Hemley Boum est une autrice camerounaise qui a publié en 2010 son premier livre Le clan des femmes. Elle publie son dernier roman Le rêve du pêcheur.
L'histoire débute à Campo, petit village de pêcheur. Pourquoi le choix de ce lieu ? C'est un petit village au sud est du Cameroun au bord de l'Atlantique en face d'autres pays. Des allemands y ont vécu puis les français et les anglais, c'est un lieu de rencontres, et cela s'entend avec la langue. J'étais de passage à Campo et j'ai découvert cet endroit sublime, sauvage, saisissant et profondément romanesque. Le lieu est venu avant le personnage, quand je suis arrivée en fin de soirée, les pirogues rentraient de la pêche, et le pêcheur est né de cette vision. Je suis restée quelques jours et j'ai compris ce qu'était ce lieu.
Votre roman est-il une dénonciation de cette mondialisation qui tue à petit feu le travail des pêcheurs ?
Je suis romancière, j'écris sur les gens , je veux leur donner une consistance, et je regarde l'impact des évènements sur eux. On ne peut pas démondialiser, on ne peut pas fantasmer un passé révolu, on peut juste constater l'impact sur les gens. La question est de savoir ce que nous faisons de ce qu'on a puisque il est impossible de revenir en arrière.
Zackary est un être de mémoires ? Je parle plutôt d'archivage, les histoires s'inscrivent en nous sans qu'on en soit conscient. Zackary aurait pu mourir mais quelque chose en lui l'a poussé vers autre chose vers une lumière qui est une intuition ? Ou autre chose, on ne sait pas...L'amour provoque cette intuition chez Zack. Il doit reprendre possession de lui-même et de sa vie en revenant vers ses racines.
La vie est dure pour les rêveurs, le chemin n'est pas simple. Les contrariétés du destin seront aussi sa chance.
J'ai souhaité formé deux destins en miroir, c'était important pour moi pour montrer combien on porte en soi un héritage et il faut savoir ce qu'on transporte en soi, trouver des réponses aux questions pour se retrouver.
Les femmes sont elles fortes et les hommes lâches dans votre roman ?
Non, les uns et les autres sont plus nuancés. Yalana est brutale avec sa fille, Dorothée est absente et est même dangereuse pour son fils. Julienne est faible aussi, car quand son homme vacille, elle lui dit qu'il peut partir. Elles restent malgré tout, elles sont là elles ne fuient pas, même quand elles partent, elles reviennent c'est ce qui permet aux hommes d'être sauvés car ils peuvent revenir. Je voulais des hommes aimés et je voulais qu'ils aient des filles. Les femmes font ce qu'elles doivent, elles protègent les leurs. Sans la communauté, elle n'est rien.
Je vous invite à découvrir ce beau roman qui ancre les destins dans la terre !