Quelle que soit votre opinion sur la nouvelle chanson du groupe dotée d’une intelligence artificielle, “Now and Then” est un véritable chef-d’œuvre de merchandising.
Les Beatles ont atteint la première place cette semaine. Ce n’était pas la première fois que le groupe arrivait en tête d’un classement pop, bien sûr. Et avoir le single le plus vendu n’est plus tout à fait la même chose qu’avant. Mais les ventes du premier jour ont suffi pour que la “nouvelle” chanson, “Now and Then”, arrive en tête du classement des ventes numériques du Billboard. C’est un exemple remarquable de la façon dont les Beatles – et l’idée des Beatles – sont restés d’actualité plus d’un demi-siècle après la séparation du groupe.
La chanson “Now and Then” contient une démo de John Lennon datant de la fin des années 1970. Sa qualité était trop brouillée pour être sauvée jusqu’à ce que – comme l’explique ici David Salazar de Fast Company – les progrès récents de la technologie numérique et de l’intelligence artificielle permettent d’extraire la voix et de créer une instrumentation autour d’elle. Il s’agit notamment de parties jouées et chantées par Paul McCartney et Ringo Starr, ainsi que de parties de guitare de George Harrison provenant d’une tentative antérieure, abandonnée, de sauvetage de la chanson dans les années 1990. Le résultat est explicitement présenté comme “la dernière chanson des Beatles”.
Il s’agit d’un positionnement astucieux qui donne l’impression d’un événement unique de la culture pop (même, il convient de le noter, pour ceux qui se demandent s’il s’agit vraiment d’une “chanson des Beatles”). Et elle a été présentée comme un événement – il n’y a pas eu seulement un nouveau clip vidéo réalisé par Peter Jackson, il y a eu un teaser vidéo “dans les coulisses” de la chanson. Le single numérique était accompagné d’un remaster “face B” de “Love Me Do”, le premier album des Beatles. (Sur Spotify, des liens permettent d’acheter le single physique ou un T-shirt portant les noms des chansons écrits de la main de Lennon). Plus précisément, “Now and Then” est incluse en tant que titre “inédit” sur The Beatles : 1967-1970, réédité avec The Beatles 1962-1966, souvent appelés les albums “bleu” et “rouge” ; des versions élargies des deux compilations pour le 50e anniversaire sont disponibles aujourd’hui.
L’annonce de “la dernière chanson des Beatles” garantit une avalanche de reportages dans la presse, car des générations d’obsédés ne manqueront pas de saisir l’occasion pour revisiter la riche mythologie des Beatles et se plonger dans la dernière itération. Mais la touche d’intelligence artificielle et de technologie a conféré à cette nostalgie déjà puissante un éclat contemporain qui est, en fait, tout à fait dans l’air du temps : le groupe a toujours embrassé la nouveauté et expérimenté en permanence, en particulier avec les technologies d’enregistrement en constante évolution.
Cela dit, le groupe n’a pas hésité à saisir les occasions de rééditer son héritage pour les nouvelles générations de fans. L’histoire des Beatles et de l’entité Apple Corps, par l’intermédiaire de laquelle McCartney, Starr et les héritiers de Lennon et Harrison contrôlent cet héritage, est compliquée. Mais elle s’est révélée très lucrative (67 millions de dollars de royalties en 2019, par exemple), et il ne fait aucun doute que la réédition stratégique, ou la recontextualisation, du catalogue du groupe a joué un rôle clé. Cela va des versions élargies des albums classiques, qui regorgent de prises alternatives et d’archives, au spectacle Love du Cirque du Soleil, en passant par l’album 1, une collection de tous les numéros un des Beatles entre 1962 et 1970, qui s’est vendue à plus de 30 millions d’exemplaires.
“Now and Then” est en fait issu de deux projets antérieurs sur l’histoire des Beatles. Deux démos de Lennon qui ont été retravaillées pour devenir des chansons des Beatles ont été publiées en deux volumes dans les années 1990, dans le cadre d’un autre projet de reconditionnement, l’imposante collection Anthology. C’est lors de ces sessions que Harrison a enregistré une partie de guitare pour “Now and Then”, avant que la chanson ne soit abandonnée en raison de la qualité “minable” du son. La technologie utilisée pour la faire revivre a été mise au point pour aider le réalisateur Peter Jackson dans une autre aventure archivistique, le documentaire de 2021, The Beatles : Get Back.
Cette riche histoire de l’exploitation minière, eh bien, l’histoire du groupe lui-même, n’a fait que rendre les Beatles plus éternels. Et cela garantit non seulement une couverture et un intérêt, mais aussi un débat. Certains ont trouvé “Now and Then” étonnamment émouvant. D’autres se sont montrés un peu sceptiques, en particulier à l’égard de la vidéo gadget incorporant de vieux clips de Lennon et Harrison semblant jouer avec McCartney et Starr. (“Une abomination”, a déclaré Slate.) “Now and Then” est juste correct. Et c’est loin d’être suffisant”, a déclaré Geoff Edgers, journaliste artistique du Washington Post. Mais c’est le critique musical du New York Times, John Pareles, qui l’a probablement le mieux exprimé : “Son existence importe plus que sa qualité”.
De tels débats ne font que souligner le fait que les Beatles valent toujours la peine d’être débattus : Presque toutes les opinions émises sont fondées sur l’hypothèse que le groupe est génial et que son héritage est infini. De nombreux membres de la génération Z, nés après la sortie des titres de l’Anthologie Lennon, semblent être d’accord. Le groupe est populaire sur TikTok et, abomination ou pas, la vidéo de “Now and Then” compte déjà 22 millions de vues sur YouTube. (Tout ce que les Beatles ont à faire, semble-t-il, c’est de fournir une excuse occasionnelle pour parler des Beatles, de temps en temps. Celui-ci ne sera probablement pas le dernier.
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