Jusqu'au bout du jour, de Jo(sette) Pellet

Publié le 05 juin 2024 par Francisrichard @francisrichard

10 juillet 2015

Tu vois, je tiens ma promesse: je ne t'ai pas oublié! Pas oublié non plus notre rencontre dans un train entre Graz et Lausanne, il y a un demi-siècle.

Adolescents taillés dans la même étoffe de révolte et de quête, nous nous étions immédiatement "reconnus" et aimés... D'un amour platonique.

Ensuite nos lettres, pendant trois ans. Puis seulement les tiennes.

De nos jours, les adolescents font des rencontres virtuelles avant qu'elles ne deviennent réelles. À l'époque elles étaient réelles, et l''imaginaire s'en nourrissait.

Pour retrouver ses amours de jeunesse, le net peut être un outil performant qui vaut la peine d'être utilisé, même si le résultat n'est pas toujours au rendez-vous.

La narratrice du récit, grâce sans doute à un de ces fameux moteurs de recherche, retrouve la trace de l'homme qui, jadis, lui a fait battre platoniquement le coeur.

Commence alors une correspondance entre eux deux. Mais le lecteur n'a droit qu'aux lettres de l'homme qui a subi de l'âge, entre temps, l'irréparable outrage.

Ses lettres ne sont pas reproduites en caractères d'imprimerie, comme le reste du texte, mais dans une nouvelle graphie, i.e. une belle écriture, bien humaine.

Cette femme et cet homme ont vécu éloignés dans le temps. Ils le sont encore dans l'espace puisqu'elle demeure encore à Lausanne et que lui est soigné en Styrie.

Qu'à cela ne tienne, la femme, qui, c'est connu, est plus courageuse que l'homme, franchit à plusieurs reprises la grande distance qui les séparent pour le rejoindre.

L'homme écrit des lettres manuscrites, la femme, en italiques, de brefs commentaires ou des poèmes courts, comme les affectionne Jo(sette), l'auteure de haïkus.

Le récit révèle bien des différences entre cette femme et cet homme. Elle prend plus de risques que lui, mais elle n'a pas autant d'attaches familiales que lui.

Qu'en sera-t-il de leurs retrouvailles? C'est bien sûr au lecteur de le découvrir. Quel que soit son âge, il n'aura pas de mal à le deviner s'il en a fait l'expérience.

Et puis, s'il aime les mots, il sera servi et comprendra ce que veut dire l'auteure en conclusion de ce fragment amoureux, singulier, i.e. intemporel et universel:

Ah l'amour des mots

puisse-t-il m'accompagner

jusqu'au bout du jour.

Francis Richard

Jusqu'au bout du jour, Jo(sette) Pellet, 80 pages, Éditions des Sables

Livres précédemment chroniqués:

Syrie - Les hirondelles crient, 76 pages, Éditions Unicité (2013)

Mékong mon amour, 96 pages, Samizdat (2014)