Poussé vers l'avant par les performances de la tunisienne Ons Jabeur, qui va tenter l'année prochaine de remporter son premier titre du Grand Chelem après trois tentatives infructueuses, le tennis féminin du continent africain peine encore à exister dans une discipline largement dominée par les pays occidentaux. Tandis que débute cette semaine le tournoi ITF de Nairobi, au Kenya, auquel participent plusieurs joueuses africaines, regardons où en est aujourd'hui l'Afrique sur l'échiquier mondial en scrutant notamment huit jeunes femmes qui pourraient apporter leur pierre à l'édifice. Mayar Sherif, Egypte, 27 ans :La joueuse égyptienne est la meilleure nord-africaine à avoir percé sur le circuit WTA depuis Ons Jabeur en atteignant la 31e place mondiale en juin dernier. Très bonne joueuse de terre battue, elle a remporté 90% de ses seize titres professionnels sur cette surface qu'elle affectionne, dont six WTA 125. Sa plus grosse razzia fut l'année dernière avec quatre titres. Elle a aussi produit du beau jeu cette année avec deux tournois glanés consécutivement à Makarska et Valence. Problème, son taux de réussite a tendance à chuter drastiquement dès que le niveau s'élève. Hormis un quart de finales au WTA 1000 de Madrid au printemps, où elle éliminait tour à tour Anhelina Kalinina, Caroline Garcia et Elise Mertens, avant de prendre un set à Aryna Sabalenka, elle n'a pas trouvé la clef du succès dans les gros tournois WTA et encore moins en Grand Chelem où elle n'a pas fait mieux qu'un deuxième tour cette année à Roland-Garros. Autre problème, elle semble éprouver les pires difficultés à apprivoiser les autres surfaces que la terre, ce qui explique sans doute sa baisse de régime en fin de saison puisqu'elle ne pointait qu'à la 58e place, loin de sa meilleure marque. Le temps presse pour Sherif alors que la trentaine approche doucement.
Sandra Samir, Egypte, 26 ans :
Issue de la même génération que Mayar Sherif à un an près, Sandra Samir a d'abord brillé chez les Juniors en étant deux fois championne d'Afrique en 2013 et 2014. Des résultats qui lui permirent d'atteindre la 13e place, son meilleur rang au classement Junior. Hélas, son passage chez les professionnelles ne lui a pas permis de percer sur le circuit WTA, contrairement à Mayar Sherif. Même si elle a remporté quinze titres sur le circuit ITF, tous le furent sur son sol natal, à l'exception de celui d'Hammamet, en Tunisie, en 2018. Au vu de ses excellents résultats chez les jeunes entre 2011 et 2015, on peut dire que l'Afrique du Nord a perdu une belle occasion avec Sandra Samir même si son bilan sur le World Tennis Tour n'en demeure pas moins impressionnant depuis qu'elle est passée pro.
Sada Nahimana, Burundi, 22 ans :
Rare représentante de l'Afrique de l'Est à avoir gagné des titres professionnels (deux en tout, le dernier remontant à 2021 à Antalya), Sada Nahimana, jeune étoile montante du tennis africain, doit sa notoriété à une belle carrière en Juniors, catégorie dans laquelle elle fut 12e mondiale en 2019 après avoir remporté le tournoi sur herbe de Nottingham. Depuis, elle continue d'enchaîner les tournois sur le circuit secondaire afin de retrouver le niveau qui lui avait permis d'atteindre son meilleur classement à la WTA en avril de cette année, 244e. On l'a même aperçue sur le WTA Tour en mai, à Rabat (WTA 250), où elle s'inclinait au premier tour contre la croate Jana Fett. Le mois dernier, à Colina (WTA 125), au Chili, elle s'extirpait des qualifications pour intégrer le tableau principal. On notera par ailleurs que, depuis qu'elle a basculé chez les professionnelles, elle a passé beaucoup de temps sur sa surface de prédilection, la terre battue. Et si une joueuse du Burundi intégrait un jour le tableau principal d'un tournoi du Grand Chelem ? Sada Nahimana est encore suffisamment jeune pour pouvoir espérer.
Malak El Allami, Maroc, 17 ans :
À seulement dix-sept ans, Malak El Allami a déjà commencé à tracer sa route sur le circuit professionnel via le World Tennis Tour féminin sur lequel elle a fait ses débuts en février 2022. Moins d'un an plus tard, elle disputait sa première finale à Monastir (W15), hélas contrainte à l'abandon sur blessure. Elle allait ensuite retrouver le milieu professionnel en avril dernier puis, obtenir une wildcard pour le tournoi WTA 250 de Rabat. Néanmoins, étant toujours une Junior, c'est sur ce circuit qu'elle se distingue en devenant championne d'Afrique 2023 aux dépens de sa compatriote Aya El Aouni, dont nous allons parler. Ses bons résultats l'ont conduite jusqu'aux portes du top 40 au classement Juniors. Elle a également écrit une page d'histoire en devenant cette année la première marocaine à gagner un match en simple à Wimbledon Juniors. Le chemin est encore long pour Malak El Allami mais, au moins, elle s'est déjà faite un nom qui pourrait inciter de nombreuses jeunes marocaines à se lancer dans la discipline.
Maria Badache, Algérie, 15 ans :
Maria Badache possède quatre titres sur le circuit Juniors. C'est déjà beau pour une jeune joueuse de son âge mais, ce n'est pas tout. Le mois dernier, elle a défendu avec fierté les couleurs de son pays en phase finale de la Billie Jean King Cup Juniors, dont c'était la toute première participation. Malgré une élimination en matches de poules, Badache a offert à l'Algérie son premier point dans cette prestigieuse compétition en dominant la serbe Anastasija Cvetkovic en deux manches. Elle n'hésite pas à faire de longs voyages pour participer aux tournois. Elle est passée notamment par la Turquie, la Croatie, la Hongrie et a atteint les quarts de finales des championnats d'Afrique au Caire. L'avenir pourrait bien lui sourire si elle continue sur cette voie.
Gloriana Nahum, Bénin, 17 ans :
Première joueuse du Bénin à intégrer le top 100 cette année chez les Juniors, Gloriana Nahum n'a cessé de progresser depuis. Son bilan depuis le début de la saison est remarquable : quart de finaliste à San Jose et aux championnats d'Afrique, huitième de finaliste au Caire (J500), de nouveau quart de finaliste à Offenbach (J500) et à College Park, encore huitième de finaliste à Bradenton (J300) et à l'Orange Bowl (J500) mais surtout, ce qui restera son œuvre majeure, un titre au tournoi de Durban (J300) avec une victoire en finale sur l'israélienne Mika Buchnik. Cela valait bien une percée dans le top 30 en octobre dernier. La béninoise s'est déjà frottée à la catégorie supérieure avec une finale cette année à Monastir (W15). Et si l'on vous disait que ce n'était qu'un début ? L'avenir nous le dira.
Jana Hossam Salah, Egypte, 16 ans :
Jana Hossam Salah a porté haut les couleurs de son pays lors de la Billie Jean King Cup Juniors en battant notamment la prodige japonaise Wakana Sonobe en phase de groupes, avec l'art et la manière. Brillante en équipe, elle l'a été parfois en individuel, en gagnant cette année chez elle au Caire (J100). Le public français a aussi pu la voir lorsqu'elle est passée par Beaulieu-sur-Mer (J300), Istres (J200) et Cap d'Ail où elle s'était hissée jusqu'en demi-finales. Elle n'a jamais été aussi proche de faire son entrée dans le top 100 au classement Juniors. L'Egypte serait-elle déjà en train de préparer le terrain pour l'après Mayar Sherif ? Il va falloir en tout cas surveiller les progrès de cette jeune génération très travailleuse.
Aya El Aouni, Maroc, 18 ans :
La jeune marocaine ne pouvait rêver meilleure année. Victorieuse de deux titres Juniors qui lui ont permis d'entrer provisoirement dans le top 30, elle a surtout accompli un prodige le 22 octobre dernier en gagnant son premier tournoi professionnel à Héraklion (W15), ce qui lui permit d'obtenir son meilleur rang à la WTA, 871e. Le 3 décembre dernier, elle avait l'occasion de récidiver à Antalya (W15) avant qu'une blessure ne la stoppe en finale. Ce n'est sans doute que partie remise, d'autant plus que son succès en Grèce a eu un fort retentissement dans son pays.