Bois flotté amarré basse mer
scrutant l'océan et ses nouvelles vagues.
Dans la vitrine de l'oiseau tempête:
"Vous vous inquiétez du réchauffement climatique, de l'avenir de la BBC, de ce qui se passe en Palestine ou en Syrie. Des choses auxquelles vous ne pouvez rien et qui pour la plupart n'ont rien à voir avec vous. Le monde serait meilleur si chacun se contentait de cultiver son jardin, parce que quand on se mêle de ce genre d'histoires, à tous les coups on ne fait qu'empirer les choses. [...]
Martin grogna mais dit : "Bref, j'imagine que Pascal serait d'accord avec toi.
- Qui ça ?
- Blaise Pascal. Il a dit que " Tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre."
- Très bien dit. Ça résume parfaitement la philosophie britannique.
- Il était français.
- Eh ben ça arrive que les Français aient raison, de temps en temps."
"Ne vivent haut que ceux qui rêvent.
Martyrs de l'aube nous avons étreint la sainteté des nuits chaudes, camarades.
Restons sourds aux murmures pharisiens qui nous condamnent."
" Mais parce que j'étais sensible à la poésie ! J'ai un frère aîné d'un an qui m'a initié à beaucoup de choses. Il me précédait. Nous avons lu très tôt du Michaux, des dadaïstes, des surréalistes. Je ne sais même pas comment il trouvait les livres, parce que nous vivions à la campagne. On partageait la même chambre et il me lisait des textes, le soir pour m'endormir. Je me souviens encore de moments précis de lectures de Michaux, de Beckett... C'est quelque chose qui est devenu très familier pour moi. C'était même devenu plus simple de lire de la poésie que du roman pour nous. Nous faisions un trio avec le fils du fermier de la ferme voisine. Dans cette ferme, il y avait de vieux greniers et on s'était aménagé un endroit. Il y avait un poêle, on faisait du feu et devant les flammes et le bois qui se consumait, nous inventions des poèmes, sur le moment, en buvant un peu de bière. J'avais à peu près quinze, seize ans. On écoutait aussi des chansons françaises, mais on parlait essentiellement, c'était de l'invention. La poésie est donc devenue pour moi la forme la plus familière à pratiquer. Ensuite, ça a été plus difficile de passer à un genre où il y a un personnage. Ce passage a été incité par Jérôme Lindon. Il m'a conseillé de parler de grands thèmes comme celui de la mort et de l'amour. Et donc, il a fallu que je trouve un personnage. J'ai pris un personnage qui était près de moi et qui restait mystérieux. Donc, c'était vraiment un personnage romanesque. J'ai beaucoup aimé ce passage au roman. On peut faire des portraits dans la poésie, mais dans la prose, il ne faut pas avoir peur d'avoir quelque chose de perdu, en trop, car ça amène d'autres choses. On écrit et parfois ce n'est pas utile d'insister, mais quelque chose naîtra quand même de cette insistance. C'est comme ça que j'imagine un peu la prose. Il ne faut pas avoir peur de broder un peu, alors que la poésie, c'est plus ramassé, il n'y a pas vraiment de nuances, du moins telle que je la pratique."
"Un beau désordre vaut mieux qu'une inerte ordonnance"
Eugène Savitzkaya extrait de: "Marin mon coeur"