Olivier Besancenot capitalise sur les difficultés sociales
LE MONDE | 23.08.08 | 14h14 • Mis à jour le 23.08.08 | 17h42Les voyants sont passés au rouge pour l'économie française, et cela fait l'affaire d'Olivier Besancenot. Sur fond de fortes inquiétudes sociales, le leader de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) caracole dans les sondages et son aura politique à gauche ne cesse d'augmenter. C'est donc avec une "pêche d'enfer" que le porte-parole de la LCR dit aborder sa rentrée politique à Port-Leucate (Aude), pour l'université d'été de son organisation, qui se déroule du 23 au 26 août. La dernière avant la création, fin janvier, du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), qui vise à regrouper plus largement la gauche radicale.
28 ET 29 JUIN.
La LCR lance la première coordination nationale des comités pour un "nouveau parti anticapitaliste" à Saint-Denis. Près de 900 délégués mettent en place un comité d'animation où sont représentés à parité les cadres de la LCR et des non militants.23 AU 26 AOÛT.
Université de la LCR à Port-Leucate (Aude). Quelque 1 500 personnes sont attendues pour discuter des contours du nouveau parti.FIN JANVIER 2009.
Congrès de dissolution de la LCR, suivi par le congrès de fondation du nouveau parti anticapitaliste. Le nom définitif de l'organisation n'est pas encore arrêté. Les dirigeants de la LCR déclarent attendre plus de 10 000 militants ; ils sont 3 500 à la "Ligue".Le baromètre de Paris Match, réalisé par l'IFOP le 17 juillet, lui donnait 62 % de bonnes opinions. Un score encore en hausse de 2 points par rapport au précédent. Plus impressionnant, le nombre d'"excellentes opinions" grimpe à 10 %. L'institut estime aujourd'hui que son espace électoral progresse et atteint 7 % à 8 % des intentions de vote.
La crise de leadership au Parti socialiste ne fait que renforcer la sympathie envers le jeune postier. Selon le dernier sondage IFOP sur l'image du PS, paru dimanche 17 août, plus de la moitié des Français (52 %) estiment que le parti ne s'oppose pas suffisamment au gouvernement. Et dans le choix des alliances possibles, ils sont 18 % à estimer que les socialistes devraient s'entendre avec Olivier Besancenot. "Face à la politique de Nicolas Sarkozy, vécue comme revancharde, une partie de l'électorat PS estime qu'il faut s'opposer plus frontalement. Le discours de Besancenot peut rencontrer un écho grandissant", observe Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l'IFOP.
LA RECETTE A PAYÉ
Les inquiétudes des Français sur le pouvoir d'achat et l'emploi créent un terreau politique favorable. "Avec les factures à payer en septembre et la vague de pessimisme qui gagne les Français, le mécontentement social va grandir dans l'électorat de gauche", pronostique M. Fourquet. C'est sur ce terrain qu'Olivier Besancenot entend mener l'offensive : "Les licenciements reprennent de plus belle, les salaires sont bloqués, la privatisation de La Poste est en marche... La rentrée ne sera pas un long fleuve tranquille pour Sarkozy", assène-t-il. Lors de son meeting à Port-Leucate, samedi 23 août, l'ancien candidat à la présidentielle devait mettre l'accent sur les conséquences de la crise qui s'installe : "Qui va payer le prix de la récession ? Les jeunes salariés, les chômeurs, les retraités, les plus faibles", explique-t-il. Un discours radical qui séduit de plus en plus.
Depuis un an, on a vu Olivier Besancenot partout où des usines fermaient, où des grèves pour les salaires et les conditions de travail se déclenchaient. La recette a payé, estiment les dirigeants de la LCR.
"Olivier apparaît comme le seul résistant à gauche, à l'écoute des salariés qui étouffent", juge François Sabado, membre de la direction nationale. La "Ligue" entend montrer qu'elle sera là, "partout où les boîtes ferment et où les salariés luttent" pour "préparer un mouvement d'ensemble avec des blocages d'entreprises".
Une campagne sera lancée dès septembre pour réclamer une augmentation du smic de 300 euros et "l'arrêt des licenciements". Les amis d'Olivier Besancenot veulent ainsi "continuer à faire la démonstration qu'(ils sont) les plus efficaces face à ce gouvernement". "Nous avons besoin d'une gauche digne de ce nom qui ne s'excuse pas d'être anticapitaliste et de vouloir changer le monde, insiste M. Besancenot. Un des principaux atouts de Sarkozy, c'est qu'il a une gauche défaillante."
"Nous allons continuer à montrer notre utilité politique immédiate et construire le nouveau parti", explique Pierre-François Grond, membre du bureau politique. Les dirigeants de la LCR ne doutent pas de leur succès, après la création du NPA fin janvier.
L'affluence à Port-Leucate semble leur donner raison. Près de 1 400 personnes sont attendues cette année, du jamais vu dans l'histoire de l'organisation. L'attirance semble aussi réelle dans les réunions des comités pour le NPA. "Dans le vide sidéral à gauche, il y a une vraie curiosité pour cette initiative", reconnaît Christian Picquet, principal animateur de la minorité opposée à cette ligne.
Des figures de la gauche radicale commencent à manifester leur intérêt. Clémentine Autain, ancienne adjointe au maire de Paris, dit "envisager sérieusement" de rejoindre le NPA. L'altermondialiste Raoul-Marc Jennar a franchi le pas. Le philosophe Michel Onfray et le sociologue Christophe Boltanski s'interrogent. Il reste cinq mois à la "Ligue" pour arriver à conserver cet enthousiasme militant.
Sylvia Zappi