Les uns échangent des caresses de regards,
Les autres boivent jusqu'aux premières lueurs,
Mais moi, toute la nuit, je négocie
Avec ma conscience indomptable.
Je dis : « Je porte ton fardeau,
Et il est lourd, tu sais depuis combien d'années. »
Mais pour elle le temps n'existe pas,
Et pour elle il n'est pas d'espace dans le monde.
Voici revenu le sombre soir du carnaval,
Le parc maléfique, la course lente du cheval,
Le vent chargé de bonheur et de gaieté,
Qui s'abat sur moi des pentes de ciel.
Au-dessus de moi, un témoin tranquille
Montre sa double corne... Oh, m'en aller,
Par la vieille allée du Pavillon chinois,
Là, où l'on voit des cygnes et de l'eau morte.
Novembre 1935
Anna Akhmatova
traduit du russe par Jean-Louis Backès
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