Traduit du japonais par Corinne Atlan
K., le narrateur, est amoureux de son amie Sumire, lectrice passionnée comme lui et écrivain en herbe, laquelle, au cours de sa vingt-deuxième année, tombe amoureuse pour la première fois... de Miu, une élégante femme mariée, de dix-sept ans son aînée, qui décide de l'embaucher comme secrétaire particulière. Mais Miu, qui semblait promise à une grande carrière internationale comme pianiste, semble comme cassée à l'intérieur : un événement, dont elle refuse de parler, aurait blanchi en une nuit ses cheveux à l'âge de vingt-cinq ans. Jusqu'où son secret va-t-il entraîner Sumire ?
"Ce fut alors qurapport avec la réalité." (p. 57)
Ce roman réunit toute une thématique susceptible de séduire ses lecteurs, constitués statistiquement de femmes : la passion de la lecture, de la littérature, de l'écriture, de la musique, le désir et l'amour. Dès l'incipit, en effet, on est d'ores-et-déjà conquis. ue le narrateur soit un homme n'y change rien, au contraire : son regard amoureux valorise les deux protagonistes sans mise à distance. Pourtant, la solitude est omniprésente : K. et Sumire restent seuls avec leur désir, Miu s'est désolidarisée du monde des vivants, du monde des désirs. Chacun se côtoie sans jamais se toucher, se posséder, s'aimer, comme des satellites à la dérive.
Dans toute la première partie du roman, le narrateur assiste à la métamorphose de son amie, d'ordinaire peu soucieuse de son apparence extérieure et mettant sa vocation d'écrivain au-dessus de toute autre activité, qui, par amour, prend une allure féminine et assagie, appliquée et consciencieuse, délaissant totalement l'écriture. Dans une seconde partie, ce n'est plus à une métamorphose que l'on assiste, mais à l'étrange disparition de Sumire : c'est là que le surnaturel intervient... Avec habileté, Haruki Murakami détourne le thème du miroir, qui fut beaucoup exploité dans la littérature fantastique, pour nous proposer une situation bien plus angoissante... à laquelle peut-être on a pu être confronté une fois, heureusement sans cette issue, mais qui désormais nous trottera dans la tête chaque fois que l'occasion se présentera... Machiavélique.
Excellent. A lire sans hésiter. MURAKAMI, Haruki. - Les amants du Spoutnik / traduit du japonais par Corinne Atlan. - 270 p. : couv. ill. en coul.. - ISBN : 978-2-264-03932-3.