26 février 1564, Canterbury, (Kent) : naissance de Christopher Marlowe, poète, dramatuge et traducteur.
Fils de cordonnier, il passe pour avoir vécu une enfance troublée par les problèmes financiers et par les violences auxquelles les hommes de sa famille semblaient se livrer couramment.
La bourse qu'il obtint pour suivre des études prouverait - dans la vie de Marlowe, beaucoup de choses sont à prendre au conditionnel - qu'il était primitivement destiné à prendre les ordres car les autorités du collège où il était inscrit n'acceptaient comme boursiers que les futurs pasteurs.
A Cambridge, où il fut fait bachelier, une controverse eut lieu pour savoir si, oui ou non, il fallait lui accorder le diplôme. En violation de toutes les règles en effet, Marlowe s'absenta pendant de longues périodes et se rendit notamment à Reims. Les rumeurs comme quoi il appartenait à un réseau d'espionnage aux ordres d'Elizabeth Ière se mettent à courir dès cette époque.
De fait, c'est sur intervention du Conseil privé de la Reine que Marlowe finira par obtenir son diplôme ...
Marlowe était encore étudiant lorsqu'il traduisit Ovide et Pindare. En parallèle, il s'adonnait déjà à la versification pour son propre compte et, bien qu'il ne l'ait pas inventé, on peut dire que c'est lui qui amena le "blank verse"* à son plus haut niveau.
Tout naturellement, il se tourna vers le théâtre où tout lui promettait une belle carrière si, peu à peu, la certitude de son athéisme ne s'était imposée à l'opinion publique.
Jusqu'ici pourtant, une étude attentive des oeuvres de Marlowe n'a pas permis d'établir qu'il ne croyait pas en Dieu. A la limite, on peut le considérer comme agnostique mais rien de plus. En revanche, comme nombre de personnalités de l'époque, il s'intéressait énormément aux sciences et aux théories nouvelles.
Il frayait donc avec une société dont tous les membres n'étaient pas des plus recommandables. Une ou deux fois d'ailleurs, il échoua en prison pour comportement douteux en état d'ivresse et même tentative de meurtre.
A l'époque, la violence était vécue au quotidien et si l'on prête à Marlowe certains actes, il ne faut pas oublier que Ben Jonson, par exemple, se rendit, lui, sans aucun doute possible, bel et bien coupable d'un meurtre.
Une chose est sûre : pour des raisons sur la nature desquelles on ne fera jamais réellement la lumière, un rapport accusant le poète d'athéisme, de blasphème et d'homosexualité était déposé devant le Conseil privé le jour même de son assassinat.
Déjà, le 12 mai, Marlowe avait été dénoncé par un ami (soumis à la torture, il est vrai) comme athée convaincu. Le 18 du même mois, il se trouvait chez le responsable des Services secrets de la Reine lorsqu'on vint l'arrêter. Mais il fut libéré le 30 mai, aucune preuve n'ayant pu être retenue contre lui.
Marlowe partit sur le champ faire la fête chez une veuve joyeuse de ses connaissances, Eleonor Turnbull. Il emmenait avec lui trois compagnons dont son futur meurtrier : Ingram Frizer.
Le soir, une querelle éclata, Marlowe sortit sa dague et, dans la mêlée, Frizer, peut-être pour retourner une attaque, la lui planta dans l'oeil. Le coup était mortel : Marlowe décéda dans la nuit. Il avait 29 ans.
De son talent, il ne nous reste que ses traductions et ses poèmes ainsi que quelques pièces, dont "Tumberlaine", sur la vie de Tamerlan, et le "Doctor Faustus."
Par son utilisation du monologue intérieur, par les questions existentielles qu'il se pose, Marlowe entretient un rapport étroit avec son contemporain, William Shakespeare.
Pourquoi ne pas vous en faire une idée en jetant un coup d'oeil sur son oeuvre ou, à défaut, en lisant une bonne biographie ? ;o)
- : le "blank verse" est un vers de dix pieds qui comporte une syllabe brève suivie d'une longue accentuée. C'est le comte de Surrey qui créa cette forme en 1540 dans sa traduction de l'"Enéide."