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Pénélope Zang Mba : Mon Indifférence en place du vote

Par Gangoueus @lareus
Pénélope Zang Indifférence place vote

Ce que je partage ici n'est pas vraiment une idée pérenne. Je crois qu'il faut voter. Toutefois, je n'y crois plus vraiment. Dans l'absolu. Je crois aussi que le racisme ambiant est à regarder en face. Il y a des racistes, des antisémites en France. Acceptons-le et arrêtons de pleurer là-dessus. Chacun, en tant que citoyen Français doit faire son introspection face à ces heures cruciales. On doit changer cette haine en acceptation de l'autre ou du moins réagir farouchement et immédiatement face à une décomplexion du racisme ordinaire. En attendant, je n'irai pas voter. Pénélope Zang Mba

Je vais sur mes 37 ans. D'ici deux mois je vais célébrer ce bel âge, bien que ma silhouette n'en paraisse que 25. Je vois les regards de gourmandise que probablement nos chers électeurs érenistes ont sur moi. On ne sait jamais, tout le monde peut voter RN autour de nous. Cela fait un moment, depuis le racisme décomplexé de ces dernières semaines (disent-ils), que je me décomplexe aussi de ne pas regarder autour de moi, de tracer mon chemin comme ma compatriote Creol. 

Il faut dire que je suis Gabonaise ET Française. Cela a son importance, même si on a l'impression que la nationalité française nous est niée en raison de notre peau. J'aimerais pouvoir dire que la bêtise n'est liée qu'aux non Noirs ; mais non. Des noirs au Gabon sont aussi puants de tribalisme, d'ethnocentrisme, de régionalisme. Les ismes sont légion dans ce petit pays situé sur l'équateur. Donc, pauvre de moi, je n'ai pas trop de chance. Mes deux pays sont absolument invivables. Et qu'on ne me demande pas d'aller aux États-Unis… Dieu du Ciel bleu, faut-il vraiment en parler?... 

Le propriétaire du airbnb où je passe mon séjour est venu me tenir compagnie. Il me propose, en réponse à ma discrétion et savoir-vivre, deux nuits gratuites… ils n'ont personne de prévu derrière… "prenez votre temps… reposez-vous", me dit-il gentiment, tandis que sa chatte tourne autour de moi, dragueuse. Aussi aimable que ses propriétaires. Face à cette gentillesse désintéressée, je suis rassurée de constater que la race humaine est encore un peu sauve. 

Il y a quelques jours, remontant de Nice, j'ai fait connaissance avec une Manager d'une banque internationale, une Roumaine résidant à Montréal. Un voyage exquis. Fidèle à ma joie de vivre et à ma sociabilité j'ai presque forcé (j'étais trop sociable, j'avoue) la pauvre dame à me parler. J'avais honnêtement tout le temps quelque chose à dire, un truc pour rire ; et j'ai vu comment petit à petit elle s'est détendue, j'ai vu un shift sur elle. J'ai su à ce moment-là que les Noirs avaient obtenu gain de cause par ma voix. Car enfin c'est cela, on déteste ce qu'on ignore, par préjugé, par jalousie, par revanche. On a besoin parfois de rire à autrui. 

Sauf que voilà, de plus en plus, trop de gens (une bonne partie de la population) me crispent. Je les ignore, change de trottoir, presque, pour ne pas être contaminée. C'est violent à dire mais j'ai l'impression que toute cette haine est comme une maladie incurable et qu'on peut la choper juste en regardant ou en croisant un raciste. On peut sentir la haine de quelqu'un. Nous avons nos instincts de survie, nous sommes un peu connectés à l'invisible et aux non-dits. 

Bravo, vous avez réussi à me faire presque douter de mon envie de bienveillance à votre égard. Mais je veux toutefois me rappeler de mon hôte de airbnb, bon blanc bien marié, avec sa merveilleuse famille qui papote gentiment devant un apéro à 20h. Je veux me rappeler de la dame dans le train et de ses confidences sur son monde. Je veux me rappeler que la haine majoritaire n'aura JAMAIS raison ; que la vérité ne peut être falsifiée et qu'elle restera inaliénable face au mensonge brut, cru. 

Du coup avec tout ça faut faire concrètement un lien avec le titre. Je n'irai pas voter. Bah… je ne peux plus. Le 9 juin je dormais. Je ne me sens plus concernée par cette politique. On dit que le RN va venir "nous faire ça dur", à nous les immigrés, les étrangers. Mais au fond, quel parti nous a respectés? Entre des gouvernements qui nous ont invisibilisés en nous maintenant bien en dessous du fichu plafond de verre et un autre qui va tout orienter autour de nous en nous méprisant ouvertement, qu'est-ce que ça change ? C'est une hypocrisie barbare. Tous n'en ont rien à cirer de nous. They are not like us comme l'a chanté K.Dot (même si dans le beef je suis plutôt team Drake). 

Au final, après les résultats des dernières européennes, ils ont commencé à nous faire peur, à nous transmettre, infuser, cette inquiétude qui fait vendre. Tout d'un coup. Pour qu'on lise, regarde, consente ou pas. J'ai donc eu envie de voter. C'est ballot parce que c'est trop tard… au final je reviens à mon idée initiale : voter pour quoi, et pour qui ? Toute cette politique joue avec nos nerfs, et jamais les problèmes de fond ne sont résolus. Les problèmes qui se résolvent en ajoutant de l'argent sur notre salaire, en réduisant l'écart salarial, en arrêtant les discriminations à l'embauche et au logement. Traiter le problème à la base, et concrètement. Au lieu de ça on nous martèle qu'il faut aller voter pour que les choses restent intactes.

 Plutôt que du moindre mal, allons droit vers le chaos. Arrêtons de craindre ce racisme purulent qui s'arme de la désaffection des autres partis à chaque élection, allons vers ce qui nous fait peur. Assumons : ce pays est tel qu'il nous montre qu'il est. 

Je souhaite que le 30 et 7 nous nous montrions grande comme Nation. Mais si ce sont ceux-qui-nous-appellent-tous-Moustapha qui l'emportent, eh bien soyons fairplay et restons cools. Pas d'émeutes, pas de cris. Assumons ce pays ensemble. 

Pénélope Zang Indifférence place vote

Bienvenue en France.

Pénélope Zang Mba


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