Partout dans le monde, la « digitalisation » des services inquiète une proportion plus ou moins large de la population, peu aguerrie aux outils numériques. Imaginez le désarroi que crée aux Pays-Bas une transition menée à marche forcée, entraînant progressivement, entre autres, la disparition des agences bancaires et des paiements en espèces.
Naturellement, l'évolution, notamment dans le secteur financier, répond à une logique implacable : les usages des outils en ligne et mobile ou des moyens de communication à distance (visioconférence, messagerie instantanée…) s'intensifiant à grande vitesse, les processus traditionnels sont délaissés par la plupart des clients et finissent par être supprimés (aussi avec une motivation économique). Ceux qui persistent à les préférer, pour diverses raisons, sont alors malheureusement laissés pour compte.
Selon les estimations récentes, malgré la forte pénétration de la littératie « digitale » dans la région, environ un néerlandais sur six rencontrerait des difficultés avec les technologies : ce taux peut paraître faible (surtout pour les responsables des fermetures) mais représente malgré tout un nombre important d'individus qui ne peuvent plus gérer leur vie financière de manière optimale et subissent un stress chronique au sujet de leur argent. Pourtant, bien peu d'efforts sont consentis pour satisfaire leurs besoins.
L'année dernière, les trois principaux établissements du pays (ABN AMRO, ING et Rabobank) avaient ainsi tenté, sous forme expérimentale, de mettre en place une sorte de permanence dans une optique d'éducation aux bases des applications bancaires. Apparemment, ce dispositif d'assistance au rabais (animé par des bénévoles) a été abandonné. Et c'est désormais à une association spécialisée que l'industrie confie, via un partenariat, le soin de combler les lacunes des modèles relationnels d'aujourd'hui.
L'approche pédagogique semble avoir été évacuée, au profit (?) d'un plateau téléphonique d'aide, uniquement chargé de répondre aux interrogations des personnes qui appellent. C'est d'ailleurs le constat du volume croissant de questions concernant l'argent qui a encouragé cette collaboration visant à préparer un corpus d'information adapté à l'intention des téléopérateurs. En cas de nécessité, par exemple lorsque des données confidentielles entre en jeu, les demandes peuvent être transférées à la banque mais on perçoit nettement que cette option a vocation à rester exceptionnelle.
Voilà une illustration supplémentaire de la dérive des institutions financières, qui, au lieu de chercher systématiquement à comprendre les attentes de chacun de leurs clients de manière à leur offrir le meilleur service, choisissent plutôt, par paresse, par souci de rentabilité… ou par indifférence, de proposer une solution unique correspondant à peu près aux exigences de la majorité. Pour des entreprises qui vantent régulièrement leur attachement à la personnalisation des interactions, la réalité est assez consternante.