La Chimère // De Alice Rohrwacher. Avec Josh O'Connor, Carol Duarte et Isabella Rossellini.
Avec La Chimère, Alice Rohrwacher nous plonge dans le spleen estival d'une petite ville du bord de la mer Tyrrhénienne. Chaque plan du film est beau et veut nous rappeler toute la magie du cinéma. C'est justement cette beauté là qui fait finalement tout l'intérêt et le succès de La Chimère. Toute la poésie de ce film naît de façon instantanée, comme un conte. L'idée de la chimère est celle que l'on poursuit toute sa vie sans parvenir à la saisir. Au fond, La Chimère nous présente donc des destins et les entrecroise avec une certaine malice. Le film n'est pas forcément unique en son genre mais il a une vraie tendresse et une justesse étonnante à nous proposer. Dans l'air du temps et en même temps suranné. Si La Chimère n'est pas forcément à la hauteur de certaines oeuvres précédentes de la réalisatrice (je pense à Corpo celeste, Les merveilles ou encore Heureux comme Lazzaro) elle fait tout de même une belle proposition ici.
Chacun poursuit sa chimère sans jamais parvenir à la saisir. Pour certains, c'est un rêve d'argent facile, pour d'autres la quête d'un amour passé... De retour dans sa petite ville du bord de la mer Tyrrhénienne, Arthur retrouve sa bande de Tombaroli, des pilleurs de tombes étrusques et de merveilles archéologiques. Arthur a un don qu'il met au service de ses amis brigands : il ressent le vide. Le vide de la terre dans laquelle se trouvent les vestiges d'un monde passé. Le même vide qu'a laissé en lui le souvenir de son amour perdu, Beniamina.
Durant ses deux heures (!), La Chimère a la chance de nous proposer une galerie de personnages divers et variés. Si parfois cela semble un brin long (je pense qu'un petit quart d'heure aurait pu être amputé), l'ensemble tient assez bien sa barque de bout en bout. Le récit reste un brin confus à des moments car l'on a tellement de personnages et de scènes que leur assemblage peut paraître étrange par moment. Il y a tout de même ce spleen estival, savoureux mélange entre la Terre et la Mer. L'histoire d'amour perdu n'apporte malheureusement pas grand chose à La Chimère et s'avère presque être le point faible qui peut le faire flancher. On retrouve tout le charme du cinéma d'Alice Rohrwacher et ce goût prononcé qu'elle a du réalisme mélangé à quelque chose de plus fantasmé alors que Arthur retrouve une bande de Tombaroli (des pilleurs de tombes).
La Chimère préfère se concentrer sur la relation entre les personnages et la dynamique de groupe plus que par cette histoire de Tombaroli. On a des pilages mais ce n'est pas vraiment ce qui nous intéresse ici. Il y a tout de même quelque chose d'assez paradoxal avec La Chimère dans le sens où le film est à la fois ce que la réalisatrice a fait de plus abouti et en même temps, je n'ai pas retrouvé la sensibilité poétique de certaines de ses oeuvres précédentes. A la fin on garde un bon souvent de ce groupe de personnages particuliers. L'idée de se concentrer sur des pilleurs de tombes est original et permet de délivrer quelque chose qui fonctionne assez bien au final.
Note : 8/10. En bref, belle surprise surannée qui colle parfaitement à l'esprit de la réalisatrice entre réalisme et fantasmagorique.
Sorti le 6 décembre 2023 au cinéma - Disponible en VOD et DVD