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Désir et compassion

Publié le 28 juin 2024 par Paulo Lobo
Désir compassion
Dehors, l'orage faisait rage. Il était navré de toute cette déconfiture. Demain sera un autre jour, demain au petit déjeuner.

Je pourrai savourer les minutes, je me ferai une tartine au beurre et j'y mettrai quelques secondes de plus. Il y aura, en face de moi, mes amis, ma famille, mes ennemis aussi, car je n'ai peur de rien. Et puis je me dirai, tiens, et si aujourd'hui je prenais mon envol ! 

Et si aujourd'hui, c'était enfin l'occasion rêvée de fermer les yeux et d’échapper à mon cauchemar ? C'est une histoire à dormir debout, ce que tu nous racontes là, va te recoucher.  Mais c’est le matin, il fait jour, la nuit n'est pas encore là. Pourquoi devrais-je me recoucher ? Je veux vivre, je veux courir, je veux partir. Tu vois le grand bâtiment là haut ? Juste de l'autre côté de la rue, celui avec ses 50 étages. Tu vois tous les gens qui s'y engouffrent chaque matin, tu vois combien  ils ont l'air abattus. Et pourtant ils vont piocher le salaire qu'ils ont mérité. Ils vont courir pour gagner. Ils ne vont jamais penser à se jeter du haut de la tour. Ou plutôt si, ils vont y penser. Mais ils ne le feront pas. Car le sens de la vie pour eux, ce sont ces couloirs et ces bureaux aménagés avec soin par des architectes consciencieux. Chaque jour, ils se retrouvent dans leur environnement familier, habituel, ils obéissent à des consignes, à des procédures, ils savent ce qu'ils ont à faire et ça les rassure. Il y en a bien un ou l'autre qui étouffe là-dedans, qui à un moment le matin, à un moment dans l'après-midi, se réfugie dans la petite salle de bain et essaye d'ouvrir la fenêtre pour respirer l'oxygène extérieur. Mais c'est un phénomène assez rare, en tout cas, personne ne s'en rend compte. 

Tout en haut de la tour, au 50e étage, il y a une vaste salle de réunion. C'est là que sont prises les décisions les plus importantes concernant l'avenir de la planète. C'est là notamment que se réunissent les grands décideurs du club royal des amateurs d'autruche. C'est là qu'ils discutent et boivent et fument des cigares, et qu'en fin de compte, au final, ils se décident si oui ou non l'été sera chaud. Donc, tu vois ce bâtiment en face de toi, est-ce que tu n'es pas heureux de ne pas y être ? Est-ce que tu n'es pas heureux de vivre dans un petit taudis comme le nôtre ? Sache te satisfaire de tes conditions propres et oublie le jardin du voisin. Suis-je un être vivant ? Où sont passés mes rêves ? Où sont passés mes illusions, mes illusions qui formaient mon monde, mon livre-univers ?  Tu me donnais le souffle de vie, la raison d'espérer. Quand je jouais un rôle, je n'étais personne d'autre. J'étais celui que je rêvais d'être. La lumière a eu raison de moi et pourtant je l'aime la lumière.

Il y a 1000 lumières différentes autour de moi, chaque jour. Il y a 1000000 de personnes que j’ai vues dans ma vie. Les erreurs sont humaines, les horreurs aussi sont humaines.  Faut-il avoir l'esprit positif ou faut-il avoir l'esprit usé par le côté espiègle du jardin ? Je m'arrête ici parce que le temps m'est compté et que je ne pourrai pas toujours regarder de l'autre côté de la rue avec désir et compassion.


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