En grande difficulté sur le plan international avec aucune de ses joueuses présentes dans le top 200, la Thaïlande, qui voit la plupart de ses jeunes talents s'expatrier dans les universités américaines, faute de moyens sur place, peine à exister dans le milieu du tennis professionnel. Tout n'est pas perdu pour autant grâce à cinq joueuses dont le potentiel pourrait tirer vers le haut un pays caché dans l'ombre d'un imposant voisin chinois en pleine émancipation.Depuis sa première édition datée de 2017, l'Open féminin de Thaïlande, organisé à Hua Hin (WTA 250), est le révélateur de l'état de santé fragile dans lequel se trouve le tennis féminin dans ce pays de plus de 70 millions d'habitants. Alors que le tournoi a débuté le 29 janvier, le constat est alarmant : aucune joueuse locale n'est parvenue à se qualifier pour le deuxième tour dans le tableau principal, tandis que trois autres n'ont pas réussi à sortir des qualifications. La Thaïlande est orpheline de son icône, Tamarine Tanasugarn, retraitée depuis 2016, et qui fut le porte-drapeau de tout un peuple à la fin des années 90 et durant les années 2000 en ayant atteint notamment les quarts de finales à Wimbledon en 2008. Aujourd'hui, son ombre est encore très présente mais, beaucoup moins que celle de la Chine, voisin très en vue avec sept joueuses dans le top 100 à la WTA et qui revoit ses ambitions nettement la hausse depuis l'épopée de sa numéro une nationale Qinwen Zheng à l'Open d'Australie, finaliste du tournoi et nouvelle membre du top 10. Avec des moyens bien plus modestes que ceux de la chine, notamment dans les infrastructures, et malgré les efforts louables de sa fédération, la Thaïlande éprouve toutes les difficultés à sortir de l'ornière.Cependant, ne soyons pas pessimistes pour autant malgré ce tableau peu avantageux. Nous allons voir que le pays possède un indéniable réservoir de talents et que, malgré les obstacles rencontrés, il existe un espoir, certes mince mais bien présent, de voir un jour des joueuses thaïlandaises suivre les traces de leur aînée Tamarine Tanasugarn.Mananchaya Sawangkaew en fait partie. Excellente junior (elle avait atteint le quatorzième rang en 2019), elle avait ensuite choisi la voie du tennis universitaire en rejoignant Oklahoma State. Depuis, cette native de Singburi, dans le centre de la Thaïlande, a pleinement embrassé une carrière professionnelle qui lui a permis de franchir une étape importante en intégrant le top 250 à la WTA. Victorieuse de son premier tournoi pro alors qu'elle n'était encore qu'une jeune adolescente, Sawangkaew a ensuite tracé sa route sur un circuit secondaire dont elle est devenue friande. Plusieurs fois finaliste en 2023, et même victorieuse dans son pays natal à Nakhon Si Thammarat (W25), elle a commencé la nouvelle année à grande vitesse en gagnant à Nonthaburi (W50) le 14 janvier dernier. À seulement vingt-et-un ans, elle possède les qualités nécessaires pour viser au moins le top 200 cette année, pourquoi pas les 150 premières.Lanlana Tararudee est un peu plus jeune, dix-neuf ans, et a bien failli causer une énorme surprise lundi dernier lorsqu'elle parvint à prendre un set à Paula Badosa au premier tour du tournoi de Hua Hin. Bien avant cela, elle gagnait pas moins de treize tournois chez les Juniors entre 2018 et 2022. Sa transition chez les professionnelles fut alors spectaculaire avec quatre tournois ITF glanés l'année dernière dont deux W40 à Nonthaburi et Nanchang où elle occasionna de gros dégâts dans les rangs chinois. On la vit même à Melbourne cette année défendre ses chances en qualifications où elle prenait un set à la française Jessika Ponchet au premier tour. Son ascension a été fulgurante. De 758e fin 2022, elle monta au 232e rang à la WTA fin 2023. À vingt-deux ans, Thasaporn Naklo a elle aussi connu une forte progression. 27e mondiale en catégorie Juniors en 2019, elle fut un temps dans les rangs de l'université d'Iowa State avant de commencer à voler de ses propres ailes. Le cap le plus important franchi à ce jour est une victoire l'année dernière au tournoi de Shenzhen (W40), le plus beau de ses trois succès. En WTA, l'expérimentée kazakhe Yulia Puntintseva a dû s'employer pour la sortir deux manches à une au premier tour à Hua Hin. Une défaite que l'on pourrait qualifier d'encourageante pour cette native de Bangkok qui possède une marge de progression très intéressante.Dans les rangs juniors, il semblerait que l'avenir de la Thaïlande passe par Lidia Podgorichani (photo ci-dessus). Après une année 2023 vierge de tout titre, la jeune femme de seize ans a retrouvé le chemin de la victoire ce mois-ci, et de fort belle manière, en gagnant le tournoi J200 de New Delhi aux dépens de la russe Maria Golovina, soit sa plus belle victoire à ce jour sur le circuit des dix-huit ans et moins. Désormais 70e au classement juniors, elle va pouvoir rentrer plus facilement dans les tableaux principaux et continuer son apprentissage du tennis professionnel qu'elle a déjà côtoyé à plusieurs reprises depuis 2022. Du même âge que Lidia Podgorichani, Kamonwan Yodpetch gravit avec patience les échelons. Avec deux titres dans le panier l'année dernière sur le circuit Juniors, auxquels il faut ajouter une place de quart de finaliste aux derniers championnats d'Asie Juniors, la thaïlandaise a voyagé, posant ses valises à Bradenton (J300) et Plantation pour l'Orange Bowl (J500), avant de participer cette année aux qualifications de l'Open d'Australie dans sa catégorie d'âge. Entre-temps, elle a effectué ses débuts professionnels en avril 2022 à Chiang Rai (W25). À quelques reprises, elle parvint à s'extirper des qualifications pour intégrer les tableaux principaux. Plutôt prometteur pour la suite.Bien sûr, on mesure les nombreuses difficultés qui attendent ces jeunes joueuses dans une période charnière pour le tennis asiatique, avec la montée en puissance de la Chine et du Japon qui disposent des fonds nécessaires pour bâtir un avenir radieux. Bien qu'elle soit logiquement située un cran en-dessous de ses principaux rivaux, la Thaïlande aurait tout intérêt à prendre le train en marche si elle ne veut pas rester à quai.