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Sur cette terre

Publié le 09 novembre 2023 par Onarretetout

fullsizeoutput_4742Mahmoud Darwich (1941-2008) a écrit le texte suivant qu’on peut lire dans l’anthologie La terre nous est étroite (traduction Elias Sanbar) :

Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : l’hésitation d’avril, l’odeur du pain à l’aube, les opinions d’une femme sur les hommes, les écrits d’Eschyle, le commencement de l’amour, l’herbe sur une pierre, des mères debout sur un filet de flûte et la peur qu’inspire le souvenir aux conquérants.

Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : la fin de septembre, une femme qui sort de la quarantaine, mûre de tous ses abricots, l’heure de soleil en prison, des nuages qui imitent une volée de créatures, les acclamations d’un peuple pour ceux qui montent, souriants, vers leur mort et la peur qu’inspirent les chansons aux tyrans.

Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie : sur cette terre, se tient la maîtresse de la terre, mère des préludes et des épilogues. On l’appelait Palestine. On l’appelle désormais Palestine. Ma Dame, je mérite la vie, car tu es ma Dame.

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Samer Abu Hawwash, poète palestinien né au Liban en 1972 écrit ce texte récemment publié, début novembre (traduction : María Luisa Prieto), dans lequel il fait référence au texte de Mahmoud Darwich : 

Peu importe que personne ne nous aime 
dans ce monde. 
"De toute façon, il semble que ce soit un amour à sens unique". 
disent nos aînés, fatigués de l'idée de terre 
et notre poète, debout sur l'horizon lointain 
s'exclame : "Délivrez-nous de cet amour cruel !" 
puis murmure, s'excusant 
de l'éphémère optimisme enfantin : 
"Sur cette terre, il n'y a rien 
rien ne vaut la peine d'être vécu ".  
Peu importe que personne ne nous aime. 
Nous sommes fatigués des mots qui se disent et ne se disent pas, 
des mains qui se tendent et ne se tendent pas 
des yeux qui voient et ne voient pas. 
Nous sommes fatigués de nous-mêmes 
dans cette longue nuit, 
nous sommes fatigués de nos mères qui s'accrochent  
à ce qu'il reste de nous 
et du rocher que nous portons sur notre dos 
comme une malédiction éternelle, 
d'aller avec elle d'abîme en abîme 
et de mort en mort 
et ne jamais arriver. 

Peu importe que personne ne nous aime  
ou que personne ne nous accompagne à nos funérailles.  
Nous marchons en silence vers une ultime errance, 
nous nous prenons par la main 
et marchons seuls dans le désert du monde. 
À un moment donné 
un enfant se retourne, 
jette un dernier regard sur les débris 
et dit, en versant une larme : 
Le fait que personne ne nous aime n'a plus d'importance. 


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