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ÉtoileSolideÉtoileSolideÉtoileSolideÉtoileSolide(4 étoiles)Dans une mer de jeux vidéo exemplaires sortis en 2023, « Alan Wake 2 » est l’œuvre la plus soucieuse de repousser les limites de sa franchise, de son genre et même de son support.
Plus que n’importe quelle année récente, la série de jeux acclamés par la critique de 2023 a rendu extrêmement difficile la sélection d’un seul titre comme étant le meilleur. « Baldur's Gate 3 » met fin à la poursuite d'un rêve de longue date consistant à reproduire l'expérience de jeu de « Dungeons & Dragons » et constitue une réalisation monumentale en matière de structuration du scénario et de conception du jeu. « La Légende de Zelda : Les Larmes du Royaume » constitue le meilleur d'une série longtemps considérée comme le zénith de la créativité et de l'innovation dans l'industrie.
Mais il y a un point commun entre tous ces titres : ce sont des modèles d’évolution. Leur plus grande préoccupation et leur succès éventuel se sont concentrés sur le perfectionnement de leurs séries ou genres respectifs. C'est un exploit qui doit être célébré et honoré, bien sûr, mais je ne pouvais m'empêcher de penser que même si ces diverses expériences étaient excellentes, nous ne voyions rien de vraiment nouveau dans l'industrie. Et puis est venu « Alan Wake 2 », créé par Remedy Entertainment et co-réalisé par Sam Lake et Kyle Rowley.
La nature du jeu en tant que suite est indiquée dans le nom, mais elle cache un esprit rebelle. C'est l'histoire continue d'Alan Wake, un romancier célèbre mais hacky qui a souffert du blocage de l'écrivain en 2010 et a soudainement découvert que le monde réel commençait à refléter un livre qu'il ne se souvient pas avoir écrit. Wake a disparu peu de temps après. Dans la suite de cette année, les agents du FBI Saga Anderson et Alex Casey enquêtent sur une série de meurtres dans la ville rurale de Washington où Wake a été vu pour la dernière fois. Sur un lieu de meurtre, Anderson trouve une page d'écriture qui décrit exactement ce qu'elle et Casey font. Le couple commence à s'interroger sur la nature de ce qui est réel et de ce qui est fiction.
Cela ressemble à un thriller assez classique avec un twist, clairement inspiré de Livres de Stephen King et « Twin Peaks » de David Lynch mais c'est la façon dont ce récit se déroule qui fait que ce jeu se démarque même parmi ces œuvres. Remedy Entertainment s'intéresse vivement à la manière dont les médias et la communication façonnent la compréhension de nous-mêmes et de l'histoire. « Alan Wake 2 » expérimente diverses formes de médias, d'art et d'expression humaine.
« Alan Wake 2 » n'est pas seulement un jeu vidéo, c'est aussi des épisodes d'un talk-show de fin de soirée, un opéra rock jubilatoire, une anthologie de publicités télévisées locales bon marché, l'ébauche d'un livre, une émission de télévision en série, un un court métrage d'art et d'essai, un mémoire révélateur et un album concept pop. Le jeu soutient que tout, de la publicité aux panneaux de métro, est de l'art et que cela compte dans notre monde, quelle que soit la façon dont nous y prêtons attention. Des jeux tels que « Baldur's Gate 3 » nous demandent qui nous voulons être, nous accordent le pouvoir de réaliser ce souhait et de prendre le contrôle de nos rêves. Mais dans les rêves, nous n’avons jamais le contrôle. « Alan Wake 2 » ne demande pas qui nous voulons être, mais qui nous étions, qui nous sommes et qui nous pourrions devenir.
Ce n’est pas un hasard si le principal métier de Wake est l’imprimé, moteur de certaines des idées et croyances les plus profondément ancrées dans l’humanité. Aujourd’hui, avec les archétypes médiatiques, littéraires et culturels comme le « flic dur à cuire » ou la « mère héroïne protectrice » (que « Alan Wake 2 » emploie dans ses deux personnages principaux) bourdonnent au fond de nos esprits et de nos souvenirs, comme un vieux jingle télévisé ou une comptine. « Alan Wake 2 » interroge comment ces idées naissent, comment elles inondent notre espace mental à travers les médias, comment elles nous changent et comment nous les changeons.
Comme les strophes d'un poème, les chapitres d'un roman de James Joyce ou les vers d'une chanson surréaliste de Bob Dylan, toutes ces pièces mobiles et formats médiatiques disparates se complètent si bien que ce jeu ne peut exister et être consommé que dans sa totalité. Même les sections avec de la danse interprétative (oui, c'est ici aussi) dégoulinent de sens et de métaphore.
Ce ne serait pas aussi bien s’il ne s’agissait que d’un exercice mental austère. Mais l'exubérance de ce jeu brille dans de nombreuses séquences, et l'un des points à retenir les plus simples de ce texte par ailleurs déroutant est que Lake et son équipe se sont clairement beaucoup amusés. C'est peut-être un thriller d'horreur, mais c'est aussi exceptionnellement drôle dans de nombreuses séquences. Quand les personnages rient ou sourient, cela semble honnête. Les petites villes de Bright Falls et Watery sont entièrement explorables avec des objectifs optionnels, des cabanes inquiétantes dans les bois et des trésors cachés. Et même si son action n'atteint pas tout à fait le niveau haut de la série Resident Evil, il est clair que cela n'a jamais été l'intention.
Malgré tous ses atouts cinématographiques et multimédias, le jeu se souvient et reconnaît toujours l'implication du joueur. Cela élève « Alan Wake 2 » au-dessus de ses contemporains tels que le film acclamé par la critique. « Le dernier d'entre nous. » Le joueur peut choisir d'incarner Wake ou l'agent Anderson à presque tout moment du jeu, accordant ainsi au public une autonomie dans le déroulement de l'histoire. Le contexte de certaines scènes et votre interprétation peuvent différer selon l'ordre dans lequel vous abordez ces chapitres, voire le nombre de fois où vous rejouez l'intégralité du jeu.
Comme se le demande l’agent Anderson : « Sommes-nous les personnages ou le public ? Ce jeu aborde cette question avec le plus grand sérieux et la plus grande sincérité, à travers plusieurs chapitres d'un gameplay d'horreur de survie passionnant.
Dans l'imagerie parfois impénétrable d'Alan Wake 2 se cache une vérité évidente : les jeux vidéo peuvent englober toutes les formes d'art, et l'acte de créativité, quelle que soit sa forme, peut s'ancrer dans nos cœurs et nos esprits et ne jamais les quitter. Il s’agit du potentiel inexploité du médium et des efforts nécessaires pour créer une telle pièce. Je me souviens d'une citation du légendaire cinéaste et critique français François Truffaut : « J'exige qu'un film exprime soit la joie de faire du cinéma, soit l'agonie de faire du cinéma. Je ne suis pas du tout intéressé par quoi que ce soit entre les deux. Voici quelque chose qui abrite les deux ambitions, un jeu d'une profondeur, d'un esprit et d'une passion énormes. Remedy Entertainment a créé l'œuvre la plus vitale de l'industrie du jeu vidéo en 2023.
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