot « sorcières » qui court au long du roman, des femmes originales, dominées, matées par les hommes au long de l’Histoire mais qui ont résisté à leur manière.

Si l’on résiste aux liens avec le surnaturel, on peut apprécier cette histoire qui parle aussi de famille et finit par faire émerger la vérité sur l’accident qui a coûté la vie à Diane. Je ne serais jamais allée de moi-même vers ce roman, j’ai eu un peu de mal à y « entrer » et il ne m’a pas marquée comme d’autres livres de la sélection 2024 mais au final, ce n’était pas une lecture désagréable. Ne me remerciez pas 😉

« Avant de m’intéresser de près au monde de la sorcellerie, je connaissais, comme tout un chacun, les chapitres noirs de l’Inquisition. Ces milliers de femmes noyées, brûlées, torturées parce qu’on leur prêtait des accointances avec le malin alors que, pour l’immense majorité d’entre elles, elles se contentaient de soulager les maux des paysans, mettre au monde leurs enfants et accompagner les femmes à travers les métamorphoses de l’âge. J’ai longtemps cru qu’elles avaient été victimes de la crédulité et de la bêtise des religieux. Que la chasse aux sorcières les avait prises dans ses filets alors qu’elles n’étaient pas directement des proies. C’est moi qui étais crédule. Au contraire, ces femmes étaient personnellement visées. Car elles mettaient en danger la puissance de Dieu qui a seul pouvoir de vie, de mort, de châtiment ou de guérison. La compétence de ces femmes défiait Dieu. Cela a été pour moi une surprise. Il m’a fallu creuser le sujet pour me convaincre que l’écrasement des femmes par la religion (quelle qu’elle soit) n’était pas fortuite, elle ne relevait pas d’une simple division des tâches qui aurait mal tourné. Il s’agissait d’une volonté délibérée des hommes de confisquer le pouvoir. »

« L’écriture n’est pas autre chose que la recherche de la pierre philosophale, la raison d’être du monde, la raison d’être au monde. par un travail laborieux, long, précis, minuscule, dérisoire, on parvient, parfois, à dévoiler une infime partie du mystère. »

« Être mère, c’est l’art de l’attente. Épouser le rythme d’un enfant au détriment du sien propre. Égrener les minutes et les heures, il est invité à un anniversaire, il a cours de solfège, il rentre dans deux jours de colonie de vacances.
Et nous attendons avec bonheur, anxiété, ennui ou impatience. Attendre quelque chose de lui… aussi.
C’est la contrepartie inconsciente. Et proportionnelle. »

« Au fond, je devais admettre que je ne croyais pas vraiment à la survie de l’âme, et par voie de conséquence à tout ce qui en serait la manifestation ; cependant une part très enfouie en moi avait envie d’y croire. Cet instinct que nous avons de ne jamais lâcher. Ne pas lâcher nos morts. Ne pas lâcher la vie. Pour lutter contre l’évidence du vide, nous n’avons que la foi. »

Stéphanie JANICOT, Le réveil des sorcières, Le Livre de poche, 2024 (Albin Michel, 2020)

Prix des lecteurs du Livre de poche – sélection Juillet 2024


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