Justine, son mari et toute leur bande d'amis trouvent une solution pour résoudre leurs problèmes d'argent : organiser une fausse croisière romantique pour Franck, un gros investisseur, qui cherche à séduire une femme.Le résumé est vite expédié et on peut regretter que le rapprochement entre l'oeuvre culte de Gérard Oury et celle de Bruno Podalydès soit limitée au titre. La petite vadrouille ne reprend aucun des gags du célébrissime succès de 1966 que tout le monde connait étant donné la multitude des rediffusions à la télévision. Il aurait pu y avoir une ou deux allusions.
S'il y a hommage cinématographique ce serait plutôt à Jacques Demy, avec la scène chantée du restaurant.
Par contre, nous sommes bien dans l'univers qu'affectionne le réalisateur qui possédait un voilier dans Liberté-Oléron et un kayak dans Comme un avion. Il voguait dans le Gâtinais en 2015, déjà avec Sandrine Kimberlain, et reprend cette fois la navigation avec davantage de moyens mais toujours la triple casquette de scénariste, réalisateur et interprète principal (Jocelyn, le "Capitaine" de la Pénichette).
Après l'Océan Atlantique et la rivière de l'Ouanne, c'est le canal du Nivernais qui est choisi. Et si dans Comme un avion les rencontres étaient inattendues, cette fois tout est prévu (voire prémédité) laissant peu de place au hasard. Il surgit sous la forme d'un groupe de jeunes qui donneront aux grands adultes une leçon de philosophie et de bonheur en leur apprenant que si tout est fini alors tout est permis (ce qui justifie d'ailleurs l'entourloupe des plus vieux).
Bruno Podalydès aborde, avec sa fantaisie caractéristique, des thèmes récurrents dans sa filmographie, comme la quête du bonheur et la question de la fidélité. Il les inscrit dans les préoccupations actuelles autour d'une part du consentement et de la domination masculine, et d'autre part de l'opposition entre matérialisme et décroissance.
La bande-son enchaine plusieurs versions de la célèbre chanson marine d’Hugues Aufray Santiano et de l’Hymne à la joie de Beethoven, interprété par un orchestre symphonique ou une simple boite à musique. C’est nostalgique mais une fois de plus et on frôlait la répétition, au risque de finir par se lasser du franchissement des écluses en partageant l’avis du personnage interprété par Daniel Auteuil, c’est lent. La remarque est peut-être à comprendre comme le contrepied du culte de l'argent.Il manque malgré tout quelque chose pour que ce film ne laisse pas une impression d'inachevé. Soit l'affirmation de situations plus comiques, avec par exemple avec des gags plus appuyée, soit encore un travail plus fouillé sur la psychologie des personnages. Franck (Daniel Auteuil), le patron de Justine, ne cherche qu'à la séduire, et uniquement avec son argent. Albin, alias "Gazil" (Denis Podalydès), le mari de Justine, ne lutte que sous l'angle de la jalousie. Du trio, on ne retient que Justine qui lâche l'affaire par fidélité pour son mari, mais qui revient par fidélité pour ses amis qu'il faut sauver de la misère financière en les remettant tous à flot.En 2018 Bruno Podalydès avait réalisé le film Bécassine. Cet amateur se devait de glisser une allusion à son amour pour la bande dessinée. Rien d'étonnant à ce qu'Alban lise Bob Fish d’Yves Chaland le soir dans son lit, à deux reprises.Cette petite vadrouille avec une bande de comédiens réunis autour des deux frères Podalydès (et de deux garçons auprès de leur père) devient douce-amère si on n'y cherche pas d'autre ambition que de nous faire partager le petit vent de fraîcheur qui aura soufflé depuis le canal du Nivernais.
Bien que tourné surtout en pleine nature le résultat tient peut-être plus du théâtre que du cinéma, ce que personne de l’équipe ne viendra contredire puisque, sans quitter leur pénichette, les acteurs saluent tous à la fin.La petite vadrouille de Bruno PodalydèsAvec Sandrine Kiberlain, Daniel Auteuil, Bruno, Denis, Jean et Nino Podalydès, Florence Muller, Isabelle Candelier, Jean-Noël Brouté, Dimitri Doré …
En salles depuis le 5 juin 2024