On se retrouve avec la 36ème édition de mes citations littéraires préférées (les précédentes sont à retrouver ici).
Vous le savez, j’adore dégainer mes post-it multicolores au cours de mes lectures pour marquer les passages qui me plaisent particulièrement. Qu’il s’agisse de traits d’humour, de quelques lignes poétiques, d’un passage saisissant. Tous sont, à leur façon, révélateurs du style littéraire de leur auteur(e) et de l’univers du roman dont ils sont tirés.
Je reviens aujourd’hui sur mes quatre dernières lectures qui furent – vous le remarquerez – assez prolifiques en termes de citations.
Je vous ai déjà donné mon avis sur ces lectures, mais je vous laisse désormais les découvrir de façon un peu différente.
« Plus Gil vieillissait, plus il remarquait que les gens parlaient d’eux-mêmes. A l’exclusion de tout autre sujet. C’était la norme de la discussion. Comme si l’ego était le seul sujet officiellement autorisé ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées (mon avis sur le livre ici)
« Pour un jeune mec, c’est facile de confondre l’ennui d’une femme avec le ravissement ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« Mais la solitude pouvait être ambiante dans un couple. Ou le devenir ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« On devrait protéger les jeunes enfants du spectacle des vieux pieds ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« L’absence de Lane ne l’avait pas transformé en «personne ». De même que sa présence n’avait pas fait de lui « quelqu’un » ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« Quand on a beaucoup d’argent, on ne paie jamais pour quoi que ce soit. On ne sent jamais le goût des choses, alors on vit comme si tout était gratuit. Il n’y a jamais d’échange. Jamais de choix ni de sacrifice, à moins de céder son temps. Je voulais que le changement me coûte. Vous saisissez? Je voulais le mériter ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« Se rendre, pensa Gil. Ce n’était peut-être pas la stratégie des lâches, après tout. Peut-être que la reddition, quand la situation l’exigeait, était la chose la plus difficile à faire. Pas le combat ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« Il nous est impossible de changer les faits, Gilbert, lui avait dit sa grand-mère. Nous ne pouvons que changer notre comportement. Face à eux. Et peut-être ce que nous ressentons ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« La liberté ne peut être trouvée que dans l’esprit, mon chéri, disait-elle. Pas dans le monde ».
Lydia Millet – De l’espoir et autres créatures ailées
« C’est comme jouer au jenga : il suffit que quelque chose menace son amour-propre, d’un infime tremblement, et tout l’édifice s’effondre entre vos doigts. Parfois, il pleure, et qu’elle femme peut résister à un homme qui pleure ? Ils sont tellement mauvais pour ça ; cela leur demande tant ».
Charlotte Mendelson – Accrochages (mon avis sur le livre ici)
« Suis-je seule, si je n’ai personne à qui parler ? »
Charlotte Mendelson – Accrochages
« Elle regarde dans le néant ; des paysages de campagne noire et humide défilent à toute allure. Elle ouvre la fenêtre pour inspirer de la certitude. Et prend sa décision ».
Charlotte Mendelson – Accrochages
« C’est une irrésistible perfusion d’adrénaline, le fait de perpétuellement ne pas savoir ».
Charlotte Mendelson – Accrochages
« Les cœurs sont élastiques, jusqu’à un certain point cependant ».
Charlotte Mendelson – Accrochages
« Lucia est trop furieuse pour sourire, trop bien dressée pour ne pas le faire ».
Charlotte Mendelson – Accrochages
« Aucune douleur n’égale celle d’être le plus aimant des deux dans un couple, et c’est toujours elle qui est à cette place ».
Charlotte Mendelson – Accrochages
« C’est ça l’autre au fond, beaucoup d’histoires racontées après coup. Même celles que l’on vit ensemble, on se les raconte après coup. D’ailleurs on finit par se les réciter, et on peaufine les détails à force, on retranche, on ajoute ; on fait briller ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu (mon avis sur le livre ici)
« Il lui avait semblé être, avec cette pointe de douleur aiguë clouée dans son sternum, toujours le dernier à savoir. Comme si le fleuve gai et furieux de la vie embarquait tous et toutes dans sa bouillonnante fureur et ne faisait que ruisseler jusqu’à lui ; qu’il ne gouttait qu’à peine jusqu’à lui par inadvertance pour éclabous-souiller son existence trop pâle. Il ne se sentait même pas exclu, cela aurait eu au moins l’éclat d’une posi-tion, cela aurait nourri le terreau d’une révolte, non, l’attention de ses condisciples le traversait. Sa présence se trouvait être sans nécessité».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Il s’était si souvent glissé en imagination dans la peau d’une autre chance de lui-même ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Parfois Étienne avait l’impression qu’ils s’étaient fabriqués ensemble, pour que chacun tombe parfaitement ajusté dans les gouffres de l’autre ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Étienne n’était jamais parvenu à trancher si c’était pire ou non. Échouer proche du but ou échouer dans les grandes largeurs ? Le malheur revenait au même ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Chacun se coulait parfaitement dans sa propre partition. Les contraires s’attirent parce qu’ils se rassurent et colmatent les brèches. L’adversité est incroyablement vivifiante ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Elle lui lançait que lui, avec sa musique classique, vivait enfermé dans le passé, dans l’inertie, qu’il s’abritait comme un reclus, il se coupait du monde, alors qu’elle, en prenant ses photos, s’interdisait toute tentation d’adorer le passé. Qu’il ne pouvait pas la comprendre. Non, il ne comprenait pas : comment pouvait-on vivre dans le présent en capturant la vie en permanence pour la figer ? »
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Etienne se déplaçait frénétiquement dans la foule, traquant les robes noires qui pourraient toutes recouvrir le corps de Vive, ce corps qu’il connaissait comme ses souvenirs d’enfance, en souverain, en créateur, dont la familiarité était si grande qu’elle finissait par couvrir les yeux d’un voile, qu’elle bouchait l’évidence des sens ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Il lui demandait pourquoi elle n’allait pas sur le balcon, elle répondait qu’elle aimait bien fumer à la fenêtre, être dedans et dehors en même temps, il ne savait pas exactement ce qu’elle entendait par là, parce qu’on ne sait jamais ce que l’autre pense, on passe notre temps à fabriquer des images avec des mots, des images incompréhensibles qui tentent de flotter jusqu’à l’autre et qui se noient, des images qui restent cachées, comme les photographies de Vive qui n’avaient jamais été développées ».
Claire Berest – L’épaisseur d’un cheveu
« Je l’ai vu parler de moins en moins au futur. Sauf qu’il ne sait pas parler au présent et ne pense – officiellement – jamais au passé. Je l’ai donc surtout vu arrêter de parler, arrêter de donner son avis ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière (mon avis sur le livre ici)
« Comme si savoir qu’il allait crever lui avait retiré cette injonction à vivre intensément, à prouver qu’il vit intensément. Comme si ça l’avait décomplexé. Qu’il faisait enfin des trucs pour lui. Non pas qu’il n’en ait jamais fait, au contraire. Mais je sens qu’il ne vit plus pour nous montrer que lui il sait vivre ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Je marche à côté de la vie. Je vois les sensations mais j’ai le bras trop court pour les attraper. Ou peut-être que j’ai peur que ce soient elles qui m’attrapent ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Je n’arrête pas de me demander : que deviennent les larmes qui n’ont pas coulé ?
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Si tu veux tu fais, et si tu veux pas, tu fais pas. Tu ne te forceras pas à faire en te disant que peut-être ça fait longtemps que, ou qu’il ne faut pas que je pense que, ou parce que peut-être que l’envie viendra quand tu. Non, tu as ce rapport binaire à la vie, si simple. Tu n’es pas dans la statistique, dans le sondage, le double sens, le sous-texte, l’inconscient comme moi. Tu es la conscience pure, tu es la frontalité, tu es le désir qui ne s’ignore pas, la tristesse sans complaisance ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Trop se savoir c’est parfois s’oublier. C’est un truc de mourant de passer son temps à détailler son intérieur aux autres ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Les soucis me manquent. Le mot c’est ça, soucis, c’était délimité. Il m’en-gueulait, parfois elle aussi, et c’était terminé, je passais à autre chose, un souci laissait place à un autre et ainsi de suite jusqu’au dodo. Maintenant c’est les problèmes, c’est pas pareil, ça cohabite les problèmes, ça se met en coloc, parfois ça baise ensemble, jusqu’à créer un nouveau petit problème que t’avais pas vu venir ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« J’ai l’impression que l’amour ça finit toujours par disparaître et qu’on doit continuer pendant un moment à jouer sa présence parce qu’on l’a dit ou parce qu’on a encore envie de croire qu’il va revenir ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Six ans plus tard je comprendrais que la dépression s’immisce grâce à cette pensée. À quoi ça sert de faire mon lit, je vais le défaire ce soir ? Si on laisse cette pensée gagner on est foutu, c’est l’essence même de la vie de faire pour défaire ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Il y a encore quelque temps, je me lavais les mains avant d’écrire. Maintenant j’ai compris que se laver les mains et écrire c’est la même chose ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Je me prends un retour de flamme, l’amour est une danse à deux qui se joue dans la précipitation, les partenaires n’ont pas eu le temps de bien se choisir. Il y a ceux qui dansent et ceux qui regardent les autres danser en se demandant s’ils valsent avec la bonne personne. Il danse mieux que moi cette fois-ci ».
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
« Est-ce que maintenant elle range tout de suite les choses, avant même de les vivre? Est-ce qu’à force de vouloir collectionner les souvenirs, tout en devient un, même ce qu’on est en train de vivre? Comme si la nostalgie déteignait sur le présent, voire sur le futur. Je la comprends, la mémoire c’est la vie sans l’urgence de la vie, sans la gravité, c’est l’espace sans le temps. C’est un endroit qu’on façonne, une zone de confort, où l’on peut revivre, une deuxième fois, sans le poids des conséquences, des nuits d’angoisse. Je comprends qu’on ait envie d’y vivre »
Panayotis Pascot – La prochaine fois que tu mordras la poussière
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Crédit photo de couverture : L&T