Fin de saison Jazz à Radio France. Bruno Ruder + ONJ joue le Dodecaband de Martial Solal

Martial Solal par Juan Carlos HERNANDEZ

" Satin Doll " ( Duke Ellington & Billy Strayhorn. Arrangement Martial Solal)

Je reconnais tout de suite les accents et les syncopes propre au langage musical de Martial Solal. Ca swingue mais pas de façon traditionnelle. " Isocèle " est une composition crée pour le trio Martial Solal, Marc Johnson, Peter Erskine (album " Triangle ", 1995). Transcrite pour orchestre car elle ne figurait pas au programme du Dodecaband de Martial Solal. Cf extrait audio au dessus de cet article.

Duke Ellington (1899-1974) a dit du bien de Martial Solal. Voyez la pochette de l'album " Martial Solal. Newport 1963 " pour la citation exacte. En 1999, pour les 100 ans du Duke, Martial Solal enregistra un album entier avec son orchestre. " Martial Solal Dodecaband plays Ellington ". Enregistrement réalisé dans le même lieu que le concert de ce soir, à Paris, à la Maison de la Radio. Duke Ellington est mort en 1974, il y a 50 ans.

Voici donc la version arrangée par Martial Solal de " Satin Doll " (Duke Ellington & Billy Strayhorn). L'air est reconnaissable même dans le solo de piano mais la poupée se fait drôlement chiffonner. L'ensemble est subtilement équilibré entre l'envie de tout renverser et le respect dû au Maître. Equilibre tenu. " Le bon goût consiste à savoir jusqu'où on peut aller trop loin " ( Jean Cocteau). Cf vidéo sous cet article.

" Méli mélodie " (Martial Solal). Internet est un outil de recherche perfectible. Il m'a fait découvrir " Méli mélodie " charmante chanson de Boby Lapointe mais pas le titre homonyme de Martial Solal. Rythmique musclée et souple. Le style Solal. Le son d'ensemble est aussi cohérent et rigoureux que si Martial Solal dirigeait lui-même l'orchestre. Chapeau bas à Frédéric Maurin et à l' Orchestre national de Jazz.

Retour à Duke Ellington arrangé par Martial Solal. " In a sentimental mood ". Je reconnais le thème dès les premières notes de cuivres. Entre piano et orchestre, tout est calme et élégant. Avec une solide pulsation rythmique car c'est du Jazz, sapristi ! J'ouïs même de la flute. Beau solo de sax baryton de Jean-Charles Richard sur le thème. L'orchestre reprend avec le piano en glissando. Le thème est trituré mais conservé. Tout s'arrête pour un solo de piano.

" Version sans thème " (Martial Solal). Thème que je n'ai pas trouvé sur Internet. Bonne crème de cuivre fouettée par la rythmique. Batteur implacable aux baguettes. Quel son d'ensemble ! Cet orchestre avec ce programme ne figure dans aucun festival en France en 2024. Gentilles organisatrices, gentils programmateurs, réveillez-vous ! Solo sensuel à souhait du sax ténor souligné par le cliquetis des baguettes du batteur et les grognements des cuivres. Bref dialogue piano & trompette bouchée. Quelques notes de piano et c'est fini. Quelles grandes délices !

Pour conclure, " Texte et prétexte " (Martial Solal). J'ai retrouvé ce titre du Dodecaband en 1981. Un morceau bref, rapide, énergique. Le pianiste se lance, vertigineux. Le batteur répond aussi sec. Echange vif de la rythmique avec les souffleurs. Fin nette sur un dernier spasme de l'orchestre tout entier.

Martial Solal (1927) ne joue plus sur scène à son âge. Il vit et compose toujours. Il n'a pu assister au concert mais il pourra l'écouter sur France Musique quand il sera diffusé. Comme vous, lectrices vénérées, lecteurs vénérables. Une pensée aussi pour Eric Le Lann (1957) , trompettiste inamovible du Dodecaband et du NEW Decaband de Martial Solal depuis 1981.