La famille de Kob, ce sont des gens bien. Le genre de gens bien que les gars comme Kob se mettent à snober vers treize ou quatorze ans pour aller avec des types comme mon frère. Je ne suis pas sûr que les parents de Kob aient été ravis de cette amitié.
Or ledit Kob, et non pas Bob, s'est suicidé. Ce qui la fiche mal dans une telle famille. Aussi n'en est-il pas question lors de la cérémonie bienséante de ses obsèques qui ont lieu à l'église.
Le frère du narrateur vient la perturber en invectivant Kob devant son cercueil, quand est venu le moment, pour ceux qui le souhaitent, de lui adresser un dernier et amical hommage.
Le narrateur est gêné de ce scandale commis par son frère, membre du groupe néopunk que Kob a formé après avoir accompli un long périple autour du monde et s'être mis à son compte.
Cette existence non conforme n'avait pas dû plaire à sa famille. Mais il ne fallait surtout pas que, comme son suicide, son mode de vie décevant soit évoqué le jour où elle lui dirait adieu.
Diane, une amie d'enfance du narrateur, rencontrée à l'issue de la cérémonie et proche du groupe, appelle ce dernier le surlendemain pour lui proposer de s'occuper du chien de Kob.
Diane force la main du narrateur en emmenant le chien chez la grand-mère de celui-ci chez laquelle il réside. En quête d'emploi, il ne veut pas le garder, voudrait refiler cette Patate chaude.
Car l'animal, une femelle, a été baptisé Patate par son défunt maître et Marie Beer prend un plaisir évident à décrire les mauvaises excuses de tous ceux qui refusent de s'en occuper.
Il faut dire que c'est un gros chien, un molosse, un malabar, comme les aimait Kob et comme ne les aimaient pas ses parents, du genre à laisser crever les ours polaires sans réagir...
Bien malgré lui, le narrateur s'occupe comme il peut du chien qui l'accompagne partout, ce qui ne laisse pas de lui nuire, dans ses démarches de chômeur, tout comme dans ses visites.
En famille, Patate n'est pas la bienvenue. Son frère est encore le moins réticent, mais il se moque de lui en lui disant que c'est bien fait, car à lui on peut faire faire tout ce qu'on veut:
Aux gens, tu ne sais pas leur dire merde.
L'auteure, qui est pince-sans rire, a le sens du théâtre et prépare un coup jubilatoire au lecteur, à la fin, qu'il ne voit pas venir et qui provient de Kob, lequel a bien planifié son départ.
Le conseil d'un tiers bienveillant?
Il faut aussi savoir tirer parti des situations qui nous surprennent et qui contrarient nos projets...
Francis Richard
Patate chaude, Marie Beer, 180 pages, Éditions Encre Fraîche
Livre précédent chez le même éditeur:
Sagama, 200 pages (2021)