Vers la fin de la journée, j'écoute le Telejornal à RTP. En direct de Lisboa, je tente de comprendre le présentateur - mon portugais est assez rudimentaire, disons. Je suis aidé par divers sous-titres ou citations qui défilent au bas de l'écran - le portugais est parfois assez proche du français ou de l'espagnol pour que ça puisse généralement s'interpréter à la lecture (faute de comprendre la prononciation, très difficile à maitriser).
Côté nouvelles, c'est pas très dépaysant, ni très jovial. Les portugais dénoncent l'inflation, les profits des grandes entreprises, dont les pétrolières et les banques, dont les milliards de profits et les bénéfices records font les manchettes. On parle aussi des loyers en hausse, de la crise du logement... le chef d'un des partis d'opposition promet un médecin de famille à tous les portugais d'ici 5 ans s'il est élu, et il promet aussi des baisses d'impôts. Il y a aussi un dossier en cours sur les abus sexuels de l'église catholique.Same same but different, comme disent les vietnamiens.
Sinon, nous sommes en pleine campagne électorale pour les élections législatives. Ce qui distingue l'arène politique du Portugal par rapport à celle du Québec (ou du Canada?): le nombre de partis impliqués. Il y en a tellement que je ne suis pas encore arrivé à tous les compter, encore moins m'y retrouver dans le spectre gauche-droite qui est composé de divers joueurs. PSD, PCP, BE, AD, CHEGA, PS, IL, PAN, et j'en passe. Pas facile de s'y retrouver, surtout quand on comprend un mot sur deux à la lecture et environ un sur dix à l'écoute! Pour le moment, je crois avoir au moins compris que BE, PAN et PS sont plutôt de gauche (je soupçonne le BE et PAN d'être plus à gauche que le PS). Le PCP, AD sont de droite, avec CHEGA à l'extrême-droite. Difficile pour moi de situer les autres (PSD, IL et quelques autres dont j'oublie l'acronyme).
Mais la RTP prend ça au sérieux, les élections, alors il y a beaucoup de nouvelles sur les positions de chaque parti, et il y a beaucoup d'extraits (très longs) des opinions des chefs, en plus de très nombreux débats de type face à face (un chef contre un autre; les combinaisons sont quasi illimitées). Ce qui est rigolo - si on préfère en rire qu'en pleurer, c'est que tout ça est pareil à chez nous; un parti appelle au vote utile, un autre dénonce les promesses irréalistes d'un troisième, qui accuse le quatrième de misogynie; c'est désespérant de voir à quel point la politique ressemble à la politique et que tout le monde fait la même chose, applique les mêmes recettes les mêmes formules... Il n'y a que le décor et la langue qui change. On remarque donc beaucoup de similitudes; un parti de gauche qui a une porte-parole, face à un parti de centre-droite qui a un président, d'ailleurs accusé de dévaloriser le rôle des femmes (selon le parti de gauche).Hors du champs direct des élections, il y a cette affaire de corruption à Madeira qui occupe l'espace public, de même que les élections qui ont déjà eu lieu la semaine dernière aux Açores et où c'est l'impasse car le parti (une coalition de droite) qui a remporté le plus de siège n'a pas obtenu de majorité et ne peut obtenir la confiance de la chambre car le parti de gauche refuse de l'appuyer et que la coalition n'est pas prête à rencontrer les "conditions" du CHEGA (extrême-droite) pour recevoir son appui. Les 3 autres partis n'ont pas assez d'élus pour faire une différence. Malgré ça, sur le continent, on répète que les gouvernements minoritaires sont idéaux car ils permettent une meilleure représentativité de l'électorat et évitent les majorités absolues qui donnent trop de pouvoir. On associe même les majorités absolues au chaos ici, probablement la plus grande différence entre le discours politique local et ce qu'on entend au Québec ou au Canada.
Comme je n'ai pas eu le loisir d'acheter un journal (papier) local (ce que j'avais l'habitude de faire en séjour prolongé dans un même pays dont je suis capable de lire la langue en partie), je ne peux guère me faire une opinion sur les sujets abordés au Telejornal. Reste que l'exercice linguistique vaut quand même la peine et l'effort intellectuel est stimulant.
Ah, oui, j'ai presque oublié, la RTP, c'est la Rádio e Televisão de Portugal, bref, le diffuseur public (pensez SRC au Québec/Canada). N'ayant accès qu'à quelques postes de télé sur une antenne, c'est celui qui m'a semblé le plus fiable pour prendre le pouls du pays par les nouvelles télévisées.
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