Magazine Culture
Les pluies reviennent déjà sur notre beau pays, suivies de près par leur interminable cortège d’antipathiques chafouinades d’automne. Force est de constater qu’il va falloir définitivement renoncer à nos dernières espérances de voir s’éterniser ce surnaturel été indien.
La pilule est certes difficile à avaler, on recule, on rechigne, non je ne vais pas déjà ressortir collants et chaussettes, non le gaspacho ne se fera pas tout de suite voler la vedette par un velouté réconfort d’hiver et non de non je ne veux pas avoir à imaginer le sempiternel retour des goûtes, pastilles, pommades, gélules et autres suppo aux accents d’eucalyptus.
Pourtant, ami(e)s du Nord de La Loire rassurez-vous ! Le péril serait subjectif. Le danger pas aussi irrémédiable qu’il n’y parait. Un livre vient pourfendre ces funestes menaces pour nous sauver la mise, du moins pour cette année.
Notre messie : François Reyanert. Son objectif: frapper un grand coup sur le moral des troupes plutôt que de distiller le spleen ambiant par doses homéopathiques.
C’est la technique dite du sparadrap. On tire d'un coup, net et efficace plutôt que d’user d’une tendresse toute de façade en arrachant un par un les petits poils si frêles mais si tenaces.
Il le dit lui-même, son livre est dédié « au chien qui boite, aux zones pavillonnaires une après-midi de semaine, au dimanche en général, à tout ce qui de façon universelle et assurée, nous colle le bourdon ».
Rien de tel que de délimiter l’ennemi, de l’assigner à résidence, de le circonscrire dans son entièrté afin de mieux l’assommer, le juguler que dis-je l’assassiner !
Dans son petit panier Reynaert jette en vrac tout ce qui nous pourri l’existence, du plus dérisoire des dégoûts aux plus infernales des désenchantements.
Florilège : le petit cirque : « Tous ces gens groupés en cercle sur de pauvres bancs de bois (…) et cette âcre odeur de bête mouillée et de pull marin humide qui flotte dans l’air alors que nous en sommes à la pyramide zoologique, deux caniches vieillissants sont sur le dos d’une chèvre qui bave, elle-même montée sur le dos d’un lama sans âge…Le cirque colle le bourdon parce que le cafard est lié au cirque de façon ontologique. Prenez n’importe quelle pièce, film, opéra qui se passe autour d’une piste et vous verrez : dès le premier plan sur le trapèze, on sent qu’on va se ramasser une catastrophe en pleine figure. »
La maison de retraite : « Tout y est ralenti, feutré, on dirait que l’ascenseur lui-même se déplace en pantoufles tellement il est lent (…) de longs couloirs sont décorés de couchers de soleil sur le Rhin en aquarelle, des biches à l’étang en tapisserie, des cadeaux faits de la main même d’anciens pensionnaires (de telles horreurs ne peuvent être en vente libre). »
On referme son livre comme un tube de Xanax, le sourire aux lèvres avec la suffisance du dompteur qui a su maîtriser la bête.
Un ouvrage à s’offrir pour Noël pour faire passer la dinde et les guirlandes.