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« L’Adieu aux Armes » d’Ernest Hemingway

Par Etcetera
L’Adieu Armes d’Ernest Hemingway

Choisi par la majorité des participants de mon cercle de lecture, « L’Adieu aux armes » est le troisième roman d’Ernest Hemingway, publié en 1929, et il est en partie autobiographique. S’appuyant sur son expérience militaire durant la guerre 14-18, il en restitue les faits marquants et l’ambiance de camaraderie entre soldats. C’est également le cadre d’une grande histoire d’amour entre le héros blessé et une belle infirmière anglaise.

Une adaptation cinématographique a été réalisée en 1958 par Charles Vidor, avec Rock Hudson et Jennifer Jones mais je ne l’ai pas vue.

A l’issue de mon cercle de lecture, je peux dire que les avis ont été très partagés, la moitié d’entre nous a vraiment détesté ce roman, le jugeant ennuyeux et idiot. L’autre moitié a été beaucoup plus favorable. Un livre clivant, donc, à ce qu’il semble.

Note Pratique sur le livre

Editeur : Folio (initialement, Gallimard)
Année de publication : 1929
Traduit de l’anglais (américain) par Maurice-Edgar Coindreau
Nombre de Pages : 316

Quatrième de Couverture

Frédéric Henry, jeune Américain volontaire dans les ambulances sur le front d’Italie, pendant la Première Guerre Mondiale, est blessé et s’éprend de son infirmière, Catherine Barkley. Avec Catherine, enceinte, il tente de fuir la guerre et de passer en Suisse, où le destin les attend.
Un des meilleurs romans de guerre. Un des plus grands romans d’amour.

Mon Avis

J’ai mis un certain temps à rentrer dans ce roman. Au début le style me plaisait moyennement. C’est une écriture assez minimaliste : il n’y a pas de métaphores, peu d’images, les phrases sont au plus près de la réalité, l’auteur ne craint pas non plus les répétitions et ne s’embarrasse pas de varier les synonymes ou de mettre des fioritures de-ci de-là, contrairement à la plupart des écrivains. Pour cette raison, les descriptions, au début, m’ont paru un peu sèches et pas très évocatrices. J’avais déjà lu « Le Vieil homme et la mer« , à peu près du même style, mais ça m’avait moins frappée et, en tout cas, moins dérangée.
Ceci dit, au bout d’une cinquantaine de pages j’étais tout à fait prise par cette histoire, qui m’a tenue vraiment en haleine. J’avais très envie de connaître la suite. Les ingrédients d’une belle intrigue romanesque sont présents : une grande histoire d’amour, le contexte de la guerre et de ses dangers, de l’aventure et des rebondissements, un héros plein de cœur, de courage et de droiture, une héroïne douce, aimante, sympathique et pas contrariante.
Et justement les relations entre Frédéric Henry et Catherine Barkley m’ont parfois semblé un peu datées – c’est un amour certainement beau et profond mais la jeune femme a l’air assez soumise au bon vouloir de son amant et préoccupée surtout de ne pas le déranger, de ne pas lui peser, de lui donner une vie facile et sans souci, de toujours lui montrer un visage souriant et complaisant. À un moment, le jeune Américain apprend que sa maîtresse est enceinte de lui et ça ne l’empêche pas de repartir combattre à la guerre, sans trop se demander ce qu’elle deviendra pendant ce temps-là, alors qu’il ne l’a même pas épousée pour lui garantir au moins une sécurité et préserver sa réputation. Évidemment, il lui propose de l’épouser mais il n’insiste pas trop quand elle a la grandeur d’âme de refuser.
J’ai compris ce roman comme une mise en balance de la guerre et de l’amour. Le héros a ce dilemme entre les deux. Il « choisit » finalement l’amour, au moment où, pris pour un traître, il manque de se faire fusiller et n’a plus d’autre solution que la fuite, la désertion.
C’est à partir de là, dans ce dernier tiers du livre, que j’ai été le plus touchée et immergée dans cette histoire. À ce moment là on se sent vraiment en empathie et de tout cœur avec ce jeune couple de personnages. La fin est extrêmement émouvante.
Comme vous le voyez, j’ai eu certaines réserves à quelques moments mais les cent ou cent-vingt dernières pages m’ont totalement emportée et convaincue.
J’en ressors avec une impression positive. Et la certitude que c’est un beau roman. 

**

Un Extrait page 56

Nous nous remîmes à manger. Il se produisit alors une espèce de toussotement, un bruit semblable à une locomotive qui démarre, puis une explosion qui de nouveau fit trembler la terre.
– Cet abri n’est pas profond, dit Passini.
– Ca, c’était un gros mortier de tranchée.
– Oui.
Je terminai mon fromage et bus une gorgée de vin. Au milieu du bruit, je distinguai de nouveau un toussotement puis le tchu, tchu, tchu, puis un éclair comme lorsque la porte d’un haut fourneau s’ouvre brusquement, un grondement, blanc d’abord, rouge ensuite, accompagné d’un violent courant d’air. J’essayai de respirer, mais j’avais le souffle coupé et je me sentis sortir tout entier de moi-même, emporté loin, bien loin par le vent. Tout mon être s’enfuyait rapidement et je savais que j’étais mort et que c’était une erreur de croire qu’on mourait comme ça, sans s’en apercevoir ; puis j’eus l’impression de flotter et, au lieu de continuer dans mon vol, je me sentis retomber. Je respirai, j’étais revenu à moi. Le sol était défoncé et, en face de moi, il y avait une poutre déchiquetée. Dans le chaos de ma tête, j’entendis quelqu’un crier. Je crus entendre quelqu’un hurler. J’essayai de bouger, mais je ne pouvais pas bouger. J’entendais les détonations des mitrailleuses et la fusillade de l’autre côté et tout du long de la rivière. Dans une éblouissante clarté je voyais les obus à étoiles monter, éclater, flotter dans l’air, tout blancs. Les fusées s’élançaient et j’entendais les bombes, tout cela en quelques minutes. (…)

**

Un Extrait page 148 et 149

Pendant tout le dîner, Catherine garda ma tunique sur ses épaules. Nous avions très faim et le repas était très bon, et nous bûmes une bouteille de capri et une bouteille de saint-estèphe. J’en bus la plus grande partie, mais Catherine en but aussi et cela la mit en gaieté. On nous servit un coq de bruyère avec des pommes de terre soufflées et de la purée de marrons, une salade et du zabaione comme dessert.
– C’est une belle chambre, dit Catherine. C’est une chambre ravissante. C’est ici que nous aurions dû habiter pendant tout notre séjour à Milan.
– C’est une drôle de chambre, mais elle est agréable.
– Le vice est une chose merveilleuse, dit Catherine. Les gens qui s’y adonnent semblent avoir bon goût. Cette peluche rouge est vraiment très bien. C’est tout à fait ce qui convient, et les miroirs sont très séduisants.
– Tu es une charmante petite femme.
– Je me demande l’effet qu’une chambre comme ça peut produire au réveil ; mais c’est vraiment une chambre splendide.
Je me versai un autre verre de saint-estèphe.
– Je voudrais que nous puissions commettre un vrai péché, dit Catherine. Tout ce que nous faisons ensemble paraît si innocent et si simple. Je ne peux pas croire que nous fassions rien de mal.
– Tu es une gosse épatante.
– J’ai tout simplement très faim. J’ai une faim de loup.
– Tu es une petite femme toute simple.
– Oui, je suis une petite femme toute simple. Tu es le seul à l’avoir compris.
– Un jour, peu de temps après t’avoir connue, j’ai passé un après-midi à imaginer que nous allions ensemble à l’hôtel Cavour… et tout ce qui s’y passait.
– C’était du toupet ! Nous ne sommes pas au Cavour ici?
– Non. On ne nous y aurait pas admis.
– On nous y admettra un jour. Mais tu vois c’est en ça que nous différons, mon chéri. Moi je n’ai jamais rien imaginé.
– Jamais ? Jamais rien ?
– Un tout petit peu, dit-elle.
– Tu es une gosse épatante.
(…)

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