Je n’ai jamais rien lu de Salman Rushdie. Pas la moindre ligne. On mesure ici toute l’étendue de mon inculture. J’ai simplement été attiré par la couverture du livre, Knife, mot coupé en deux par une entaille verticale, un trompe-l’œil magnifique, saisissant résumé de l’histoire d’un homme poignardé sur la scène d’un auditorium bondé.
Au-delà de l’abyssale absurdité du geste, on reste tout à fait interdit par le mobile du crime. Comme moi, l’agresseur n’a jamais lu Rushdie, juste deux pages des Versets Sataniques, et quand on lui demande ce qu’il connait de l’auteur, il répond que ce sont principalement des extraits de conférences vus sur Youtube. Il y a vu un homme malhonnête, qui attaque l’islam et qu’il n’aime pas, lui qui respecte l’ayatollah.
Voilà.
Ensuite, un tweet lui a appris que Rushdie allait faire une apparition publique à Chautauqua, État de New York. Il a noté la date, pris sa voiture, un sac rempli de couteaux, on se demande bien pourquoi, sans doute une question de qualité de lame, et s’en est allé poignarder un vieux monsieur de 75 ans venu parler de la nécesité de protéger les auteurs en danger.
« Je n’aime pas la personne. Je ne pense pas qu’il soit une très bonne personne. » 15 coups de couteau.
Pour ça.