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Philippe de Villiers et le nouveau Yalta

Publié le 25 mars 2024 par Sylvainrakotoarison

" Je fais pousser des tomates qui partent en Ukraine. Et je consomme chez moi des tomates qui en viennent. Les camions se croisent, c'est le voyage en Absurdie. " (Philippe de Villiers, 2015).

Philippe Villiers nouveau Yalta

Simplement pour signaler que le 14 août 2014, Philippe de Villiers a rencontré le Président de la Fédération de Russie
L'ancien sous-ministre Philippe de Villiers fête son 75 e anniversaire ce lundi 25 mars 2024. C'est l'occasion de revenir sur sa trajectoire assez hors du commun pour une personnalité politique. Mais d'abord, pourquoi un nouveau Yalta ?
Vladimir Poutine à Yalta. Il faut rappeler le contexte : la Russie avait déjà annexé la Crimée (depuis cinq mois) et avait encouragé la guerre dans le Donbass, contre toutes les conventions internationales.
Qu'était venu chercher le créateur du spectacle du Puy du Fou ? Un nouveau client. La Russie appâte toujours ses futurs amis "occidentaux" par des intérêts pécuniaires bien compris. Vladimir Poutine voulait renforcer l'identité russe en Crimée et Philippe de Villiers lui proposait une adaptation de son spectacle pour la Crimée et une autre pour Moscou. À cette occasion, il a fait une déclaration d'amour publique à Vladimir Poutine, considéré comme " un vrai chef d'État, patriote, cherchant à restaurer les valeurs politiques, culturelles et morales de la grande Russie ", ajoutant : " Le fait que Poutine ait souhaité implanter en Russie des parcs sur le modèle du Puy du Fou plutôt que des parcs d'attractions sur le modèle américain témoigne, lui aussi, de son attachement à l'âme de son pays. Il est l'homme qui fait sortir la Russie de l'ère communiste et qui lui rend sa grandeur. Pendant qu'en Europe il s'ouvre un McDonald's par jour, il se construit une église orthodoxe par jour en Russie. Poutine est assurément le plus grand chef d'État actuel. ". Neuf ans plus tard, Vladimir Poutine massacre allègrement les Ukrainiens depuis deux ans, en tue des centaines de milliers, en déplace des millions dans une Europe déstabilisée et un monde au bord d'une nouvelle guerre apocalyptique.
Le fait de faire ce qui lui plaît n'est pas nouveau. S'il fallait caractériser l'homme, c'est la liberté qu'il faudrait lui reconnaître, l'indépendance et la liberté politique qui en ont fait un électron libre récurrent de la vie politique française. Il est connu pour son spectacle du Puy du Fou et c'est sans doute la plus grande réussite de son existence, une manière de mobiliser l'histoire autant qu'une foule de bénévole pour un spectacle populaire qui reste aujourd'hui l'un des plus grands succès. Et cela au prix d'une certaine réécriture idéologique de l'histoire selon des historiens.
Marie-France Garaud.
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Le Front national des Le Pen, 50 ans plus tard... François Léotard, secrétaire général du Parti républicain (PR), composante de l'UDF, mais aussi Ministre de la Culture et de la Communication du premier gouvernement de la cohabitation dirigé par Jacques Chirac, a fait appel à lui pour comprendre les milieux culturels. Le voici nommé Secrétaire d'État à la Culture le 20 mars 1986, peu avant ses 37 ans. François Léotard était un peu implanté avec son frère Philippe Léotard, mais il avait surtout espéré la Défense (qu'il a obtenue en 1993).
Philippe de Villiers avait deux atouts : son savoir-faire culturel et son diplôme de l'ENA (il était dans la même promotion que François Roussely et Gérard Mestrallet), il a effectué son stage de l'ENA à la préfecture de Corrèze. Le tandem a très mal fonctionné, François Léotard tempérant ses ardeurs à droite pour tenter de recueillir l'adhésion d'un milieu principalement de gauche tandis que Philippe de Villiers, ultra anti-gauche, souhaitait des mesures politiques fortes dans le domaine culturel. Il a pris l'occasion d'un événement particulier pour s'échapper du gouvernement.
Cet événement est la mort de Vincent Ansquer, député RPR de Vendée et ancien ministre. Philippe de Villiers a été l'héritier de cette personnalité en tant que suppléant et successeur : il est devenu député de la Vendée le 2 juin 1987 (quatrième de la liste UDF-RPR en Vendée qui avait obtenu trois sièges), et aussi conseiller général de la Vendée sur le canton de Vincent Ansquer le 6 juillet 1987. Il fut réélu de ces deux mandats respectivement en juin 1988 et en septembre 1988. Dès lors, sa carrière politique était lancée, durablement et surtout, de manière autonome.
Certes, au début, il était au PR, et a soutenu la candidature de Raymond Barre à l'élection présidentielle. Au printemps 1989, il faisait partie des Douze rénovateurs, ces jeunes Turcs de la droite qui voulaient mettre à la retraite Jacques Chirac et Valéry Giscard d'Estaing (respectivement présidents du RPR et de l'UDF), parmi lesquels on comptait : François Bayrou, François Fillon, Bernard Bosson, Dominique Baudis, Philippe Séguin, Michel Noir, Michel Barnier, Charles Millon, Alain Carignon, etc.
Mais au fil des années qui ont suivi, notamment avec le Traité de Maastricht, il est devenu de plus en plus anti-européen au point de créer son propre parti, le MPF, Mouvement pour la France (pour faire comme le RPF de De Gaulle), et les relations entre le MPF et la droite traditionnelle ont toujours été assez troubles, alliance localement, car il était un véritable seigneur de la Vendée, président du conseil général de Vendée du 3 octobre 1988 au 31 octobre 2010, date de sa démission pour raison de santé (une sale maladie à laquelle il semble avoir réchappé), mais parfois opposition frontale jusqu'à des élections nationales (européennes, présidentielles).
Sous-préfet de l'arrondissement de Vendôme en 1981, il a démissionné pour refuser de servir le gouvernement socialo-communiste. Il fut alors dans de nombreux projets culturels, comme l'animation d'une radio locale, profitant justement de la libéralisation des ondes permise par la gauche ! Il a créé aussi un journal, une école de communication, en plus de ce grand spectacle du Puy du Fou bien sûr. Si l'homme est un dilettante en politique, il ne l'est pas pour le reste. Au contraire, c'est boulimique de travail. Auteur de plus d'une trentaine d'ouvrages, essentiellement historiques et politiques (parfois qui disent n'importe quoi, franchissant largement les limites du complotisme, mais, bon, il a le droit d'écrire ce qu'il veut quand cela n'enfreint pas la loi), il a toujours balancé entre ses passions et son combat politique.
Et son combat politique, il l'a tout trouvé avec l'Europe (il est contre). Sa notoriété politique lui fut acquise avec sa campagne pour le non à Maastricht en septembre 1992 aux côtés de Philippe Séguin et de Charles Pasqua. Au contraire de ces deux derniers restés au RPR, Philippe de Villiers a donc créé le MPF, petit parti personnel et vendéen, à la suite de sa candidature en juin 1994 où il a fait un tabac aux élections européennes (12,3% !) grâce au soutien du milliardaire Jimmy Goldsmith (auparavant, il avait créé Combat pour les valeurs, soutenu aussi par Bernard Debré et Christine Boutin).
Pendant une vingtaine d'années, Philippe de Villiers allait être au RPR ce que Jean-Pierre Chevènement était au PS, à savoir une sorte d'aiguillon souverainiste anti-européen mais relativement acceptable pour des alliances de circonstance avec le parti gouvernemental, une indépendance de position politique et de candidature, une liberté de parole flirtant avec le populisme, tout en excluant toute compromission avec les partis extrémistes. Du moins, jusqu'en 2017, Philippe de Villiers s'est refusé à tout accord ou alliance de circonstance avec l'extrême droite et la famille Le Pen, c'est moins vrai depuis 2017 (soutien à Marine Le Pen en 2017, soutien à Éric Zemmour en 2022).
Philippe de Villiers a donc créé le MPF le 20 novembre 1994 et il l'a dissout le 25 juin 2018 après avoir renoncé à toute continuation de carrière politique. Jusqu'en 2014, il n'a cessé d'alterner entre son mandat de député de Vendée (toujours très bien réélu) et son mandat de député européen, au gré des scrutins (tout en gardant la tête de la Vendée). À l'occasion, son suppléant le remplaçait à l'Assemblée Nationale, qui n'était autre que Bruno Retailleau, également son successeur en 2010 à la présidence du conseil général de Vendée (également futur président du conseil régional des Pays de la Loire).
L'année suivante, Philippe de Villiers s'est présenté à l'élection présidentielle de 1995, et il faut le noter, il était le seul candidat qui avait appartenu à l'UDF (ce dernier parti n'ayant eu aucun candidat issu de ses rangs). Toutefois, la présidentielle est plus sérieuse que les européennes, les Français y participent beaucoup plus et sont plus prudents dans leur choix. Soutenu par Marie- France Garaud, Philippe de Villiers n'a recueilli que 4,7%, en dessous du seuil de 5% qui lui permettait le remboursement de ses frais de campagne.
Son meilleur score national, Philippe de Villiers l'a dû à son alliance avec Charles Pasqua aux élections européennes suivantes, en juin 1999, où le duo a obtenu 13,1%, dépassant la liste de Nicolas Sarkozy. Mais le duo s'est séparé dès 2000. En 2002, il a renoncé à une candidature à l'élection présidentielle, probablement pour des raisons financières. En 2004, il a obtenu 6,7% aux élections européennes, puis, il a fait campagne pour le non au TCE au référendum de mai 2005. Dans la foulée de la victoire du non, il s'est présenté une ultime fois à l'élection présidentielle de 2007, mais ce fut de nouveau un échec avec seulement 2,2% des voix (toutefois, 11,3% en Vendée). En juin 2007, il ne s'est plus présenté aux élections législatives, son mouvement MPF s'est même intégré à l'UMP sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy (entre 2009 et 2012), et en juin 2009, il s'est fait réélire député européen avec une moyenne de 4,8% au niveau national (le scrutin a été séparé en plusieurs grandes circonscriptions entre 2004 et 2014).
Les thèmes de campagne ont changé à l'élection présidentielle de 2007. Délaissant l'anti-européanisme primaire, Philippe de Villiers a surtout attaqué la supposée islamisation rampante de la société française et la supposée forte immigration, laissant peu d'ambiguïté sur le caractère xénophobe de son positionnement et sa compatibilité idéologique avec l'extrême droite. Cela ne l'a pas empêché d'être intégré dans la majorité présidentielle par Nicolas Sarkozy qui souhaitait une large alliance des droites aux élections régionales de 2010.
Parmi les personnalités qui l'ont rejoint au MPF, il faut donc noter Bruno Retailleau (qui n'a pas eu l'autorisation de Philippe de Villiers pour siéger au sein du gouvernement de François Fillon en janvier 2009), mais également Jimmy Goldsmith, Thierry Jean-Pierre (le célèbre juge d'instruction), Charles De Gaulle (fils de l'amiral Philippe De Gaulle et petit-fils du Général De Gaulle), Jérôme Rivière, Guillaume Peltier (ex-FN, futur député LR et actuel proche d'Éric Zemmour), Paul-Marie Coûteaux, Patrick Louis, Henry de Lesquen, Jacques Bompard, Nicolas Bay, etc.
Peut-être faut-il lire la prose d'anticipation de Jérôme Garcin dans "L'Événement du jeudi" du 29 novembre 1990 pour mieux comprendre l'existence politique de Philippe de Villiers : " Don Quichotte maurrasiien et pauwelsien louvoyant entre une extrême droite que l'honneur lui interdit de rejoindre et un libéralisme dont la dignité lui impose de railler la prudence consensuelle. (...) C'est bien connu : rien ne favorise mieux le lyrisme littéraire que les croisades inutiles lancées contre des moulins à vent au nom d'une morale d'escalier. Ça ne mange pas de pain et ça peut rapporter gros. ".
L'ami de Reconquête.
Philippe de Villiers.

Philippe Villiers nouveau Yalta


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