Robert Richard
Mon père qui es aux Cieux - du moins je l'espère et prie Dieu qu'il en soit ainsi, je me suis recueilli ce matin devant le caveau familial à Issy-les-Moulineaux.
Il y a longtemps, Papa, que je n'avais pas accompli ce pèlerinage aux sources paternelles. Mais je ne pouvais oublier de le faire en ce 5 novembre 2023.
Le 5 novembre 1983, tu nous as quittés. C'était un samedi. Je voulais te rendre visite, parce que ton état s'était aggravé, mais je l'ai remise au lendemain.
Il faut dire que je travaillais dur pour diriger l'entreprise familiale que tu m'avais léguée et que je ne m'arrêtais que le jour de repos choisi par le Seigneur.
En me recueillant ce matin, je me suis souvenu que, pour te voir une dernière fois, j'étais parti de Versailles, dans la nuit, pour l'hôpital de la Pitié à Paris.
Tandis que je contemplais ton corps inanimé, tes yeux noirs se sont grands ouverts, par un réflexe qui m'a saisi d'effroi et m'a fait croire que tu me regardais.
Je t'ai regardé, rempli de tristesse, mais, comme ce matin, je t'ai rendu hommage et remercié du fond du coeur de m'avoir engendré et fait ce que je suis.
Certes je n'ai jamais fait dans ma vie ce que j'aurais voulu faire, puisque je voulais devenir écrivain et assurer mon ordinaire en étant journaliste ou enseignant.
Tu m'en as dissuadé et sans doute avais-tu raison. À quatorze ans, tu m'as proposé de prendre ta suite parce que j'étais le seul garçon de tes quatre enfants.
Sans toi aurais-je été au lycée Henri IV à Paris, même si j'ai réussi à passer haut la main l'examen d'admission, le lendemain de notre entrevue avec le proviseur?
Sans toi aurais-je été à l'École Polytechnique Fédérale de Lausanne, même si j'ai réussi à l'intégrer après un an préparatoire au Cours de Mathématiques spéciales?
Sans toi aurais-je été dirigeant d'une Petite et Moyenne Industrie pendant près de vingt ans, même s'il était risqué de l'être dans une France de plus en plus socialiste?
Sans toi aurais-je pu, grâce à ce curriculum, exercer, après la fin de l'aventure industrielle, trois autres métiers dans le domaine desdites ressources humaines?
Car, grâce à toi, j'ai appris à apprendre et à m'adapter aux circonstances, fussent-elles difficiles, et réserver mes loisirs aux sports et... aux arts et lettres que j'aime.
Je ne crois pas t'avoir jamais remercié de vive voix, même si nous étions complices, quand nous avons travaillé ensemble et après que tu as pris une retraite tardive.
Quarante ans après, je t'ai remercié ce matin, dans l'intimité, devant la famille paternelle réunie, ce soir je te remercie publiquement, par écrit, sur ce blog-notes.
J'espère seulement que je n'aurai pas trop démérité ici-bas et que je pourrai vous rejoindre un jour, toi, Maman et ma soeur Chantal, aux corps encore dispersés.
En attendant, puisque nul ne sait ni le jour ni l'heure, je pense fortement à vous trois, comme aux autres défunts de la famille, et, confiant, prie Dieu pour tous.
Francis
Concession à perpétuité Famille Richard - Faureau