9782234046917
" data-image-meta="{" data-medium-file="https://laboucheaoreilles.files.wordpress.com/2023/06/undset_sigrid_vigdis_la_farouche.jpg?w=176" aperture="aperture" />Couverture chez StockJ’ai lu ce roman pour mon cercle de lecture, ne connaissant Sigrid Undset que de nom et vaguement au courant de sa nationalité norvégienne et de son prix Nobel de littérature autour des années 1920. Je n’avais pas la moindre idée du style de ses romans, et j’ai été d’abord très étonnée que « Vigdis la farouche » me propulse dans le monde brutal et impétueux des Vikings, dans un Moyen-Âge épique et mythique.
Note pratique sur le livre
Editeur : Stock
Collection : La Cosmopolite
Traduit du norvégien par Marthe Metzger
Nombre de pages : 188
Quatrième de Couverture
C’est en 1909 que Sigrid Undset écrivit Vigdis la farouche, roman inspiré des sagas islandaises qu’elle avait traduites en norvégien. Son père, célèbre archéologue, lui avait communiqué sa passion pour l’histoire et pour ce haut Moyen Age scandinave qui sera le cadre, dix ans plus tard, de l’immortelle Christine Lavransdatter.
Vigdis, belle et sauvage, préfigure d’ailleurs Christine. Elle a quinze ans à peine quand Viga Ljot, un marin islandais, s’éprend d’elle. Dans les bois où il la retrouve en secret, il abuse d’elle, malgré sa résistance. Déchirée entre la passion de Viga Ljot et l’amour de son ami Kare, Vigdis s’enfuit.
Viga, désespéré, retourne en Islande où il tentera de l’oublier. Vigdis, dans la solitude et dans la honte, accouchera d’un fils. Et c’est à cet enfant, Ulvar, qu’elle demandera un jour de la venger en déposant la tête de Ljot sur ses genoux
Née en 1882, Sigrid Undset se consacre très tôt à la littérature. Elle connaît rapidement le succès, avec notamment Jenny, Printemps, Maternités et Christine Lavransdatter (tous publiés aux éditions Stock), et reçoit le prix Nobel de littérature en 1928. Elle est morte en 1949.
Mon avis
J’avoue avoir été désarçonnée, dans les premiers chapitres, par l’atmosphère rude, le style laconique, et une certaine froideur solennelle qui se dégage des personnages, des dialogues, des descriptions. Ca m’a fait parfois penser au style des livres bibliques ou mythologiques : une écriture aride, des personnages durs, portés vers l’héroïsme et, en même temps, écrasés par le destin. Car cette histoire est clairement une tragédie, aucun des protagonistes n’obtiendra finalement ce qu’il désirait, tous auront été les jouets de forces qui les dominent : Ljot est victime de ses pulsions destructrices, Vigdis de son orgueil et de son entêtement dans la vengeance, quant à Ulvar il se sentira contraint de tuer son père par loyauté envers sa mère. La plupart des personnages – Vigdis et Ulvar, en tête – sont des caractères raides, qui restent fidèles à des engagements, à des promesses ou à des principes d’honneur même si ça doit faire leur malheur et celui des autres.
A la fin du livre, Ulvar apporte à sa mère la tête de Ljot et la pose sur ses genoux, ce qui m’a fait penser à la pièce d’Oscar Wilde, Salomé, un thème biblique très « fin de siècle », une parfaite image de la femme fatale, en littérature comme en peinture, et « Vigdis la farouche », qui date de 1909, a sûrement subi l’influence de cette imagerie symboliste ou décadente.
Le seul personnage vraiment sympathique de cette histoire est Leikny – la femme que Ljot va épouser, par dépit, après avoir quitté Vigdis – elle est aimante, douce, bienveillante, et disposée au pardon, mais ces belles qualités n’empêcheront pas la malédiction de Vigdis de s’abattre sur elle et sur ses pauvres enfants, de façon impitoyable. Car Vigdis avait lancé une malédiction contre la descendance de Ljot et il faut croire qu’un dieu a décidé d’écouter cet appel vengeur.
Une écriture majestueuse, un contexte dépaysant, un souffle épique, une intrigue prenante… donc une lecture intéressante, que je ne regrette pas du tout !
Certes, ce n’est pas forcément mon style de livre préféré, et je n’irai peut-être pas me précipiter maintenant sur les œuvres complètes de Sigrid Undset, mais ça a été tout de même un beau moment de lecture et une découverte agréable.
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Un Extrait page 48
Une nuit, Vigdis se leva et sortit du chalet. On avait dépassé le solstice d’été, le temps était sombre et sans vent. La jeune fille traversa le pré.
En arrivant à la barrière, elle n’eut plus que la force de se coucher par terre. Un cheval noir passa à la lisière de la forêt. Il ne suivait pas le troupeau, mais restait près des maisons. Il aimait à être caressé, surtout par Vigdis. Le cheval s’approcha d’elle et la renifla. Il ne la quitta plus. Quand les douleurs se calmèrent, elle se leva pour s’éloigner un peu plus. L’animal la suivit. Chaque fois que la souffrance la reprenait, elle lui entourait le cou de ses bras et s’appuyait contre lui, alors il tournait la tête, mordillait l’épaule et le dos de Vigdis et restait immobile près d’elle. Enfin elle arriva près d’une grande étendue d’eau sombre. Au plus haut du ciel une éclaircie apparaissait entre les nuages, l’étang en réfléchissait l’azur, par ailleurs, tout était noir.
À un certain moment, Vigdis cria tout haut, un écho lugubre lui répondit des rochers de l’autre rive. Elle prit peur et s’enfonça un morceau de son manteau dans la bouche et le déchiqueta en menus morceaux avec ses dents. Sa bouche s’emplit de fils de laine, elle fut prête à vomir. Tout près d’elle elle entendit murmurer un ruisseau. En ouvrant les yeux, elle vit que le jour était sur le point de naître, de petites vagues noires ridaient l’étang, mais Vigdis n’avait plus la force de ramper jusque là, et la nuit s’écoula misérablement pour elle.
Le soleil vint lui piquer les yeux. Peu après ce fut la délivrance. Vigdis resta longtemps sans connaissance, mais enfin, elle se sentit réchauffée par la chaleur solaire et elle entendit crier son enfant. Elle le regarda.
(…)