Tiens ! Un twit m’informe que c’est le douzième anniversaire de l’évacuation par les forces de l’ordre des gugusses, qui sous prétexte d’être en situation irrégulière squattaient l’église Saint Bernard. Une grande manifestation s’en était suivie et comme il faisait beau et que nous n’avions pas mieux à faire, Gaël et moi sommes allés manifester. A l’époque, il était venu passer quelques jours de vacances au Kremlin-Bicêtre, Maubeuge étant trop loin de chez lui.
Je précise que c’est Gaël qui avait insisté pour que nous y allions. Pour ma part, comme je suis beaucoup plus vieux, je n’avais déjà pas besoin de prétexte comme celui-là pour aller au bistro.
Je précise également mais en aparté car ça n’a rien à voir avec l’objet du billet que je tape ce billet sur l’ordinateur de ma copine Madame Martine (blonde à gauche, mais seulement sur la photo) qui est un portable avec un clavier très étroit pour faire tenir un pavé numérique. Je n'arrête pas de faire des fautes de frape et d’appuyer sur des combinaisons de touches qui déplacent le curseur dans tous les sens comme s’il courrait pour trouver un bistro ouvert. Je vous prie donc de m’excuser pour le nombre de fautes qui perturberont ce billet, encore plus que d’habitude.
Ainsi, nous nous étions gaillardement dirigés, en voiture (faut pas déconner non plus), vers la Place de la République pour rejoindre le cortège qui se allait vers la Place de la Nation. Il y avait 300 participants selon la police, 2500 selon France Info, 3000 selon le Monde, 500000 selon TF1 et un million selon l’Humanité. Je ne plaisante qu’à moitié. L’âge aidant et le temps passant, je ne me souviens pas des chiffres, mais je me rappelle juste que seuls TF1 et l’Huma que nous avions acheté le lendemain donnaient une vision à peu près conforme à ce qu’il nous avait semblé vivre de l’intérieur.
A un moment, je dis à Gaël : « Stop ». Je ne sais pas si vous avez déjà fait ce trajet à pied au mois d’août mais ça donne soif. Une pression s’imposait. On est donc allé s’en jeter un dans un bistro. En sortant, un type qui regardait derrière lui me bouscule et je manque de me casser la gueule. « Hé ho ! Vous pourriez pas regarder devant vous, non ! Ca va pas la tête ! » lui dis-je, puis je prends Gaël à témoin : « On rencontre vraiment des cons partout ». Aujourd’hui, la situation n’a pas changé : je ne sais pas si François Hollande sait où il va et s’il regarde devant lui… car c’est l’alors futur premier secrétaire du Parti Socialiste que j’avais engueulé, ce que me fit remarquer Gaël ensuite.
Nous reprenons la route et nous retrouvons à Nation. Je me dis « ouf ! » car j’en avais ma claque de marcher. Je ne savais pas encore que deux heures après, j’allais finir, par courir 200 mètres à la vitesse d’un jamaïcain énervé voulant gagner une médaille d’or, alors que moi, je voulais uniquement échapper aux vilains CRS qui nous poursuivaient avec leurs matraques.
Le méchant cortège de manifestant, arrivé à Nation, avait en effet décidé de poursuivre sa marche jusqu’au centre de rétention à Vincennes (ce qui fait une trotte)… puis de s’en prendre à ce centre comme s’il s’agissait de la Bastille, 207 ans auparavant. Mais, les CRS d’aujourd’hui sont plus efficaces que ceux de l’époque. Les gaz lacrymogènes avaient commencé à fuser. Gaël et moi, nous nous étions barrés discrètement et, avec trois ou quatre aux gugusses, nous avions tenté une nouvelle approche par une petite rue pour observer la scène. Les CRS nous avaient pris pour des méchants activistes… et ont décidé de nous poursuivre… Je n’ai jamais couru aussi vite que cette fois là !
12 ans après, la situation des étrangers en situation irrégulière n’a pas changé. Sauf qu’on les appelle maintenant les « sans papier ».