En découvrant Le titre du dernier roman d’Olivier Liron, Le livre de neige, j’aurais pu avoir la chanson Tombe la neige dans la tête ayant un véritable jude-box dans le cervau mais j’ai plutôt pensé au Le livre de ma mère d’Albert Cohen.
Difficile même si on n’a pas lu ce grand classique (huez-moi c’est mon cas), de ne pas y penser. Et c’est bien à sa mère que l’auteur consacre son dernier livre remontant au commencement (l’enfance de Neige en Espagne sous Franco) à la femme qu’il a connu enfant et adulte. Au moment où je me demandais qu’elle était la part de vérité et d’imagination, Olivier Liron m’a répondu quasi instantanément en écrivant (moment assez magique, j’ai eu l’impression qu’il avait lu dans ma tête ) :
« J’ai longuement parlé avec Nieves pendant l’écriture de ce livre. J’ai tiré de nos échanges certains éléments, des réponses et surtout beaucoup de nouvelles questions. A Noël 2018, j’ai interrogé Carmen [sa grand mère] qui ne perd jamais une occasion de raconter des souvenirs, et j’ai enregistré ces conversations »
Avec Neige, j’ai découvert l’existence de la petite Espagne située à la plaine Saint Denis, petite Espagne liée aux vagues d’immigration espagnole (et le racisme qui va avec, la France l’a toujours été visiblement !). En effet la mère d’Olivier Liron quitte Madrid pour rejoindre ses parents partis travailler à Paris (elle prend le train seule à 9 ans, ce qui me parait inimaginable même avec ma fille de 12 ans !). Face à ce pan de l’histoire si peu connue, Olivier Liron pose une question qui me parait essentielle :
Pourquoi, en France, les jeunes générations, n’ont pas davantage accès à l’histoire de l’immigration ? Pourquoi cette histoire commune, belle et nécessaire, n’est pas inscrite dans les programmes scolaires ? Pourquoi des phénomènes aussi massifs occupent-ils si peu de place dans la mémoire collective ? Quelle amnésie nous constitue ?
A certains endroits de ma lecture du livre de Neige , je me suis demandée si Olivier Liron parlait vraiment de sa mère ou de lui :
La solitude ne lui fait pas peur. Par expérience, elle sait que c’est des autres qu’elle doit se protéger. Seule elle est si bien, à l’abri, dans ses mondes imaginaires.
Dans la seconde partie du livre de Neige, Olivier Liron devient lui même un personnage puisqu’il nait en 1987. Il continue à peindre un portrait plein de tendresse pour sa mère à travers des moments de vie, à travers les différentes facettes de cette femme. J’aime beaucoup les scènes de cuisine ou de repas partagé dans les livres et j’ai trouvé le chapitre Délices particulièrement réussi. Il n’est question que de choses simples mais dont on se souvient toute sa vie.
Olivier Liron aurait pu dessiner un image un peu trop lisse (même s’il a suffisamment d’humour pour éviter cet écueil) mais il dit aussi la tristesse de sa mère avec beaucoup de poésie :
Tout ce que je peux dire, c’est que, du jour au lendemain, Neige a commencé à tomber.
Cette tristesse inexpliquée pour un enfant le pousse à cacher qu’il est victime de violence et de harcèlement à l’école, sujet abordé dans son précédent roman. Le roman montre d’ailleurs l’école dans ce qu’elle peut avoir de pire (une machine à broyer les différences, une machine à exclure) et le meilleur à travers sa mère, professeur dans les ZEP et qui arrive à intéresser les enfants par ses méthodes pédagogiques.
En tant que mère, j’ai refermé ce livre en imaginant Neige avec ce roman dans les mains ..quel beau cadeau !
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