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Louange des mousses de Véronique Brindeau

Par Etcetera
Louange mousses Véronique Brindeau

Ce livre m’a été offert par mon amie Pascale, grande spécialiste de la littérature japonaise, et j’étais d’abord très intriguée et étonnée par le titre et le sujet de cet essai. J’avoue que ma première réaction fut de me dire : « Un livre sur la mousse ! Comme c’est bizarre ! Qu’est-ce qu’il y a donc de tellement spécial à raconter sur les mousses ? ». Et puis, dès les premières pages j’ai été complètement captivée et charmée ! Déjà par l’écriture subtile et raffinée de Véronique Brindeau et par la beauté des photos qui accompagnent son texte – mais aussi par la richesse du contenu : cette ouverture vers la pensée et la culture nippones, dans toutes leurs finesses, leur spiritualité et leur sens esthétique. 

Note Pratique sur le livre 

Éditeur : Philippe Picquier 
Année de publication : 2018
Genre : Essai littéraire 
Nombre de pages : 110

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Un Extrait de la Quatrième de Couverture

C’est au Japon que l’on cultive et admire les mousses modestes, que l’Occident ignore si souvent.
En elles se lisent l’éternité des dieux, la constance du cœur, l’accord avec le temps qui passe et se dépose sur les pierres.
Entrer dans l’univers des mousses, c’est accéder à ces valeurs fondamentales de l’esthétique japonaise : sobriété, naturel, goût pour la patine et les marques du temps que l’on nomme sabi, simplicité élégante et teintée d’archaïsme, doublée d’un attrait pour la quiétude et le retrait du monde que l’on nomme wabi.
(…)

Résumé et Avis

En Occident les jardiniers pourchassent généralement les mousses (envahissantes et nuisibles pour les gazons) mais au Japon on les cultive très volontiers et avec beaucoup de respect. Chez les japonais on distingue ainsi plusieurs centaines de noms différents pour les mousses alors qu’en Europe la terminologie est très limitée. 
La mousse est souvent présente au pied des bonsaïs : ce dernier a besoin d’être taillé par le jardinier tandis que la mousse s’adapte à toutes les échelles. 
L’écrivaine fait une très jolie comparaison entre la mousse et la neige : les deux enveloppent les objets en arrondissant les formes, en adoucissant les contours et les deux confèrent aux paysages la même sorte de magie.
Véronique Brindeau nous parle de plusieurs jardins japonais célèbres, souvent attenants à des édifices religieux, dans lesquels cet élément végétal a une importance primordiale : ainsi, à Kyoto, Le Temple des mousses, ou Le Jardin des mousses à Komatsu, ou encore à Ôhara le temple Sanzen.in, et d’autres encore.
Bien qu’il soit question, dans ce livre, de végétaux et de paysages, il faut préciser que ce n’est pas du tout un manuel pratique pour confectionner vous-mêmes votre jardin japonais. Ici, il s’agit surtout d’une rêverie poétique, d’un essai littéraire finement ciselé, d’une flânerie dans l’âme japonaise, et c’est ce que j’ai particulièrement apprécié !
Je conseillerai très chaudement ce livre aux amateurs de belles écritures, aux esprits rêveurs et méditatifs, ou encore, bien sûr, aux amoureux du Japon.
 

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Un Extrait page 39

La mousse est un bonsaï naturel : nul besoin de taille, puisque notre regard peut en changer l’échelle. Une forêt entière se condense dans si peu, dès lors que nous modifions l’importance que nous accordons à notre propre personne. En quoi l’art des jardins japonais, des bonsaïs et des paysages de mousses en bassin rejoint peut-être, en quelque manière, le commencement du monde tel que l’entrevoient les scientifiques, fait de quelques instants pour des années-lumière à venir et d’une matière concentrée en une infime partie de l’univers qu’elle deviendra.

Un Extrait page 46

Cette dilatation propagée en une nappe de velours, seuls les jardins de mousse du Japon la révèlent pleinement, en une aura d’autant plus magique que rien ne nous prépare à une telle expérience, ni souvenir de paysage ni tableau peint. Étale, la mousse l’est alors à la manière d’un drapé qui recouvre tout, jusqu’aux racines des arbres dont le relief en est adouci et rehaussé à la fois. Il faut avoir parcouru les allées de ces jardins, dans un monde où l’omniprésence du vert vous plonge dans un état de rêve et de silence, pour sentir à quel point la mousse y semble un souffle exhalé du sol, posé tel une brume, et dont on sent bien, sans rien connaître de son écologie, qu’aucun lien ne l’attache à la terre dans la profondeur d’un enracinement. Ce lien qui n’est pas un ancrage mais s’apparente plutôt à une apposition, une coexistence, c’est un ensemble de minces filaments appelés rhizoïdes par lesquels la mousse s’accroche au sol mais à peine, un sol dont elle ne tire d’ailleurs pas foncièrement sa substance : de cela le ciel se charge, pluie et rosée, avec la lumière – et la richesse de la terre ne lui est pas utile, puisqu’elle pousse aussi bien sur les écorces ou les pierres.


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