Collaboration au processus...

Publié le 11 avril 2024 par Eric Acouphene

 "On ne reproduit jamais un éveil ; on ne fait que collaborer étroitement au processus éveillant qui s’est mis en route. Dans la mesure où l’on y collabore de façon profonde, sincère, intelligente, on devient de plus en plus conducteur de ce processus, et on l’incarne de plus en plus. (...)

Il faut reconnaitre que la lumière, l’intelligence de l’éveil n’éclairent en fait que les lieux dont on a ouvert les portes en nous. Ensuite tout le travail consiste à coopérer avec cette dynamique de l’éveil, à ouvrir une à une les portes de toutes les zones obscures pour y faire s’engouffrer la lumière de l’éveil, la lumière de cette intelligence que l’on conserve en soi. Elle est vivante en moi. Au cœur de mon être, je me sais éveillé, je me sais libre, indéniablement. Pourtant, je sais que ce n’est pas suffisant, que je ne suis pas ce qu’en Inde on appelle un « réalisé », c’est a dire un homme définitivement établi dans l’éveil, et qu’il reste encore bien des domaines de ma conscience qui doivent être investis de cette qualité, visités par cette intelligence.

Il m‘est alors apparu évident que ce qui était au cœur de la voie du monde, dans la vie quotidienne, c‘était la relation, et que la pratique consistait à faire de cette relation un travail constant. C’est ce que j’ai appelé la pratique de la « relation consciente ». (...)

Je me suis rendu compte à quel point l’enseignement qui mettait en avant l’éveil comme le but ultime avait tendance a individualiser la démarche et à renforcer l’égoïsme de chacun. Dans mon enseignement, j’ai voulu au contraire que les personnes entrent en relation les unes avec les autres, qu’elles oublient un objectif personnel d’éveil, de libération, et reconnaissent qu’on ne peut grandir qu’ensemble, en prenant le risque de l’autre, en entrant en relation profonde avec l‘autre dans la mesure où celui-ci est l‘occasion d’aller voir ce qu’on n’est pas capable de voir tout seul. (...)

ll se passe quelque chose a partir du moment où l’on n’est plus obsédé par l’éveil et où l’on entre vraiment en relation avec ce qui est. C’est d’ailleurs là que j’ai compris la vraie signification du mot satsang, qui tient une grande place en Inde cela ne se limite pas à la fréquentation du guru, mais c’est élargir le guru à tout ce qui est et fréquenter le réel en tout et partout. Le grand enseignement, le vrai satsang, consiste à vivre en relation consciente avec tout ce qui est ; c’est l’occasion d’un grandir qui, par nature, est de la nature de l’éveil.

En sanskrit, Brahman signifie « grandir », « croître «. Cette dynamique, du fait qu’elle devient prioritaire, nous libère de l’objectif de l’éveil ; on prend peu a peu conscience de la nature réelle du grandir et on se rend compte que cette nature est la réalité. Quand le Christ dit : "Je suis le chemin, la vie, la vérité ", il ne dit pas " Je suis le bout du chemin ", mais " je suis le chemin ". C’est quand on entre dans un grandir constant, qu’on ne cherche plus à atteindre une destination finale, un but, qu’on l’appelle « éveil » ou autrement, que le grandir devient lui-même la conscience vivante dans laquelle tout est inclus. Saint Jean de la Croix disait : « Celui qui s’arrête en quelque chose cesse de se jeter dans le tout. » "

Yvan Amar

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