J’ai eu le plaisir de découvrir cette grande rétrospective Mark Rothko vers le début janvier 2024. Je n’avais jamais vu d’œuvres de lui en vrai. J’étais avertie que les reproductions photographiques, aux dimensions très réduites, dont j’avais dû me contenter jusque-là, ne donnaient qu’une image vague et très atténuée de la réalité. Les échos que j’avais eus de cette expo étaient contrastés – Certains, très négatifs ! – ce qui aiguisait à la fois ma curiosité et ma circonspection. Ne sachant pas vraiment à quoi m’attendre, j’avais tout de même grand espoir d’être séduite.
Cette exposition s’était déroulée à la Fondation Louis Vuitton entre le 18 octobre 2023 et le 2 avril 2024.
Le présent article prend place dans mon Mois Américain.
Une parenthèse sur ma visite : c’était la première fois que je mettais les pieds dans ce musée et la visite fut pénible, d’un point de vue pratique et physique. Déjà, c’est une expédition pour aller (à pied) du métro Sablons à cet espèce de bâtiment tarabiscoté et tape-à-l’œil : avec la pluie, le vent et le froid, ce n’est pas une partie de plaisir. Ayant réservé nos billets par internet, on nous a tout de même fait attendre durant dix bonnes minutes, en extérieur, sous une pluie battante – à croire que cette Fondation n’a pas les moyens d’installer des auvents ou des passages couverts pour protéger ses visiteurs. A l’entrée : le bazar. Les nombreux agents du service de sécurité traitent les gens comme du bétail, séparent les couples, embarquent les sacs à main hors de la vue de leur propriétaire et les restituent – sans méprise par un curieux hasard ! – quelques mètres plus loin. Dans le musée, on sillonne chaque étage du bâtiment, en passant par moult escalators, escaliers, arrière-salles, recoins et bouts de couloirs qui achèvent de nous mettre les jambes en compote. A la sortie, le retour vers le métro ne fut pas plus joyeux.
Ca nous a dissuadés d’y retourner, aussi alléchantes que puissent être les futures affiches !
Voici la Présentation de l’expo par le musée :
Première rétrospective en France consacrée au peintre américain Mark Rothko (1903-1970) depuis celle du Musée d’Art moderne de la Ville de Paris en 1999, l’exposition présentée à la Fondation réunit quelque 115 œuvres provenant des plus grandes collections institutionnelles, notamment de la National Gallery of Art de Washington, de la Tate de Londres et de la Phillips Collection de Washington, et de collections privées internationales dont celle de la famille de l’artiste.
Se déployant dans la totalité des espaces de la Fondation, selon un parcours chronologique, elle retrace l’ensemble de la carrière de l’artiste depuis ses premières peintures figuratives jusqu’à l’abstraction qui définit aujourd’hui son œuvre.
(Source : Site internet du Musée)
Mon Avis
Les deux premières salles de l’expo étaient consacrées aux débuts artistiques de Rothko, caractérisés par des toiles figuratives, quand il n’avait pas encore trouvé son style personnel si reconnaissable. J’avoue que ces toiles ne m’ont pas attirée. On sent que le peintre se cherche et tâtonne dans plusieurs directions. Ici ou là, on a l’impression que certaines compositions préfigurent un tout petit peu le style de la maturité. Je suis passée assez vite dans ces deux premières salles.
La suite de l’expo montrait des œuvres plus représentatives du style emblématique de Rothko, avec ces fameuses compositions bi ou tripartites, dites « classiques ». Ces toiles sont beaucoup plus nuancées et subtiles que je ne l’imaginais d’après les photos. Je pensais voir de bêtes rectangles, à peu près uniformes, juxtaposés de manière basique les uns au-dessus des autres – mais ce n’est pas du tout ça ! Il y a tout un travail sur les transparences des couches de peinture ou sur leur brillance, des effets de sfumato, parfois des impressions de relief (certains rectangles semblent sortir de la toile et s’avancer vers nous, d’autres restent plus en retrait). Bizarrement, on ressent, aussi, quelquefois, des sensations thermiques. Certains tableaux dans les tons jaunes, orange ou rouges, semblaient irradier intensément et on en éprouvait physiquement la chaleur et le rayonnement. Comme les tableaux sont d’une taille imposante, plus grande que celle du corps humain, le spectateur se sent absorbé et presque incorporé à l’atmosphère de la toile et à ses teintes. Il y a une grande vibration des surfaces colorées. Par moments, à force de regarder telle ou telle toile, on a l’impression d’observer un paysage et non plus une abstraction – on croit voir tantôt une mince route centrale séparant deux champs tantôt un horizon un peu brumeux entre terre et ciel. Cette illusion d’optique m’a beaucoup plu.
Au fur et à mesure des salles d’expo, les tableaux deviennent plus sombres. Les noirs et les gris occupent de plus en plus de place. Parmi les dernières œuvres, un certain nombre ressemble à des visions du sol lunaire : la partie supérieure (plus ou moins haute) est toute noire et l’inférieure est d’un gris moyen, mat. Selon la hauteur de cette « ligne d’horizon », l’effet est plus ou moins oppressant et/ou désolé. On fait forcément le lien avec la grave dépression qui touchait Mark Rothko de plus en plus profondément dans les dernières années de sa vie et qui l’a mené au suicide. Mais, selon les cartels de l’expo, ce lien de causalité entre dépression et noirceur picturale serait trop facile et discutable.
Un peintre que j’ai aimé découvrir et qui m’a fait une forte impression !
Nota Bene : Les photos ci-dessus proviennent de sites internet. Si leurs auteurs veulent leur retrait de ma page, qu’ils m’écrivent, ce sera fait.