C’est le dessin qui séduit d’emblée et la couleur, un noir et blanc très travaillé que le lecteur que je suis voit changeant : si vous revenez sur une image, vous ne la verrez pas deux fois semblable. C’est troublant. Comme est troublante l’histoire dont, bien sûr, on peut trouver des similitudes avec d’autres récits ou bandes dessinées : la solitude, après la fin brutale d’un monde, inexpliquée. Et puis une rencontre éphémère qui pourrait avoir un effet sur les autres, fantômes ou « bloqués » dans des attitudes figées. Plus qu’un récit d’après l’apocalypse, j’y lis l’arrivée du désir amoureux dans la tête d’un garçon, qui peut changer le monde et réveiller les autres. Ce n’est pas sans danger, ni pour lui, Héli, ni pour elle, Selen. Ces deux noms, ce sont sans doute les abréviations de Hélios, le soleil, et Séléné, la lune, deux divinités qui se rencontrent rarement mais exercent une attraction l’une envers l’autre. Ici, dans un monde où le temps a passé trop vite, peut-être le monde de l'enfance, c’est un chat qui attire Héli vers Selen et qui fait mentir l’adage prétendant que la nuit tous les chats sont gris. Celui-ci est plus affectueux que les autres animaux qui suivent et menacent les enfants bien décidés à affronter le destin.