Musique d'Apéritif & DOUCHE FROIDE
michel
YGGL: on comprend ta stupeur et on te rassure, il n'est pas question de biogenèse des ribosomes, de protéine de liaison, ni d'un sigle ésotérique cachant un groupuscule terroriste, Yrwan Garcia Léal ( Bidart, pays basque) a choisi ces lettres abréviatives comme nom d'artiste pour faire de la musique, et , non, il n'évolue pas sous l'étiquette chants traditionnels basques, pas de bilbainadas, ni de folklore, au menu, mais du rock qui cogne.
En tapant le nom du monsieur, première chose que le moteur de recherche signale, c'est qu'il s'agit d'un snowboarder qui a brillé sur les pistes blanches, il y a une quinzaine d'années, tout naturellement il a choisi une autre planche pour affronter les vagues du Golf de Gascogne et, accessoirement, il est devenu blogger et rédacteur, mais comme il s'ennuyait un tantinet, il a déniché une guitare, un micro et un looper pour faire du rock, c'est pas idiot, d'autres sportifs ont tâté de la politique!
La discographie du copain de Blanche-Neige se chiffre, avec la sortie de 'Gaijin', a quatre unités. 'Forgotten', de 2022, lui avait permis d'évacuer des pensées noires, il prévient que ' Gaijin', titre imaginé après un séjour au Japon, sera plus percutant, avec des accents grunge et/ou post punk omniprésents.
Tracks:
7. Diamond Day
8. Vade Retro
9.Miss Meteor
Comme il s'agit d'un one-man-band, Yggl joue de tous les instruments: guitare, claviers, basse, boîte à rythme et looper.
La photo de pochette ( trompeuse, vu le contenu) est signée Guillaume Fauveau, un autre amoureux de l'océan. Tu avises un avertissement " Parental Advisory écrit au-dessus "d'Explicit Content" , pas parce que le garçon arbore un look à la Yannick Noah, affublé d'un bob hip hop, mais bien au vu des lyrics.
'Nobody' est chanté d'un timbre proche de celui du regretté Kurt Cobain, les accords de guitare, simples et saturés, eux renvoient vers Joey Santiago des Pixies, le côté mécanique et passablement uniforme de la groovebox remplace, pas franchement avantageusement, la basse et la batterie, il faudra s'y faire.
L'alternative rock 'Mad' est à classer aux côtés de groupes tels que Fountains of Wayne, Weezer ou The Rentals, à la frontière du grunge et du power rock, avec ces guitares corrosives et un chant rêche, le titre ne va pas convenir aux sujets atteints de névrose.
Pour les autres, les fans de Pearl Jam, des Foo Fighters ou de Mad Season, c'est le moment de ressortir les chemises canadiennes du placard.
'Boomer' sorti en single, secoue sérieusement, après une intro jouée au racloir, les guitares en mode punk farouche s'en donnent à coeur joie, et comme le chant impétueux suit la même voie, on te met au défi de ne pas battre le sol du talon ( tu évites si la dame de l'appart sous le tien a une liaison avec un poulet).
Changement de registre avec 'Blue Sun', la plage la plus élaborée de l'exercice. Après une amorce mélodique à la guitare, sur laquelle se colle un chant mélancolique, l'entrée en lice des percussions mécaniques annonce un virage stoner/doom lent mais puissant, la voix, intense et douloureuse à la fois, dégage le même type d'émotions que procuraient les growls gémissants d'Eddie Vedder.
Pour la coloration bleutée de l'astre, pas besoin de sonner chez Sylvie Vartan, la NASA affirme que c'est dû au calcium ionisé dans l'atmosphère solaire, un pote ( non, pas Lucky Luke) a un autre point de vue et évoque une forme de daltonisme.
Une acoustique aux accords secs allume 'Sad Dream' , on commence à comprendre le schéma, avec la drum machine produisant des rythmes binaires effrénés, la guitare décide de s'envoler à son tour, la voix, toujours aussi rauque, psalmodie sa plainte jusqu'au break, pendant lequel un synthé, en mode Soupline, adoucit le propos jusqu'au terme du cauchemar.
'Want', entre doom, shoegaze et presque dream pop, dégage des effluves légères et nous prouve qu'en tout rocker qui se respecte il y a une âme sensible qui sommeille.
Just another diamond day. Just a blade of grass . Just another bale of hay. Hope the horses pass la-la-la-la-la-la, la-la-la-la-la, la-la-la-la La-la-la-la-la, la-la-la-la-la... ça c'était ' Diamond Day' de Vashti Bunyan, en 1969, du British folk bucolique ayant fort inspiré Devendra Banhart.
Le ' Diamond Day' d'Yggl n'est pas du tout dans la même veine, pas de flûte primesautière, pas de la la la's charmants, non, mais des guitares distordues qui éclaboussent et un chant noir qui s'expulse en remontant depuis les tripes.
'Vade Retro' n'est pas l'anti-spam dernier cri, comme le laisse entendre la direction du numérique, mais un titre minimaliste, lent et tendu, exprimant, après une longue intro à la guitare et effets de synthé planants, le vide que ressent l'artiste.
'Miss Meteor' déboule comme une boule de feu qui va embraser ton âme et ton cerveau.
Imagine le retour du maléfique Rascar Capac venu se venger et créer un bordel monstrueux sur fond post punk tordu.
Si Bandcamp l'occulte, Spotify complète la tracklist par un bonus track odyssée de l'espace quasi instrumental, astucieusement intitulé ' Hasta la Vista' .
Grunge is not Dead, pour preuve des combos tels que Momma, A Void, Saint Asonia,3rd Secret (avec Krist Novoselić), marcel ( des Belges), Hernest ( du grunge en français) ou les formidables SheWolf, ont repris le flambeau, YGGL fait partie de cette caste!
Le Gaijin tour s'est achevé il y a peu, YGGL devrait reprendre la route en 2024.