Frustration et à Bonjour Minuit, Saint-Brieuc, le 29 mars 2024
michel + Jacques Rolland
Point météo: ce mois de mars finit sous la pluie, les averses, les orages et le vent.
A Bonjour Minuit , la fin mars s'annonce tout aussi agitée avec la venue de Frustration et de Mary Bell.
Il y a longtemps que tu n'avais plus vu un public, pourtant pas tout jeune, aussi exubérant et tumultueux dans le complexe briochin.
Pogo, moshpits, mouvements de foule incontrôlés, grosse foire peu avant minuit, résultat: beaucoup de sueur, un ou deux portables piétinés, un sweat shirt perdu et un dentier en cavale.
Punk is not vraiment dead!
Il est 21:05, quatre filles sortent de coulisse: Mary Bell !
Aucune d'entre elles n'a jamais assassiné des gosses et on ne sait pas si la maman d'une de ces demoiselles se promenait sur les trottoirs en quête d'une passe mal rémunérée.
Avant, Mary Bell c'était: Victoria Arfi - guitar, vocals /Tristan Badré - bass / Alice Lelion- vocals / Marie Filliette - drums, vocals, aujourd'hui on peut clairement parler d'un all female combo car Lucie Marsaud ( ex-BRNS et Gavagaii) a piqué la basse de Tristan, parti à la recherche d'Iseut dans le Sud.
Mary Bell, catalogué groupe riot grrrl/punk/grunge, sévit depuis pas mal d'années, dans sa gibecière, pas de lièvre abattu près de Fontainebleau, mais deux EP's et trois full CD's, le dernier 'Cerbero', à ne pas caresser, date d'octobre 2023.
La première plage de cette rondelle est chauve, elle a été baptisée 'Hairless', c'est aussi le titre par lequel les sulfureuses jeunes femmes entament leur tour de chant vitaminé.
Moins de deux minutes, à donner le vertige aux garçons coiffeurs.
'You Yell' , guitare saccadée et fuzzy , basse agressive, drumming heurté et chant fébrile, le fantôme de Sleater-Kinney plane juste sous le plafond.
Elles ne vont pas se calmer, 'Trains' de 2021 dévale à toute allure, t'as pas de ticket, pas de panique, la mafia de la SNCF est en grève.
'Consent' le consentement est un sujet délicat, si elle ne dit pas OUI, tu t'abstiens.
Puis vient 'Minimoi' et sa gymnastique verbale acrobatique, 1 minute 10 secondes plus tard elles t'invitent au voyage ' Viaggio', titre introduit par une méchante basse.
Après ce voyage mouvementé, nous sommes invités à une soirée select, ' Welcome to the feast', t'as pas eu le temps de vider ton Bourbon qu'elles ont enchaîné sur 'Later', introduit par une guitare élastique.
Aucun temps mort, pas de séquence correction du make-up, elles foncent: 'Weather/Surrender' , le bien nommé 'Inferno' et le plombé 'Beautiful Sky' défilent.
Tu te dis que la merveilleuse Alice va devoir absorber une ou deux pastilles pour soigner une gorge éraillée après cette débauche de rage, mais non, le quartet poursuit son périple, voici ' Be a Mom', amorcer par un drumming très peu maternel.
Elle vient de lâcher... I'm so pissed at the human race... , sa copine annonce ' No more regrets', pas la tirade de Arch Enemy, mais un extrait de leur dernier méfait, composé pour toutes les filles ayant décidé de faire de la musique, malgré les réticences de quelques mâles jaloux.
A table...' And the dinner is served', repas avalé en 50 secondes, bien mâcher avait dit le doc, tu parles, pas le temps de mastiquer!
'How old am I'?
Aucune idée, 15 ans...
Wrong: twenty-five!
Tout de même.
De plus en plus hargneux ...I don't like you... pour dénoncer le harcèlement, la culture du viol, voici le virulent et vindicatif ' Sacrificed'.
On approche du terme ' Watch me disappear' et 'Pheasant' nous conduisent au bout des 35' d'un show revigorant.
Saint-Brieuc les rappelle, elles proposent ' Fool Moon', et t'as bien lu, pas de pleine lune!
Game over!
Bye, bye, Mary Bell: le pendant parisien de Bikini Kill, Slant 6 ou Julie Ruin!
Frustration!Cela fait plus de 20 ans que Frustration exprime rancoeur et ressentiment sur toutes les scènes de la planète!
Les infatigables postpunkers, coldwavers , originaires d'une ville qui va accueillir une grande foire, baptisée Jeux Olympiques, viennent de sortir un nouvel ouvrage ( Our Decisions), ce qui nous vaut cette tournée, avec une double escale en Bretagne.
22:15
Fabrice Gilbert ( chant), Mark Adolf ( drums), Fred Campo ( synthé, keys, drumpad,, chimes), Pat Dambrine ( basse) et vise ma veste de combat à capuche, Nicus Duteil ( guitare), quittent les coulisses pour entamer leur speech draconien.
Pat et Fred lancent la machine sur une texture post-punk typique, pense à Killing Joke, sans le côté blagueur, ' Path of Extinction' qui ouvre le dernier né est sur les rails, en entendant ... I used to walk in the land of joy... suivi par un riff de guitare qui lacère profond, t'as vite compris que ce soir on ne va pas nous servir un biberon d'eau sucrée, ça va faire mal, très mal,.
Faut regarder attentivement les mimiques théâtrales du brave Fabrice et l'aspect inquiétant du guitariste pour saisir que c'est pas une histoire d'enfants de choeur.
'State of Alert' , niveau urgence attentat, tous aux abris .
Chant saccadé, guitare acérée, basse et drumming compacts et quelques picotements de synthé, les patrouilles vigipirates sont en place.
Une intro synthétique lance le plus ancien ' It's gonna be the same' , aux sonorités saturées, enrobées d'une caresse sur les clochettes tubulaires, pour faire plaisir à Mike Oldfield.
Basse syncopée, drumming acrobatique, chant inquiétant et riffs métalliques, 'Pepper Stray' vient nous aveugler avant un coup de frein, après lequel Fabrice part en parlando.
Le feu repasse au vert et la machine folle s'emballe, colle-toi contre les façades si tu veux éviter d'être éclaboussé
Ambiance sombre à la Joy Division sur 'We miss you' , batterie martiale, basse balèze, riffs meurtriers et chorus boy - scouts sous amphétamines, c'est pas du disco, messieurs les Stones!
Un premier envahisseur escalade le podium sur un des classiques du band, ' No Trouble', comme le mec est inscrit à l'épreuve haut-vol à 10 mètres à La Plaine Saint-Denis, il nous fait une démonstration de son savoir-faire et pourtant il risque d'être disqualifié pour tenue inadéquate!
Puis vient le seul titre en français de la soirée, le magnétique 'Le Grand Soir' . Derrière toi, dans les tranchées, ça s'agite sérieusement, quelques coups de coude se perdent, les photographes craignent pour leur matos.
Question pour François Villeroy de Galhau: ' When does a banknote start to burn?'
Après ce titre coup de poing en pleine tronche, c'est 'Excess' qui déboule et relance le pogo entamé il y a 10 minutes, la basse de Pat tournoie dangereusement, tandis que Fabrice et Nicus dialoguent spasmodiquement.
Dans post -punk , il y a punk, et les excès, les punks, ils connaissent!
Deux nouveaux morceaux pour suivre, qu'il dit: 'Catching your eye' , avec son drumming 656 battements par minute et une danse robotique style Marceau ( pas Sophie, non, le mime) de Fabrice, secoue un max, tandis que 'Riptide' à l'intro funèbre fait dans l'indus glacial.
En 2018, Frustration sortait un deux titres sur lequel figurait le brutal ' The Drawback' morceau qui déchire les chairs et les sens tout en excitant davantage les ballerines et kangourous locaux qui ricochent sur un sol inondé de bière et de sueur.
'Nowadays' est tellement nerveux que Mark en perd une baguette, ramassée par le bassiste, elle est renvoyée vers son propriétaire qui la prend en pleine poire.
On approche du terme, les fans l'attendaient, voici l'inquiétant 'Your Body', aussi bestial que certains titres de Death in June.
Un à un, les acteurs s'éclipsent en nous laissant pantois.
30 secondes d'attente, les revoilà pour nous servir trois bombes: ' Dreams, Laws, Rights and Duties' , 'Too many questions' qui voit Thérèse ascensionner le mont chauve et se taper un stage diving audacieux et, enfin, 'Blind' pour lequel Nicus te tend son micro pour que tu puisses chanter le refrain à l'aveugle.
Pat a disparu dans la foule armé de sa basse, c'est la folie dans la salle, faudra un second retour de la troupe afin d'éviter l'émeute.
L' hymne ' We have some...' frustration ... chanté par une centaine de gosiers, était magistral!
Morale: faudrait envoyer Frustation pour la cérémonie d'ouverture des Jeux et on oublie les polémiques!