Paula Ringer ‘ Le féminisme en dix chansons

Le moment où j’ai enfin tilté sur la différenciation entre artistes féminines et masculins, ce fut grâce à Björk qui, parce qu’elle en avait marre qu’on lui rappelle sans cesse le noms des artistes avec lesquels elle avait travaillés, avait fini par se plaindre du fait qu’on n’en faisait jamais autant avec Kanye West à qui tout était dû alors que, le concernant, il ne serait pas qui il est sans toute la horde de producteurs qui gravitent autour de lui. Loin de critiquer celui qui se prend pour Dieu sur Terre, l’artiste islandaise en avait marre de cette injustice de considération basée à ses yeux sur le fait qu’elle est une femme – et qu’une femme ne peut y arriver seule et doit tout aux autres, et donc aux hommes.

De son côté, Paula Ringer, après avoir de longues années suivi la scène punk féministe, a consacré un essai sur Le féminisme en dix chansons, publié en 2023 aux Éditions de la variation. Pas si éloignée de Björk qu’il n’y paraît dans ses choix musicaux (en effet, n’oublions pas les premiers groupes dans lesquels la chanteuse islandaise s’est d’abord faite connaître, en particulier les Sugarcubes, groupe rock alternatif dont l’esprit punk est indéniable), l’écrivaine va nous parler tour à tour de Sonic Youth, Peaches, Bikini Kill, Le Tigre, The Raincoats, The Slits, Brigitte Fontaine & Areski Belkacem, Orchidée & Agnès Varda, à nouveau Brigitte Fontaine puis Gina Birch.

Pourquoi ai-je eu envie de lire cet essai ? Au-delà de la thématique double – féminisme et musique – la présence de Peaches m’a de suite interpellé. Je connais l’artiste canadienne depuis longtemps, elle et sa musique qui oscille entre rock et électronique, avec un esprit punk audible – et visible ! – à des kilomètres à la ronde.

Mais plutôt que de vous parler de « Boys wanna be her », le second choix de Paula Ringer pour cet essai passionnant, je vais vous ouvrir l’appétit avec la toute première chanson, laquelle est étroitement liée à la seconde je trouve. Il s’agit donc de Sonic Youth avec leur chanson « Flower » et sa chanteuse Kim Gordon (qui fera justement un duo avec Peaches en 2015). La rencontre de Kim Gordon et Thurston Moore, le lien avec Karen Carpenter (du duo culte The Carpenters qu’elle formait avec son frère), Kim Deal (membre des Pixies et fondatrice des Breeders), le MC5… Il faut « repenser la masculinité et faire en sorte qu’éclose la fleur de l’homme ».

Le féminisme en dix chansons est un essai simple, direct et touchant. Et, je l’avoue, frustrant : on en aurait voulu davantage encore !

(in Heepro Music, le 01/02/2024)

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