Emerson Jones, le grand bond

Tombé dans un trou d'air après qu'Ashleigh Barty ait pris tout le monde de court en annonçant sa retraite sportive en mars 2022, le tennis féminin australien est peut-être en train de retrouver des raisons d'espérer grâce à sa nouvelle enfant prodige venue du Queensland, Emerson Jones. À quinze ans, la native de Gold Coast a signé l'exploit le plus retentissant de sa jeune carrière le 15 octobre dernier en remportant au Japon la prestigieuse Mayor's Cup d'Osaka, un des tournois les plus cotés du circuit Junior. Jones devenait, par la même occasion, la plus jeune australienne à gagner une épreuve de catégorie J500, douze ans après une certaine... Ashleigh Barty, victorieuse de Wimbledon Junior en 2011. À Osaka, la semaine dernière, l'actuelle dixième joueuse mondiale a tracé sa route sans sourciller en ne cédant aucun set à ses adversaires, même s'il a fallu qu'elle s'emploie en finale pour venir à bout de l'invitée surprise Kristiana Sidorova.À bien y regarder, et même si l'exploit revêt un caractère sensationnel, l'émergence d'Emerson Jones n'est pas si surprenante. Née pour ainsi dire avec une raquette à la main (elle n'avait que quatre ans quand elle a commencé à taper la balle), l'adolescente, passionnée de course à pied et de natation, grande admiratrice d'Emma Raducanu et fan de la série Young Sheldon, est issue d'une famille de sportifs de haut niveau avec un père footballeur, une mère, Loretta Harrop, médaillée olympique aux Jeux d'Athènes 2004 en triathlon (médaille d'argent), tandis que son frère aîné, Hayden Jones, est aussi joueur de tennis en catégorie Junior (vingt-troisième mondial à son meilleur niveau). Après des débuts discrets sur le circuit des jeunes en 2021, au niveau local, Emerson Jones voit sa carrière subitement décoller l'année suivante lorsqu'elle gagne son premier tournoi Junior à Sydney. On la retrouve quelques semaines plus tard à Osaka, lors de la Mayor's Cup, où elle atteint les demi-finales. Elle se hissera ensuite de nouveau dans le dernier carré au tournoi de Nonthaburi, en Thaïlande, avant d'être sélectionnée en équipe d'Australie pour jouer la Billie Jean King Cup Junior. Mais, c'est surtout cette année que la carrière de la joueuse explose. Malgré de modestes performances en Grand Chelem (pas mieux qu'un troisième tour à Roland-Garros et Wimbledon) et sur terre battue (surface qu'elle peine encore à apprivoiser), elle produit un remarquable été avec une première finale en ITF Pro à Calundra (W15), suivi d'un retour triomphal sur le circuit Junior avec une victoire au tournoi J300 de College Park, sans perdre un set (elle y bat en finale l'américaine Aspen Schuman). Son ratage complet à l'US Open (élimination au premier tour) ne l'empêche pas de rebondir pour s'imposer dans les championnats régionaux Asie/Océanie à Wanju (J300), là encore sans concéder un set. Une série d'invincibilité qu'elle a donc su préserver à Osaka la semaine suivante en survolant les débats. Voici des résultats qui en disent long pour une joueuse aussi jeune que l'on reverra le mois prochain avec l'équipe d'Australie pour la phase finale de Billie Jean King Cup Juniors et qui figurera sans doute parmi les favorites du grand bal de fin de saison en Floride, à l'Orange Bowl. En cas de belle performance là-bas, la fédération australienne serait bien avisée de lui offrir une invitation pour le prochain Open d'Australie, ce qui serait la moindre des choses.