J’ai visité cette grande rétrospective du peintre Nicolas de Staël (1914-1955) vers la mi-novembre 2023, au musée d’Art Moderne de la ville de Paris.
Cette exposition réunissait environ deux cents tableaux, représentatifs des différentes périodes stylistiques du peintre, influencées par les divers endroits où il a vécu et travaillé (Paris, Île de France, Provence, Nord de la France, Sicile, Antibes, …)
Présentation de l’exposition par le musée
Organisée de manière chronologique, l’exposition retrace les évolutions successives de l’artiste, depuis ses premiers pas figuratifs et ses toiles sombres et matiérées des années 1940, jusqu’à ses tableaux peints à la veille de sa mort prématurée en 1955. Si l’essentiel de son travail tient en une douzaine d’années, Staël ne cesse de se renouveler et d’explorer de nouvelles voies : son « inévitable besoin de tout casser quand la machine semble tourner trop rond » le conduit à produire une œuvre remarquablement riche et complexe, « sans esthétique a priori ». Insensible aux modes comme aux querelles de son temps, son travail bouleverse délibérément la distinction entre abstraction et figuration, et apparaît comme la poursuite, menée dans l’urgence, d’un art toujours plus dense et concis : « c’est si triste sans tableaux la vie que je fonce tant que je peux », écrivait-il. La rétrospective permet de suivre pas à pas cette quête picturale d’une rare intensité, en commençant par ses voyages de jeunesse et ses premières années parisiennes, puis en évoquant son installation dans le Vaucluse, son fameux voyage en Sicile en 1953, et enfin ses derniers mois à Antibes, dans un atelier face à la mer.
(Source : Site du Musée d’Art Moderne)
Mon Avis
J’ai adoré cette exposition par la grande diversité des œuvres présentées, leur beauté, leur lumière, leur poésie. Les couleurs, souvent éclatantes et franches, vont de pair avec un immense raffinement, une élégance incroyable. Dans les tableaux réalisés en Sicile, en particulier, il ose des juxtapositions de couleurs qui paraitraient criardes chez n’importe quel autre peintre – des jaunes, rouges, violets, verts très vifs – mais lui réussit à créer l’harmonie, à faire chanter les teintes sans qu’elles s’étouffent mutuellement. Il semble d’ailleurs être toujours en quête de nouvelles couleurs à utiliser, renouvelant sans cesse sa palette – tel ce « Paysage sur fond rose » (cf. ci-dessous) qui étonne ! – et je n’ai pas pu m’empêcher de penser que nombre de peintres abstraits du 20è siècle avaient réduit leur palette aux seules couleurs primaires (Mondrian, par exemple) quand d’autres bannissaient certaines autres, mal-aimées, comme le vert (détesté, entre autres, par Kandinsky). Tandis que Nicolas de Staël semble vouloir accueillir sur ses toiles toutes les nuances possibles de la nature et de la vie et c’est cette ouverture au monde qui m’a séduite et touchée.
J’ai aimé, aussi, regarder ces toiles de très près pour admirer leur belle texture : la peinture semble avoir été étalée au couteau, d’un geste sûr, net et précis, qui ne souffre pas, ou très peu, de repentir. On ne peut pas s’empêcher de voir un côté « maçonné » dans certaines toiles, et, bizarrement, ce maçonnage – évocateur d’un ouvrier maniant sa truelle – donne un effet extrêmement délicat, poétique et doux.
Toutes ces alliances de contrastes, d’ambiguïtés, de paradoxes, m’ont paru caractéristiques de cet artiste rare, génial, et de ses superbes tableaux.
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Les Toits, Paris, 1951 Paysage, 1952 Arbre rouge, Provence, 1953 Paysage, Provence, 1953 Agrigente, 1953-54 Paysage sur fond rose, Ménerbes, 1954 Coin d’Atelier, Fond bleu, Antibes, 1955